Maroc

Occupation du domaine public : la commune de Fès serre la vis

Le Conseil communal de Fès a validé de nouvelles mesures encadrant l’occupation temporaire du domaine public, incluant une révision des tarifs. Si la commune met en avant la rationalisation et l’équité, l’association des restaurateurs et cafés dénonce un manque de concertation et des tarifs jugés excessifs, ouvrant un bras de fer avec la municipalité.

La ville de Fès est au cœur d’une vive controverse depuis la validation, lors de la dernière assemblée générale ordinaire (AGO) de la commune, d’une série de mesures réglementant l’occupation temporaire du domaine public. Désormais, exploiter, même provisoirement, le domaine public de Fès à des fins commerciales ou autres, impliquera systématiquement une demande d’autorisation auprès de la commune et le paiement d’une redevance.

Si la municipalité met en avant une volonté de rationaliser l’utilisation de l’espace public et d’ajuster les redevances d’exploitation, ces décisions ont provoqué un véritable tollé au sein de l’association des propriétaires de restaurants et cafés de la ville.

L’onde de choc a été particulièrement forte parmi les professionnels du secteur, qui dénoncent un manque de concertation et des mesures jugées «injustes» et «inopportunes», au regard du contexte économique déjà fragilisé par les répercussions de la crise sanitaire et un ralentissement général de l’activité dans la ville impériale.

Un encadrement plus strict de l’occupation du domaine public
Les nouvelles mesures, contenues dans un arrêté communal, visent à établir un cadre plus précis pour l’exploitation temporaire du domaine public, sans construction permanente. Elles concernent un large éventail d’activités, allant des terrasses de cafés et restaurants aux étalages commerciaux, en passant par l’organisation d’événements, les chantiers de construction, les cafés mobiles, les food trucks, la publicité et l’installation de réseaux publics.

Parmi les principaux changements introduits, on note l’obligation d’obtenir une autorisation préalable pour toute occupation du domaine public, quelle qu’en soit la durée, tout en adoptant la plateforme numérique, «Rokhas.ma», pour centraliser et simplifier les demandes d’autorisation.

La commune a aussi opté pour la révision des tarifs d’occupation, avec une modulation en fonction de la localisation, de la surface occupée et de la nature de l’activité.

La révision des tarifs au cœur de la discorde
C’est particulièrement la révision des tarifs d’occupation qui a mis le feu aux poudres. La commune justifie cet ajustement par la nécessité de tenir compte de la valeur du domaine public, des services rendus et de l’équité entre les différents usagers.

Cependant, pour les restaurateurs et cafetiers, cette révision tarifaire intervient au pire moment et constitue une charge supplémentaire insupportable.

Selon les nouveaux barèmes proposés, les tarifs pour les terrasses de cafés et restaurants, par exemple, varient désormais de 20 à 50 DH par mètre carré et par trimestre dans les rues principales, et de 20 à 30 DH dans les autres rues. Des tarifs spécifiques sont également prévus pour d’autres formes d’occupation, telles que les étalages commerciaux, les chariots de restauration légère, les échafaudages, ou encore le stationnement temporaire sur les trottoirs.

La colère de l’association des professionnels
La réaction de l’Association des propriétaires de restaurants et cafés de Fès ne s’est pas fait attendre. Par la voix de son bureau régional de Fès-Meknès, affilié à la Fédération nationale des propriétaires de cafés et restaurants du Maroc (FNPCRM), l’organisation professionnelle a exprimé sa «vive indignation» face à ces décisions, prises, selon elle, «sans concertation» et de manière «unilatérale» par le conseil communal. L’association dénonce une «décision arbitraire» qui risque de «porter un coup fatal» à un secteur déjà exsangue.

«Alors que nous peinons à nous relever des conséquences de la crise sanitaire et d’une activité économique atone, la commune choisit d’alourdir la facture», s’insurge Idrissi El Hakim, président du bureau régional Fès-Meknès de la FNPCRM.

Les professionnels mettent en avant un contexte économique et social particulièrement difficile à Fès. Outre les séquelles de la pandémie de covid-19, ils pointent du doigt un ralentissement de l’activité touristique, des travaux publics perturbateurs et une baisse du pouvoir d’achat des habitants.

«La ville est en chantier permanent, les travaux sont omniprésents, et nos établissements en subissent directement les conséquences», déplore El Hakim.

«Au lieu de nous soutenir, de nous accorder des mesures de compensation, la commune choisit d’augmenter les taxes et les redevances», s’indigne-t-il.

Démolitions de façades et absence de dialogue
L’association dénonce également une autre source de crispation qui est les démolitions de façades de commerces, entreprises par les autorités locales sans concertation préalable.

«On nous démolit nos devantures sans même nous consulter sur l’aspect des nouvelles façades, c’est un véritable acharnement», s’emporte un restaurateur.

Pour les professionnels, ces démolitions, conjuguées à la hausse des tarifs d’occupation, créent un climat d’incertitude et de découragement. «De nombreux établissements sont déjà au bord de la faillite, ces mesures risquent de les achever», alerte le président de l’association.

Menace de protestation et appel au dialogue
Face à ce qu’ils considèrent comme un «passage en force» de la commune, les restaurateurs et cafetiers de Fès affichent leur détermination à se faire entendre. Lors d’une récente réunion de leur bureau régional, ils ont unanimement rejeté les nouvelles mesures et menacé de recourir à des actions de protestation si leurs revendications ne sont pas prises en compte.

«Nous demandons l’ouverture d’un dialogue immédiat avec la commune, afin de trouver des solutions concertées et équitables», insiste El Hakim.

«Nous ne sommes pas opposés à une réglementation de l’occupation du domaine public, mais elle doit être juste, réaliste et tenir compte de nos difficultés», précise-t-il.

L’association appelle la commune à faire preuve de «sagesse» et de «responsabilité» en revenant sur ces décisions et en privilégiant la voie du dialogue et de la concertation.

Mehdi Idrissi / Les Inspirations ÉCO



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