Mutations des valeurs sociétales : ce que révèle l’étude de la Chambre des représentants
Toute civilisation passe, au fil des décennies, par diverses transitions, tout en conservant des traits millénaires fondamentaux. Aujourd’hui plus que jamais, et avec l’intégration de nouveaux éléments culturels, les Marocains aspirent à un changement social, surtout au niveau de la jeunesse, censée porter l’avenir du Maroc. C’est dans ce sens qu’une étude sur les évolutions et attentes de nos concitoyens a été dévoilée par la Chambre des représentants.
Étudier le terrain est la façon la plus pertinente pour comprendre la société et lancer une réforme si nécessaire. En vue d’appréhender les évolutions des valeurs – ciment d’une communauté – et attentes des Marocains, la Chambre des représentants a dévoilé les résultats d’une étude, révélant les changements importants survenus dans notre société.
Des objectifs précis
Cette étude vise à identifier les principaux changements ayant impacté les valeurs de la société marocaine et à déterminer les orientations des Marocains envers le degré de mise en pratique des valeurs fondamentales au niveau institutionnel. Elle a également pour finalité d’identifier les facteurs et les raisons qui seraient à l’origine, selon les citoyens, de l’incapacité des institutions à appliquer ces valeurs. Il s’agit enfin de définir les mécanismes institutionnels de leur mise en pratique, et ce, compte tenu des attentes de la population.
Afin d’aboutir à des résultats reflétant les orientations des citoyens des différentes régions du Royaume, l’étude a couvert l’ensemble du territoire national, en tenant compte de la disparité démographique entre les domaines de recherche, en fonction du milieu (urbain-rural), de la variable genre (homme-femme), de l’âge et de la norme de densité institutionnelle. Pour mener à bien cette mission, la Chambre des représentants a mené un sondage auprès de 1.600 personnes, sur la base d’un questionnaire comprenant 49 questions, afin de collecter les données nécessaires à l’étude. Il en ressort que le nombre de répondants qui ont choisi l’activation des valeurs allant dans le sens de la modernité est de 947 (59% de l’échantillon), alors que ceux qui privilégient les valeurs basées sur la tradition sont au nombre de 607 (38%).
L’importance du sentiment d’appartenance familiale
Sans surprise, l’étude révèle que l’appartenance familiale constitue une valeur prioritaire pour la majorité des Marocains. 31% considèrent leur pays comme une composante «importante et plus utile», notant que l’appartenance nationale reste «la plus importante».
Par ailleurs, 33% considèrent que l’appartenance de base s’évalue de la ville au village, la province et la région, en passant par la tribu, la commune rurale et le quartier résidentiel. D’autres (36%) ont le champ d’observation plus large et déterminent leur appartenance par rapport à l’Afrique ou au monde arabe et amazigh, voire islamique. Autres constats intéressants : près d’un tiers des répondants considèrent que l’affiliation la plus importante est l’affiliation locale, qui peut être traduite comme étant un appel au renforcement de l’affiliation nationale avec la réduction des différences entre les territoires du Royaume.
En ce sens, les Marocains lancent un appel au fondement d’une patrie dont les enfants peuvent jouir, à parts égales, des richesses et ressources du Royaume. Autre attente relevée par cette étude : les personnes interrogées revendiquent un renforcement des liens et des alliances externes basés sur le critère de la croyance religieuse commune, et en même temps, sont favorables au partenariat et à la coopération avec divers pays du monde.
L’égalité érigée en valeur cardinale
Selon cette étude, les Marocains, ou du moins, une grande majorité, préfèreraient l’égalité à la liberté. Un constat qui s’expliquerait par le fait que l’égalité est basée, selon eux, sur la justice, la répartition égale des droits politiques, les capacités individuelles et les moyens de subsistance, les opportunités de promotion sociale et les chances de réussite dans la vie. 60% des personnes interrogées optent ainsi pour l’égalité, alors que près de 38% d’entre elles préfèrent la liberté. Et pour conclure, l’étude démontre qu’entre 72% et 81% des sondés considèrent que les choix qui conduisent un citoyen à ne pas payer l’impôt s’il en avait l’opportunité, à mentir pour réaliser un intérêt personnel, à accepter un pot-de-vin pour rendre un service, à donner des cadeaux pour obtenir des services publics, à favoriser des amis et des parents au détriment des plus méritants, et à ne pas payer le prix d’un ticket de bus, sont tous injustifiés. Par ailleurs, 83% des répondants considèrent que fournir des informations aux autorités sur une personne afin d’obtenir justice est totalement justifié.
Kenza Aziouzi / Les Inspirations ÉCO