Maroc

Mohamed Rahj : “ce séisme va influencer la Loi de Finances 2024”

Quel est le coût de ce séisme et comment risque-t-il d’impacter les orientations macro-économiques du Maroc dans les prochains mois ? Éléments de réponses dans cette interview avec le fiscaliste et économiste Mohamed Rahj. 

Quelles estimations peut-on faire des dommages de ce séisme ?
Actuellement, il serait très difficile de donner un chiffre. On attend le temps d’avoir des informations précises de la part des autorités, même s’il est vrai que selon des estimations américaines, les pertes seraient estimées à environ 2 points du PIB. Si l’on se base sur le PIB de l’année 2023, qui serait de l’ordre de 130 milliards de dollars, environ 1.300 MMDH, nous serons alors tentés d’avancer le chiffre de 2,5 milliards de dollars, soit l’équivalent de 25 MMDH. Mais pour le moment, ces chiffres ne veulent pas dire grand-chose. Attendons d’avoir une estimation plus claire des autorités marocaines. Cela dit, c’est toujours impossible d’estimer la perte réelle de telles catastrophes, car, à elles seules, les pertes humaines sont irremplaçables.

Mais quel sera l’impact sur l’activité économique ?
Alors, il y a deux choses à souligner. Tout d’abord, les parties touchées et sérieusement impactées sont essentiellement rurales, ou des zones touristiques. Donc, ce sont des régions connues surtout pour des activités agricoles vivrières, alors que les villes comme Marrakech et Agadir sont des villes touristiques. Ce sont des zones d’activité du secteur primaire et de services qui sont touchées. Ce ne sont pas des zones industrielles. Ce qui nous pousse à dire que ce séisme n’aura pas d’impact sur la production et l’activité industrielle, qui est essentiellement concentrée dans la partie nord du pays, notamment sur l’axe Casablanca-Tanger. Ensuite, le second élément à souligner est que, comme je l’ai souligné plus haut, le séisme occasionnera des coûts que l’économie nationale devrait supporter.

Il y a aussi la question des infrastructures endommagées qui se pose. Il s’agit là aussi d’un coup important…Effectivement, surtout que l’on parle de villages entiers qui sont détruits. Il faudra donc reconstruire tous les lieux de vie, en plus des routes secondaires menant vers ces zones reculées. Cela dit, les grandes infrastructures comme les barrages, les routes principales et les autoroutes n’ont pas vraiment subi de dommages importants. Donc c’est une bonne nouvelle et cela va permettre la poursuite de certaines activités économiques, et, surtout, de maintenir le contact et la communication routière avec les zones sinistrées.

Que prévoit le budget dans ce genre de circonstances, notamment pour la gestion de la crise et de la reconstruction ?
Quand on examine le budget de l’État, on voit bel et bien qu’il y a des rubriques destinées aux situations d’urgence. Donc ces fonds de calamité devraient être activées. Aussi, comme vous l’avez observé, il a été décidé de réactiver le Compte spécial de solidarité. Les structures de l’État et les particuliers peuvent y contribuer selon les procédures annoncées par les autorités. Mais il est évident que l’effort pourrait être beaucoup plus important pour satisfaire les attentes et faire face aux urgences. Donc, le gouvernement doit étudier plusieurs moyens afin de mobiliser les fonds nécessaires, mais tout en ne faisant pas trop supporter cela aux concitoyens.

Quels sont ses moyens de mobilisation des financements ?
En plus de ce qui proviendra de ce fonds de solidarité, il est évident que la Loi de Finances 2024 sera forcément orientée par ce séisme. Il faut rapidement parer aux urgences. Le budget d’investissement de l’État sera influencé par tout ce qu’il faut réparer dans les zones sinistrées, surtout que c’est l’un des principaux points soulignés à l’issue de la première réunion présidée par le Roi Mohammed VI au lendemain de la catastrophe. Au-delà de la Loi de Finances, le Maroc pourra certainement compter sur ses partenaires financiers internationaux, qu’ils soient des partenaires bilatéraux ou des institutions financières internationales. D’ailleurs, les réunions annuelles de la Banque Mondiale et du FMI, qui sont normalement prévues à Marrakech, en octobre, pourront être un moyen d’annoncer des engagements en faveur du Maroc.

Donc vous vous attendez à des réorientations budgétaires pour la prochaine Loi de Finances ?
C’est une évidence. Nous sommes face à une catastrophe majeure. La priorité c’est de sauver des vies, et ensuite d’assurer un retour à la dignité à ces compatriotes. Cela passe par des programmes de reconstruction et, pour cela, il faut que le gouvernement se mobilise pour gérer cette situation.

Quel rôle pour les assurances dans le contexte actuel ? Aussi bien pour les structures formelles que pour les particuliers ?
Étant donné que la plupart des dommages sont dans le rural, et l’on sait que le monde rural est loin de tout ce qui touche à l’assurance, pour des raisons parfois religieuses ou d’accès, je pense qu’il est peu probable que les compagnies d’assurance soient vraiment une solution efficace dans le cas actuel. Mais en milieu urbain, les habitants qui ont contracté des contrats habitat peuvent faire intervenir leurs assureurs afin de voir les modalités de prise en charge.

Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO



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