Maroc

Maroc/Espagne. Un mariage de raison

Le Maroc et l’Espagne ont su protéger leur partenariat des vicissitudes du voisinage grâce à leur sens du pragmatisme et une décisive volonté de faire prévaloir des intérêts communs.

«Le Maroc est un partenaire indispensable». La phrase est tirée du rapport publié en 2014 par le ministère des Affaires étrangères espagnol sur la stratégie de l’action extérieure de la diplomatie espagnole. Dans ce rapport élaboré par l’ex-gouvernement de Mariano Rajoy, l’Exécutif souligne sa détermination à «tisser un dense réseau de relations et d’intérêts croisés» avec le Maroc, cependant dans un rapport qui date de 2015, le think tank espagnol «Institut Real Elcano» a mis le doigt sur une lacune relevée dans les relations bilatérales : l’absence de feuille de route claire et précise sur la gestion de cette relation. De fait, les deux gouvernements gèrent leurs affaires, au jour le jour, sans un plan de travail à long terme et en manœuvrant tant bien que mal pour esquiver les zones de turbulences. À priori, la formule fonctionne. L’Espagne est le VPR du Maroc auprès de l’Union européenne, une situation presque inédite il y a à peine une décennie.

Vision partagée
Autre signe de ce rapprochement, les deux pays aspirent, à la demande de Madrid, à organiser une coupe du monde de football sans oublier les petits gestes à première vue anodins mais ô combien précieux aux yeux de Rabat. Souvenez-vous de cette interdiction d’organiser une conférence au Congrès des députés espagnols, qui allait tendre la perche aux séparatistes. Du pain béni pour le Maroc à la veille de la reprise des négociations avec les séparatistes à Genève. Rabat à son tour avait rendu quelques faveurs à son voisin. En déclinant courtoisement, à la veille de la crise catalaniste, une visite du président catalan déchu Carles Puigdemont qui voulait se déplacer sous nos cieux pour une visite de travail en compagnie d’entrepreneurs. Le gouvernement marocain était l’allié de Madrid durant la crise des indépendantistes catalans, laquelle a pris en otage tout le royaume ibérique. Le ministère des Affaires étrangères et de la coopération a même émis un communiqué pour clamer son attachement à l’unité nationale et l’intégrité territoriale du royaume voisin, allant même jusqu’à qualifier la décision de Puigdemont «d’irresponsable et non viable». Du jamais vu dans les annales de la diplomatie marocaine.

Selon Eduard Soler, chercheur à l’Institut de Barcelone d’études internationales (IBEI), «depuis les années 80, il existe entre les deux pays la conviction de l’existence d’un matelas d’intérêts propice à amortir les chocs et les conflits qui pourraient surgir. De la sorte et pour garantir leur bon voisinage, les deux alliés ont commencé à construire, depuis la base, des mécanismes de coopération. La stratégie a donné des résultats probants, comme en atteste le haut niveau des relations économiques et humaines ainsi que la coopération entre les ministères et les forces de sécurité ainsi que les agents économiques. Cette coopération est désormais une réalité», rappelle l’expert des relations internationales en Méditerranée et au Moyen-Orient.

Mais ce rapprochement est-il assez solide pour faire face aux vicissitudes d’un voisinage à haut risque comme celui qui unit à jamais les deux pays ? De fait, Rabat et Madrid n’ont de cesse de se déclarer leur flamme, sans que l’occasion s’y prête, comme une manière de conjurer le mauvais œil.

Surmonter les crises
À y regarder de plus près, les deux voisins ne se départissent jamais de leur méfiance. La preuve en est ce silence qui s’empare des deux capitales quand une malédiction frappe les relations bilatérales. Et les exemples ne manquent pas pour illustrer cette réalité : les vagues migratoires qui semblent répondre à un critère des marchés boursiers, fluctuant selon l’intensité du thermomètre relationnel hispano-marocain ou encore les décisions touchant les intérêts de l’autre partie, prises sans une consultation préalable. L’exemple de la fermeture de la douane de Mélilia est la parfaite illustration de cette prudence qui plane dans le ciel des relations bilatérales. «Les contentieux entre les deux pays ne disparaîtront pas à moyen terme», reconnaît le chercheur espagnol.

«L’intensité des relations bilatérales sera la meilleure garantie pour surmonter une quelconque crise bilatérale entre les deux gouvernements. À ce sujet, il y aura toujours des forces sociales et économiques qui pousseront vers la détente», souligne le chercheur espagnol.

En somme, cette relation imposée par ce chapelet d’intérêts et de défis que les deux pays sont appelés à affronter en couple s’est bonifiée pour devenir un mariage de raison et il semblerait que les protagonistes aient fini par y prendre goût en découvrant ses multiples avantages. D’où le besoin de Rabat et de Madrid de renouveler constamment leurs vœux. 



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