Maroc-Espagne : le lobby agricole se déchaîne
La crise diplomatique entre Rabat et Madrid a donné des ailes au lobby agricoles et ses antennes régionales à travers une mobilisation maximale pour mettre à mal les expéditions marocaines.
Comme il fallait s’y attendre, il a suffi qu’un conflit éclate entre le Maroc et l’Espagne pour que les détracteurs du royaume sous les latitudes espagnoles sortent de leurs tanières. Alors que les deux pays sont embourbés dans une crise diplomatique et politique sous haute tension, quelques brebis égarées de la filière andalouse de fruits rouges commencent à s’agiter. L’UPA (Union des petits agriculteurs), minuscule entité agricole qui regroupe à peine quelques adhérents, s’agite activement autour du retour des saisonnières marocaines alors que leurs contrats n’arriveront à terme qu’à partir de fin juin.
L’UPA, qui joue au trouble-fête alors qu’elle a recruté à peine 300 personnes sur les 12.600 saisonnières ayant rejoint cette campagne agricole, multiplie les déclarations trompeuses, en insinuant que le Maroc finira par abandonner ses concitoyennes s’affairant dans les exploitations agricoles espagnoles.
Pourtant, le Maroc a répondu favorablement et surtout dans des délais si brefs, aux demandes de la filière espagnole de fruits rouges concernant le rapatriement des ouvrières agricoles ayant exprimé le souhait de regagner le pays pour des raisons d’ordre humanitaire (femmes enceintes, maladies, etc). Ainsi, une opération exceptionnelle de rapatriement d’environ 120 journalières a été organisée, le 19 mai dernier.
Les autorités diplomatiques marocaines à Madrid se sont mobilisées afin que cette opération se déroule dans les meilleures conditions, alors que la tension commençait déjà à se faire ressentir entre les deux pays. Et la filière a même adressé, dans un communiqué, des remerciements chaleureux aux autorités marocaines pour la gestion exemplaire de cette opération exceptionnelle. Une source autorisée au sein d’Interfresa, l’association andalouse interprofessionnelle des producteurs de fruits rouges a confié aux Inspirations ÉCO que la démarche de cette association est déplorable.
«Certes, il existe des inquiétudes à propos de ce retour qui devrait être programmé dans les prochaines semaines, mais nous n’appuyons guère l’attitude de certains de nos confrères», en référence à ce déballage médiatique sans fondement d’ailleurs. Et la presse espagnole en remet toujours une couche.
Dans un article, El Pais soulève ce problème, sous les habits d’une fausse question : Le conflit maroco-espagnol va-t-il affecter le retour des saisonnières marocaines ? «La journaliste m’a contacté et m’a posé directement cette question. Je l’ai redirigée vers la sous-délégation du gouvernement à Huelva, seule autorité en mesure de donner des réponses à cette question car c’est l’administration chargée de superviser ce dossier», ajoute notre interlocuteur.
Du côté du Maroc, une source consulaire qui suit de près ce dossier rappelle que les autorités marocaines ont toujours respecté leurs engagements. Le rapatriement est un long processus qui se réalise sur une période échelonnée, car les contrats n’arrivent pas à terme le même jour.
De son côté, le puissant lobby agricole espagnol, COAG, commence à rallier les opérateurs agricoles européens à sa cause. Ceux-ci ont lancé un appel à l’adresse de la Commission Européenne afin de «paralyser» l’accord agricole. C’est de la sorte que des producteurs de l’Italie, la France et le Portugal ont voulu prêter main forte à leurs confrères espagnols et se sont joints à cette campagne menée par la filière agricole espagnole pour nuire aux expéditions agricoles marocaines.
Ainsi ont-ils repris à leur compte les contrevérités de l’influent puissant agricole espagnol autour du non-respect par le Maroc des quotas stipulés dans le protocole agricole et ses conséquences sur la chute des cours. Surfant cette vague, le parti d’extrême droite Vox a saisi au vol cette polémique. Ses dirigeants régionaux se sont même rendus sur place pour «apporter leur soutien» aux producteurs espagnols et réclamer la révocation de ce traité.
Amal Baba Ali, DNC à Séville / Les Inspirations Éco