Maroc

Made in Morocco. Comment protéger la marque « Maroc » ?

Le Made in Morocco fait aujourd’hui face à plusieurs défis qui pourraient conditionner sa réussite. Sa protection juridique constitue un enjeu majeur pour les acteurs économiques, qui doivent prendre conscience de son importance.

La protection se réalise essentiellement par le biais de Conventions internationales ratifiées par le Maroc, ainsi que par le biais de la Loi n° 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle, de la Loi n° 2-00 relative aux droits d’auteur et droits voisins et de la Loi n° 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence. Ce cadre législatif prévoit la protection des produits inventifs par le biais de brevets d’invention et de droits d’auteurs, ainsi que la protection de produits qui ne constituent pas une invention, au sens de la loi, à travers la protection des marques ainsi que des dessins et modèles industriels. Sur le plan international, le Maroc a ratifié de nombreuses conventions et de nombreux traités permettant la protection du Made in Morocco.

Ainsi, le Maroc est membre de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, qui a pour objet de promouvoir la protection de la propriété intellectuelle dans le monde entier, et d’assurer la coopération administrative entre les unions de propriété intellectuelle créées par les Conventions de Paris et de Berne. Justement, le Maroc est membre des Conventions de Paris pour la protection de la propriété industrielle et de Berne pour la protection de la propriété littéraire et artistique. Le Maroc a également ratifié un certain nombre d’instruments internationaux permettant de protéger juridiquement le Made in Morocco sur le plan international, et qui sont spécifiques au type de propriété industrielle envisagé. Ces instruments seront abordés au niveau de leurs parties correspondantes.

La protection des inventions
La protection de l’invention, à travers un cadre juridique d’application nationale, se justifie par l’investissement important qui est consenti pour la réalisation des inventions, mais aussi par leur importance dans le développement économique et dans l’évolution de la société de manière générale, dans la mesure où ces inventions ont pour objectif non seulement de satisfaire un intérêt privé, mais de satisfaire également l’intérêt général. La protection de l’invention au Maroc prend principalement la forme d’un brevet, qui est un titre délivré par l’OMPIC sur demande de l’inventeur qui remplit les conditions légales, qui confère à son titulaire un monopole d’exploitation de l’invention pour une durée de 20 ans. Ainsi, le bénéfice d’un brevet d’invention confère à son titulaire un véritable droit de propriété limité dans le temps. Les droits attachés à un brevet d’invention prennent effet à compter de la date du dépôt de la demande de brevet et confèrent à leur titulaire ou à ses ayants droit un droit exclusif, un monopole d’exploitation de son invention. La loi met à la disposition du titulaire du brevet d’invention les recours en contrefaçon et en concurrence déloyale, pour lui permettre de se protéger contre les atteintes à ses droits découlant du brevet.

L’action en contrefaçon permet au titulaire du brevet d’obtenir par voie judiciaire la sanction de l’exploitation de son invention sans son autorisation. Le demandeur à l’action doit justifier d’un brevet sur l’invention exploitée sans autorisation, et que le brevet soit en cours de validité conformément à la législation en vigueur. La validité est prouvée par l’inscription figurant au registre national des brevets. Pour que l’acte soit qualifié de contrefaçon, il faut qu’il soit fait sans l’autorisation du titulaire du brevet. À cet effet, la Loi n° 17-97 dresse une liste d’actes constituant contrefaçon. Nous pouvons citer à titre d’exemple, la fabrication et/ou la commercialisation du produit objet du brevet, ainsi que l’offre, l’utilisation, l’importation ou la détention du produit objet du brevet aux fins de commercialisation. Il est à noter que toute modification de l’invention objet du brevet par le biais de la suppression ou de l’addition est sans effet sur la qualification de contrefaçon, si ladite modification est mineure. De même, le demandeur doit prouver l’intention du défendeur de porter atteinte à ses droits découlant du brevet. Le défendeur doit ainsi avoir agi en connaissance de cause. Toutefois, le fabricant et l’importateur d’un produit objet d’un brevet sont présumés avoir connaissance de la contrefaçon. La preuve de la contrefaçon est libre. Ainsi, tous les moyens de preuve sont admis pour démontrer la contrefaçon.

Le titulaire d’un brevet d’invention victime de contrefaçon peut également porter plainte auprès du Procureur du Roi et se porter partie civile. Le Procureur du Roi ne peut déclencher les poursuites contre l’accusé que sur sa plainte. Le délai de prescription de l’action civile et pénale en contrefaçon est de 3 ans à compter des faits qui en sont la cause. Le contrefacteur encourt une peine d’emprisonnement de 2 à 6 mois et/ou une amende de 50.000,00 à 500.000,00 dirhams. En se basant sur la Loi n° 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence, la «victime» d’actes de concurrence déloyale pouvant porter préjudice à son produit «Made in Morocco» peut mettre un terme aux actes déloyaux. L’action en concurrence déloyale vise également à obtenir un dédommagement du préjudice subi, le cas échéant, dont la réparation relève du pouvoir d’appréciation du Tribunal. L’action en concurrence déloyale peut être intentée contre un concurrent du demandeur ou un tiers ayant des agissements parasitaires au détriment du demandeur, dans l’objectif de tirer profit de ses efforts. Le demandeur doit prouver la faute, le préjudice et le lien de causalité. La prescription de l’action en concurrence déloyale est de 5 ans à partir du moment où le demandeur a eu connaissance du dommage et de celui qui est tenu d’en répondre. Elle se prescrit dans tous les cas par 20 ans à partir du moment où le dommage a eu lieu. Au niveau international, l’adhésion du Maroc au Traité de coopération en matière de brevets accorde une protection importante aux inventions brevetées au Maroc, dans la mesure où ce Traité permet de demander la protection d’un brevet pour une invention, simultanément dans un grand nombre de pays en déposant une demande «internationale» de brevet. Une telle demande peut être déposée auprès de l’office national des brevets de l’État contractant dont le déposant a la nationalité ou dans lequel il est domicilié ou auprès l’OMPI.

La protection des marques
La protection de la marque constitue un enjeu majeur de la protection plus générale du Made in Morocco. C’est ainsi que la Loi n° 17-97 constitue également le cadre législatif qui protège l’atteinte aux marques de fabrique, de commerce ou de service, définies comme un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale. L’enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque pour les produits ou services qu’il a désignés, et lui offre une protection contre toutes les manipulations qu’il n’a pas autorisées. La protection de la marque constitue un enjeu majeur pour les acteurs économiques, dans la mesure où elle permet l’individualisation et l’identification des produits de la marque, aux yeux des clients du titulaire. Elle permet également la protection des investissements consentis par le titulaire pour la création d’une identité propre et en termes de publicité et de marketing. Le titulaire d’une marque dispose d’un recours en contrefaçon contre toute manipulation non autorisée de celle-ci. À titre d’exemple, constitue un acte de contrefaçon, les actes de reproduction et d’imitation de la marque. L’action en contrefaçon permet au titulaire de la marque d’obtenir par voie judiciaire la sanction civile et/ou pénale de l’exploitation de sa marque sans son autorisation. Les actions en contrefaçon peuvent être de nature civile et pénale. Les actions civiles et les actions pénales relatives à la contrefaçon se prescrivent par trois ans à compter des faits qui en sont la cause. Il est à signaler que l’introduction de l’action civile suspend la prescription de l’action pénale. Dans le cadre de l’action civile, les règles applicables à l’action en contrefaçon d’une invention sont applicables en la matière. Dans le cadre de l’action pénale, les contrefacteurs de marques sont passibles d’un emprisonnement de 2 à 6 mois et/ou d’une amende de 50 000 à 500 000 dirhams. De même, le titulaire d’une marque dispose de la possibilité de recourir à l’action en concurrence déloyale dans les formes et conditions applicables au titulaire du brevet d’invention, telles qu’exposées ci-dessus. Sur le plan international, le Maroc est membre du Système de Madrid, qui constitue l’instrument permettant la protection du Made in Morocco des marques marocaines à l’international et qui permet de protéger une marque dans un grand nombre de pays grâce à l’obtention d’un enregistrement international, dont les effets s’étendent à chaque partie contractante désignée.

La protection des dessins et des modèles industriels
La Loi n° 17-97 permet également la protection des dessins et des modèles industriels. Cette protection est très importante dans le cadre du développement du Made in Morocco, dans la mesure où elle protège les efforts financiers et humains déployés par les entreprises marocaines, et permet de les valoriser. Le titulaire d’un dessin ou modèle industriel enregistré bénéficie d’un droit d’exclusivité d’exploitation de son bien, pendant une durée de 15 ans à compter de la date du dépôt initial. Pour bénéficier de l’enregistrement, le dessin ou modèle industriel doit se différencier de ses similaires soit par une configuration distincte et reconnaissable lui conférant un caractère de nouveauté, soit par un ou plusieurs effets extérieurs lui donnant une physionomie propre et nouvelle. La législation permet au titulaire d’un dessin ou d’un modèle industrielle de se protéger contre toute atteinte à ses droits qui en découlent par le biais d’une action en contrefaçon. A titre d’exemple, l’action en contrefaçon peut être exercée contre les auteurs de reproduction d’un dessin ou modèle industriel en vue de son exploitation. L’action en contrefaçon permet au titulaire du dessin ou du modèle industriel d’obtenir par voie judiciaire la sanction civile et/ou pénale de l’exploitation de son dessin ou modèle sans son autorisation. Les actions civiles et pénales relative à la contrefaçon se prescrivent par trois ans à compter des faits de contrefaçon, alors que l’introduction de l’action civile suspend la prescription de l’action pénale.
Du point de vue de l’action civile, les règles susvisées applicables à l’action en contrefaçon d’une invention sont applicables en la matière. Du point de vue de l’action pénale, toute atteinte portée sciemment aux droits du propriétaire d’un dessin ou modèle industriel est punie d’une amende de 25 000 à 250 000 dirhams. Il est à noter que, comme pour le titulaire d’une marque, le titulaire d’un dessin ou d’un modèle industriel peut intenter une action en concurrence déloyale, pour utilisation non autorisée de son dessin ou sa marque, dans les formes et conditions susvisées.

Le Made in Morocco a également à sa disposition le Système de la Haye, qui est un instrument ratifié par le Maroc, et qui permet aux déposants d’obtenir la protection de leurs dessins et modèles industriels dans plusieurs pays ou régions moyennant un minimum de formalités.

La protection des indications géographiques et des appellations d’origine
Enfin, la Loi n° 17-97 prévoit un cadre spécifique aux indications géographiques et aux appellations d’origine permettant de protéger la «Marque Maroc» au sens économique. L’indication géographique est définie légalement comme «toute indication qui sert à identifier un produit comme étant originaire d’un territoire, d’une région ou d’une localité de ce territoire, dans les cas où une qualité, réputation ou autre caractéristique déterminée du produit peut être attribuée essentiellement à cette origine géographique». L’appellation d’origine est pour sa part définie comme «la dénomination géographique d’un pays, d’une région ou d’une localité servant à désigner un produit qui en est originaire et dont la qualité, la réputation ou autres caractéristiques déterminées sont dues exclusivement ou essentiellement au milieu géographique, comprenant des facteurs naturels et des facteurs humains». L’indication géographique et l’appellation d’origine permettent de mettre en évidence le lieu de production, notamment lorsqu’il constitue une garantie des qualités ou caractéristiques du produit qui en est originaire. L’indication géographique et l’appellation d’origine constituent ainsi un outil de marketing à l’international. C’est notamment le cas au Maroc pour l’huile d’argan. Pour bénéficier de cette protection, une demande d’inscription au registre national des indications géographiques et des appellations d’origine doit être déposée auprès de l’OMPIC. La législation en vigueur prohibe l’utilisation frauduleuse des indications géographiques et des appellations d’origine, notamment l’utilisation directe ou indirecte d’une indication géographique ou d’une appellation d’origine fausse ou fallacieuse. Pour la protection des indications géographiques et des appellations d’origine, la législation permet au Parquet d’introduire l’action publique contre toute utilisation frauduleuse. Une action civile est également possible et peut être intentée par toute partie lésée. De même, toute personne lésée du fait d’une utilisation frauduleuse des indications géographiques et des appellations d’origine dispose de la possibilité de recourir à l’action en concurrence déloyale.
En définitive, le législateur marocain offre au Made in Morocco et aux acteurs économiques un ensemble de possibilités adaptées aux besoins de chaque acteur souhaitant protéger juridiquement son entreprise, au niveau national et international ce qui traduit la volonté des pouvoirs publics, et qui ne date pas d’aujourd’hui, de mettre en place un cadre incitatif à l’investissement et protecteur des intérêts des investisseurs. Les entreprises devraient accompagner cette mouvance dans le cadre du développement du Made in Morocco, dans l’objectif ultime de protéger leurs investissements et leurs efforts contre toute contrefaçon ou concurrence déloyale.

S.R.



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