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Les défis de la diversité linguistique (VIDEO)

L’avènement du numérique a redéfini les contours de l’éducation, insufflant une nouvelle dynamique à l’apprentissage. Au cœur de cette révolution, de multiples initiatives et solutions émergent pour façonner un paysage éducatif plus inclusif. Cependant, au sein de ce foisonnement d’idées et d’innovations, une question cruciale interpelle : outre l’arabe, quelle langue serait la plus pertinente à privilégier dans ce contexte émergent ?

Dans le contexte croissant de l’intégration des solutions numériques dans le domaine éducatif, se pose inévitablement la question du défi linguistique. En plus de l’arabe, il devient essentiel de réfléchir à la langue à privilégier dans ce contexte émergent. Pour Salma Karim, chef du département Capital humain et Innovation – Agence de développement du digital (ADD), «que ce soit dans la recherche scientifique, les technologies émergentes ou l’art, l’anglais demeure la langue dominante. Ainsi, pour former des experts en ingénierie ou des profils à forte valeur ajoutée, il est nécessaire de se référer aux pays anglophones, leaders en technologie. Cela s’avère d’autant plus crucial dans un contexte de transformation économique, sociale et digitale au Maroc». Selon l’intervenante, il existe deux problématiques à résoudre. D’une part, celle du citoyen, nécessitant la promotion de la culture digitale en langue locale (darija, amazigh) pour favoriser le transfert de compétences.
D’autre part, dans le contexte des écoles d’ingénieurs, on observe une prévalence de l’anglais chez les jeunes Marocains, habitués à naviguer en ligne et à chercher des solutions dans cette langue. «Bien que le français soit adopté au Maroc comme langue d’apprentissage dans l’enseignement supérieur, notamment en médecine, management et ingénierie, la réalité évolue. De plus en plus, les professeurs partagent des documents et mènent des recherches scientifiques en anglais. Les thèses, autrefois soutenues en français, suivent désormais cette tendance, reflétant ainsi le virage vers l’anglais dans l’enseignement supérieur marocain, aligné sur l’évolution de la technologie et de la production scientifique», fait-elle remarquer.
De son côté, Kenza Bouziri, directrice Communication Corporate & RSE – inwi, estime que l’adaptation à la cible s’est révélée être un élément essentiel, en faisant référence au programme instauré par inwi de codage dans les écoles rurales. «L’aspect crucial était de transmettre le message, et bien que le contenu technique utilise des termes en anglais, la formation des enseignants a été réalisée en darija», souligne-t-elle.

Diversité linguistique, une richesse à cultiver
Au sein du ministère de l’Éducation nationale, l’accent est mis sur les deux langues officielles, l’arabe et l’amazigh. «Il est important de souligner notre engagement dans la mise en place de plateformes d’enseignement, d’apprentissage et de formation destinées aux enseignants, couvrant les quatre langues, notamment le français et l’anglais. Nous reconnaissons également la diversité linguistique de la jeunesse marocaine, qui parle souvent darija plutôt que l’arabe classique. Nous travaillons à renforcer les bases de l’arabe classique au fil des années. Bien que l’apprentissage de l’anglais puisse sembler plus accessible avec l’abondance d’offres en ligne, notre priorité est de favoriser une maîtrise linguistique permettant une communication fluide et la capacité de passer d’une langue à une autre», indique Ilham Laaziz, directrice du programme GENIE au sein du ministère de l’Éducation nationale,.
Pour Lamia Outgenza, directrice générale d’International Education Group (IEG), aujourd’hui, il est possible de rendre l’apprentissage de la langue arabe ludique grâce aux possibilités offertes par le numérique, bien que ces ressources soient encore rares dans certains pays arabes. «En formant les enseignants d’arabe à tirer parti du numérique, nous pouvons rendre cette langue vivante et captivante. Des jeux éducatifs en langue arabe ont été créés pour placer cette langue au même niveau que les langues étrangères, offrant ainsi une approche ludique. La formation de ces enseignants vise à transformer l’enseignement en une expérience enrichissante et interactive», ajoute-t-elle. Elle souligne également que la maîtrise des langues, avec pour objectif l’ouverture au monde, permet la communication interculturelle. Bien que l’anglais demeure une langue internationale incontournable pour communiquer à l’échelle mondiale, le Maroc a la chance d’être bilingue, voire trilingue ou quadrilingue. Selon Lamia Outgenza, cette diversité linguistique est une richesse à cultiver, offrant la possibilité de communiquer et de comprendre différentes cultures.
Un besoin croissant de digitalisation
Abordant le besoin de la digitalisation, Othman Harrak, general manager ALX Morocco, co-fondateur de Pip Pip Yalah et de Popcard, révèle que dans le monde, certains pays, tels que la Chine, produisent environ 8 millions de développeurs chaque année. Elle est suivie de l’Inde (près de 6 millions) et des États-Unis (environ 5 millions). «En revanche, l’Afrique, avec toutes ses nations, ne produit que 700.000 développeurs annuellement. Cet écart dans l’absorption de la vague technologique, malgré un besoin croissant de digitalisation, est un constat qui suscite des réflexions», fait-il remarquer.
Cependant, il relève une note optimiste, qui réside dans la démographie africaine. «Contrairement à l’Europe, où la moyenne d’âge est de 49 ans, l’Afrique affiche un âge moyen de 19 ans. Cette jeunesse démontre un intérêt significatif pour la digitalisation et l’apprentissage des métiers de la technologie». Un exemple concret est ALX au Maroc, qui s’ajoute aux programmes de formation existants. Lors de son lancement, 50.000 Marocains se sont manifestés pour apprendre des métiers de la tech tels que le développement web, la data science, le CRM comme Salesforce, et le cloud. Cependant, malgré cette forte demande, seuls 5.000 candidats ont été acceptés, en raison de critères stricts, dont la maîtrise de la langue anglaise. Ce constat met en lumière le niveau impressionnant d’anglais de la jeunesse acceptée dans ces programmes, soulignant une compétence linguistique essentielle pour les métiers
de la tech.

 

Kenza Aziouzi / Les Inspirations ÉCO


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