Inspection du travail : cherche renfort désespérément!
Malgré les efforts récemment consentis, la situation du système d’inspection du travail demeure préoccupante en raison de l’insuffisance des ressources humaines. Les chiffres officiels du ministère du Travail et de l’Insertion professionnelle font froid dans le dos: le nombre des inspecteurs de travail ne dépasse pas 591 y compris les postes de 2021 et celui des médecins de travail est de 17 uniquement.
C’est une patate chaude que les gouvernements successifs de sont refilés de mandat en mandat. Les moyens humains et matériels de l’Inspection du travail demeurent on ne peut plus limités par rapport aux besoins, ne lui permettant pas d’accomplir pleinement ses missions malgré les efforts consentis au cours des dernières années.
Le système pâtit, en effet, de nombre de contraintes qui impactent de plein fouet le dispositif de contrôle de l’application des dispositions législatives relatives au marché du travail, de l’aveu même du département de tutelle. Il s’agit, en premier lieu, de la régression notable du nombre des inspecteurs de travail suite à des départs à la retraite et aux vagues de départ volontaire. Et la situation risque de se compliquer davantage dans les années à venir, car une partie d’entre eux atteindront bientôt l’âge de la retraite alors que le nombre de ces professionnels restent très insuffisants. Les chiffres sont très inquiétants et révèlent l’ampleur de la crise : le département de tutelle ne dispose que de 591 inspecteurs de travail et de 17 médecins de travail.
Ce chiffre, qui comprend les postes budgétaires créés au titre de 2020 et 2021, ne permet pas de couvrir le nombre de plus en plus croissant des entreprises créées en raison de l’élargissement du tissu économique national et de l’émergence de nouveaux modes de relations de travail. Les efforts déployés, jusque-là, pour combler le déficit restent en deçà des aspirations malgré l’évolution relative enregistrée en matière de création de postes budgétaires au cours des dernières années. Il faut dire que les postes sont attribués chaque année au compte-goutte. Relevons à cet égard que quelque 10 inspecteurs de travail ont été recrutés en 2018 et 22 en 2019. En 2020-2021, rappelons-le, un concours a été organisé pour embaucher 82 inspecteurs de travail et quatre médecins de travail. A cela s’ajoute la création de 100 postes budgétaires pour la régularisation de la situation des fonctionnaires recrutés, via un concours, en tant qu’inspecteurs de travail. « Un exploit par rapport aux années précédentes mais on est encore loin du bout du tunnel », selon une source interne au ministère de tutelle. Les mesures prises permettront de renforcer les ressources humaines du corps de l’inspection de travail de l’ordre de 68 %, mais il parait clairement que leur impact ne permettra pas de redresser la barre de manière significative.
En vue de diminuer de l’ampleur de l’insuffisance des ressources humaines, quelques actions ont été entreprises pour améliorer la gouvernance du secteur et optimiser l’efficacité de l’intervention de l’inspection du travail en matière de contrôle. On peut citer notamment la mise en place d’un système d’information intégré visant à faciliter les interventions des inspecteurs de travail et à éviter le chevauchement des tâches. On tend à ce que la nouvelle approche permette de couvrir l’ensemble des activités de toutes les catégories des agents de l’organe d’inspection et à les libérer du travail de bureau et des tâches routinières afin qu’ils se consacrent totalement à leur mission de contrôle.
Le prochain gouvernement est appelé à passer à la vitesse supérieure en matière de renforcement du système d’inspection de travail à qui incombe de lourdes missions en tant qu’un mécanisme important en matière de garantie des droits des travailleurs et d’amélioration des conditions de travail. Un solide système d’inspection du travail est en effet un préalable pour non seulement la stabilité des relations professionnelles et le maintien de la paix sociale au sein des entreprises mais aussi pour l’amélioration du climat des affaires. Les partenaires sociaux pointent souvent du doigt la faiblesse du nombre des inspecteurs de travail. Cette situation qui dure depuis de longues années ne permet de pas de protéger les droits des travailleurs et les libertés syndicales. Aujourd’hui plus que jamais, la consolidation de l’organe de l’inspection du travail s’impose pour renforcer la gestion des relations professionnelles particulièrement en matière de résolution des conflits individuels et collectifs de travail. S’agissant du secteur informel, les spécialistes plaident pour la nécessité de renforcer les capacités de contrôle des agents chargés de l’inspection du travail comme l’un des dispositifs essentiels pour faire basculer ce secteur dans l’économie formelle.
Jihane Gattioui / Les Inspirations Éco