Maroc

Impôts : les datascientists, nouvelle unité d’élite du fisc

L’administration fiscale est sans doute l’une des plus en pointe en matière de digitalisation dans le secteur public. La quasi-totalité des déclarations et plus de 91% du paiement d’impôts s’effectuent désormais en ligne. Mais c’est sur le ciblage et le rendement du contrôle fiscal que l’exploitation de la data est le plus structurant. Au cœur de cette transformation, l’unité d’élite des datascientists de la DGI. 

Qu’il est loin le temps où il fallait camper devant l’immeuble des «Impôts» pour déposer la liasse de déclarations fiscales dans les délais. A Casablanca, par exemple, le spectacle aux abords du fameux complexe situé jadis à Mers-Sultan valait le détour. Les professionnels des chiffres devaient mobiliser une armée de coursiers afin d’éviter des pénalités de retard à leurs clients. Par rapport à aujourd’hui, cette époque relève presque du Moyen-âge technologique.

«L’essentiel des transactions fiscales s’effectue en ligne ; ne se déplacent, en principe, que les contribuables qui auraient besoin de réponses personnalisées ou pour des questions d’une certaine complexité», analyse Younes Idrissi Kaitouni, directeur général des Impôts (DGI).

Depuis un ordinateur, les déclarations d’impôt peuvent être transmises à l’administration fiscale, les équipes de la DGI s’évertuant surtout à assurer la disponibilité du système. En 2024, près de 5 millions de déclarations ont été déposées par voie électronique, et environ 4,5 millions d’attestations ont été retirées en ligne.

Au total, le nombre d’opérations en ligne s’est établi à plus de 24 millions, en hausse de 8% par rapport à 2023. La palette des services va de la déclaration, le paiement d’impôts, la consultation des déclarations, les versements, les remboursements de taxes… aux restes à payer.

Au confort que cela apporte au contribuable, il faut ajouter les gains de productivité et l’incidence sur l’efficacité du contrôle fiscal. Avant la dématérialisation, il fallait saisir la totalité des liasses reçues des contribuables, une tâche fastidieuse et chronophage, observe le management de la DGI. La digitalisation a permis au fisc de constituer une immense base de données grâce à laquelle il a décuplé sa capacité de tracer la fraude.

Grâce aux partenariats avec d’autres entités publiques, la DGI produit des analyses à partir des rapprochements et des croisements de données provenant de diverses sources, dont la Conservation foncière et la Douane.

«Dorénavant, sur la base de données pertinentes, d’indicateurs plus fins et d’un système d’analyse-risque, le fisc est en mesure d’appréhender des catégories de contribuables autrefois hors de portée de ses dispositifs», confirme le directeur général des Impôts.

La recherche de la conformité fiscale volontaire des contribuables est tout en haut des priorités du plan stratégique 2024-2028 de la DGI.

Des analyses IA alimentent la programmation du contrôle
Un contingent des datascientists est dédié à l’exploitation en masse de données, permettant d’affiner la programmation du contrôle et de relancer des contribuables défaillants. Les analyses prédictives qu’ils produisent complètent le dispositif de la lutte contre la fraude ou de détection des signaux faibles d’entreprises en difficulté. Ces avancées qui placent le fisc en tant qu’administration de référence ne doivent pas occulter ce qui reste à parfaire.

En effet, la numérisation n’est pas une fin en soi. Elle a un bénéfice certain pour les clients et les partenaires de la Direction générale des impôts. Elle permet de générer des gains de productivité, d’optimiser les ressources, d’accroître la recette fiscale, mais ne présume en rien la profondeur des réformes encore nécessaires.

Malgré les résultats engrangés tant sur le contrôle que sur la relation avec le contribuable, pour la DGI, il n’est pas question de s’endormir sur ses lauriers. Son management promet l’accélération de la transformation numérique et une redéfinition des modes opérationnels de l’administration afin de tirer le meilleur parti des bénéfices et des opportunités offertes par la digitalisation. Ce qui est certain, c’est que les métiers traditionnels du fisc sont en pleine mutation.

«Notre capacité d’adaptation et notre agilité dépendront de la qualité de notre data et de nos ressources humaines», analyse Younes Idrissi Kaitouni.

La modernisation du contrôle s’articule principalement autour de l’amélioration continue du système d’information, l’actualisation de la matrice des risques et l’exploitation performante de la data, rappelle le patron du fisc. Les spécialistes de l’analyse des données apparaissent ainsi comme la nouvelle élite au sein de la DGI.

Les prochains chantiers portent sur la facturation électronique en vue de la sécurisation, de la transparence et de la traçabilité des transactions, sur la fiscalisation des services numériques transfrontaliers (les fameux GAFAM), ainsi que la notification électronique qui viendra compléter le dispositif actuel d’échange et de communication physiques avec les contribuables.

Au carrefour de plusieurs secteurs, la base de données de l’administration fiscale est mise à contribution pour la mise en œuvre de la généralisation de la couverture médicale, du programme d’aide directe au logement ou encore la dématérialisation des formalités de création des entreprises.

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO



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