Maroc

Impôt sur le revenu : les professions libérales rattrapées par la patrouille

Les résultats de la retenue à la source sur les rémunérations versées aux tiers sont allés bien au-delà des attentes de l’administration fiscale. Les recettes générées par la retenue à la source de l’impôt sur les honoraires des professions libérales ont bondi de 85,4% en 2024, tandis que les contributions aux recettes du top-ten de ces praticiens ont explosé de 89% en un an !

La croissance spectaculaire des contributions de l’IR sur les honoraires versés aux tiers en 2024 est la preuve irréfutable de l’efficacité de la retenue à la source, la RAS comme disent les praticiens. C’est l’analyse qui est faite aujourd’hui, à juste titre, au quartier général de la DGI. Des topographes aux médecins, les professions libérales, dont une partie d’honoraires échappait jadis à l’IR, ont été rattrapées par la patrouille.

En 2024, première année de mise en œuvre de la retenue à la source, les recettes de l’IR sur ces rémunérations ont bondi de 85,4%, à 711,2 millions DH contre 383,6 millions l’année précédente. Plus globalement, le top 10 des contribuables, exerçant en profession libérale, ont vu leur contribution fiscale augmenter de 89% en un an, révèle la DGI.

Il est clair que le fisc a trouvé un puissant antidote contre l’évitement à l’impôt que pratiquaient massivement ces praticiens. Ce qui est certain, c’est que la retenue à la source a bousculé des habitudes installées, en particulier dans les cliniques privées où des chirurgiens exigeaient qu’une partie de leurs honoraires leur soient réglés en liquide et donc, au black.

Le boom de rentrées fiscales enregistré l’année dernière (+16,1%) tient en partie à la retenue à la source de la TVA collectée. La TVA a joué un rôle clé dans cette dynamique avec une hausse de 20,9 % de ses recettes spontanées, soit un accroissement de 10,63 milliards DH, en intégrant les recettes du contrôle.

Ce mécanisme, qui a surpris les opérateurs économiques, a permis de s’attaquer à une pratique qui consistait à assimiler la TVA réglée par le client à de la trésorerie. Bien souvent, le Trésor n’y voyait que du feu, mais avec les outils d’intelligence qui permettent des milliers de recoupements, il devient très risqué de «manger» la TVA collectée.

La retenue à la source a marqué un changement de paradigme en matière de lutte contre l’évasion fiscale, assure la DGI. La part de l’IR professionnel dans l’impôt sur le revenu global a connu une hausse entre 2019 et 2024, passant de 3,8% à 4,6%. Cette évolution a concerné l’ensemble des professions libérales.

Par ailleurs, les mesures introduites dans le cadre de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, notamment la lutte contre le phénomène des fausses factures qui sévit dans notre économie, ont permis de promouvoir la conformité fiscale volontaire pour toutes les catégories de contribuables : clients, fournisseurs, propriétaires de biens loués, professionnels libéraux et autres.

TVA : L’année 2026 sera celle de la rupture
L’extension du champ d’application, la réduction du nombre de taux et la généralisation du droit au remboursement de la TVA sont au cœur de la réforme de cet impôt à court terme. L’objectif est d’en assurer enfin la neutralité sur un chronogramme de trois ans, la prochaine Loi de finances, celle de 2026, étant censée être celle de la rupture, sous réserve que les conditions politiques et les marges budgétaires le permettent.

Les pouvoirs publics vont donc entrer dans le dur l’année prochaine car il va falloir s’attaquer à une pathologie congénitale de la TVA en intégrant des produits de base de large consommation dans son périmètre et en supprimant les distorsions de taux qui alimentent constamment le butoir.

Ces crédits structurels de la TVA sont un cauchemar pour les entreprises qui achètent leurs intrants et services avec TVA, mais ne peuvent pas la collecter sur les ventes aux secteurs hors champ.

L’application de la TVA aux prestations de services à distance, fournies par les géants du web, et les entités non-résidentes est le troisième pilier de la réforme de la TVA.

Combien rapporte la CPU

Depuis le 1er janvier 2021, les dispositions du Code général des impôts, relatives au régime du bénéfice forfaitaire, ont été abrogées et remplacées par l’instauration du régime de la Contribution professionnelle unique (CPU), dans l’objectif de simplifier le régime fiscal applicable aux personnes physiques exerçant des activités à revenu modeste et de faire bénéficier ces derniers d’une assurance maladie obligatoire.

A date, l’effectif total des contribuables déclarants de la CPU s’élève à 312.197. Le chiffre d’affaires total déclaré est de 26,159 milliards de dirhams. Les recettes de la CPU s’élèvent à 631 millions de dirhams, dont 241 millions de dirhams au titre de l’impôt sur le revenu. Ce montant était trois fois plus important en 2020, dernière année où l’impôt était calculé avec les règles relatives au régime forfaitaire.

L’«amnistie» de la dernière chance

Tout est dans la sémantique. A l’administration fiscale, on qualifie la dernière opération de l’amnistie du cash non déclaré, de «régularisation volontaire de la situation fiscale des contribuables, personnes physiques, de manière spontanée».

Cette mesure déjà initiée en 2020, a été rééditée en 2024, parallèlement aux autres mesures d’intégration du secteur informel et de lutte contre la fraude, selon la DGI. Le bilan de cette opération dénote sans doute d’un succès indéniable.

Le montant des avoirs et des dépenses déclarés ayant fait l’objet de paiement de la contribution s’élève à 128 milliards de dirhams, ce qui a généré 6,4 milliards de dirhams de recettes. Les montants recouvrés s’élèvent respectivement à 3,8 milliards de dirhams au titre de 2025 et 2,6 milliards de dirhams au titre de 2024, ce qui représente 1,1 % des recettes globales. Mais au-delà de l’aspect financier, cette réussite renvoie l’enseignement suivant : l’engouement a été au rendez-vous, du fait de la transparence de l’administration et du respect de la promesse sur l’anonymat de personnes qui ont souscrit à l’opération.

Cette opération ponctuelle de 12 mois – qui n’est pas une amnistie – ne s’installe pas dans la durée. Elle a marqué une ultime occasion offerte aux contribuables pour régulariser leur situation avec les garanties, et ouvrir une nouvelle page de conformité sereine et de confiance avec l’administration fiscale.

Au QG du fisc, à Rabat, on considère que cette opération relève d’une phase transitoire à la veille de la réforme de l’impôt sur le revenu introduit par la Loi de finances 2025. Elle préfigure un renforcement de mesures adoptées pour la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, notamment le dispositif d’examen de l’ensemble de la situation fiscale des personnes physiques.

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO



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