Maroc

Droit de grève : les syndicats optent pour la méthode forte

La quasi-totalité des centrales syndicales les plus représentatives appellent à une grève générale nationale à partir d’aujourd’hui. C’est une réaction à l’adoption presque définitive du projet de loi organique sur le droit de grève au Parlement. Ce premier acte annonce une année sociale sous tension.

C’est un mercredi 5 février 2025 exceptionnel que le Maroc s’apprête à vivre. Les centrales syndicales les plus représentatives du pays appellent à une grève générale ce jour là. L’Union marocaine du Travail (UMT), quant à elle, est encore plus radicale, demandant à ses affiliés de prolonger cette grève le jour suivant. C’est un consensus rare et auquel on n’était plus habitué depuis un certain nombre d’années.

Il reste à savoir si la mobilisation sera au rendez-vous et si le mot d’ordre sera suffisamment suivi dans les secteurs public et privé. Vous l’aurez compris, c’est un ensemble de motifs qui poussent les syndicats à opter pour la méthode forte. Et la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, c’est bien évidemment la quasi-adoption définitive du projet de loi organique sur le droit de grève.

En effet, la Chambre des conseillers, malgré les 218 amendements proposés, a suivi la Chambre des représentants, en votant en faveur de ce texte très controversé, que les syndicats considèrent comme un recul et une atteinte à un droit constitutionnel.

Année sociale sous tension
Quant au gouvernement, il n’entend vraisemblablement pas non plus reculer, puisqu’à l’heure où nous mettions sous presse, la Commission des secteurs sociaux était en réunion à la Chambre des représentants, pour l’examen, en deuxième lecture, de ce projet de loi organique, tel que transmis par la Chambre des conseillers.

En un mot, le processus législatif suit son cours et tout porte à croire que la formalité d’une adoption sans gros obstacles en plénière sera respectée au niveau de la première Chambre. Quoiqu’il en soit, pour le gouvernement, ce climat en dit long sur la météo de l’année sociale qui s’annonce. Après l’accord conclu avec les partenaires sociaux en avril 2024, et alors que tout semblait sous contrôle, voilà que les syndicats trouvent l’occasion de rappeler au gouvernement qu’il y a encore de nombreuses tensions sur le plan social.

D’ailleurs, à la fronde contre ce projet de loi sur la grève, s’ajoutent les revendications liées à la cherté de la vie et à la baisse du pouvoir d’achat. Il faut dire, qu’au regard du processus suivi dans l’adoption de ce projet de loi, l’Exécutif peut facilement être accusé d’être trop vite allé en besogne, car ne s’étant vraiment mis à l’écoute des objections des syndicats qu’après le tollé suscité par l’adoption de ce projet à la Chambre basse du Parlement le 24 décembre dernier.

Dialogue social rompu ?
C’est à se demander si le dialogue social n’est pas temporairement rompu entre les différents acteurs. En plus de sa démarche en solo, le gouvernement est accusé de faire le jeu du patronat, selon les syndicats. Et pourtant, tous ont l’habitude de se réunir régulièrement, en perspectives d’un 1er mai apaisé. La tension retombera-t-elle d’ici là ? Rien n’est moins sûr, surtout que dans certains secteurs, notamment ceux de l’éducation et de la santé, on continue encore de «grogner», appelant au respect et à l’application des accords signés avec les précédents ministres, probablement emportés par l’instabilité et les tensions sociales dans leurs départements respectifs.

Younes Sekkouri
Ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences

«Ce projet reflète les aspirations du pays en garantissant un cadre légal protecteur pour les travailleurs, les employeurs et la société. Il s’aligne pleinement sur la définition du droit de grève établie par l’Organisation
internationale du travail. La majorité des amendements proposés par les syndicats ont été adoptés, et cela illustre la volonté du gouvernement de garantir les droits des travailleurs tout en respectant la liberté de travail.»

Mohamed Zouiten
secrétaire général de l’Union nationale du travail au Maroc (UNTM)

«Nous refusons toute disposition qui porterait atteinte au droit constitutionnel de grève. Les syndicats ne peuvent renoncer aux acquis fondamentaux des travailleurs, et nous ne pouvons accepter une loi qui vise à restreindre cet exercice démocratique.»

Ali Lotfi
secrétaire général de l’Organisation démocratique du travail

«La coordination syndicale quadripartite exprime son rejet de ce projet de loi anticonstitutionnel, qui va à l’encontre des conventions internationales relatives aux droits de l’Homme et aux droits des travailleurs, en
particulier leur droit à protester contre les injustices sociales.»

Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO



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