Déclaration des délais de paiement : comment se préparer à l’échéance d’avril 2025

Face à l’échéance cruciale d’avril 2025, les entreprises doivent structurer leur processus de déclaration des délais de paiement pour éviter sanctions et contentieux. La méthodologie en 4 étapes de Reda Latrach, expert-comptable, offre une réponse appréciable combinant sélection des factures éligibles, structuration Excel, identification des retards et déclaration sur SIMPL. Découvrez les étapes de la feuille de route pratique qu’il prescrit.
À l’approche du 1er avril 2025, les entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 10 millions de dirhams sont confrontées à une obligation critique : finaliser leur déclaration annuelle des délais de paiement, sous peine de sanctions.
Dans ce contexte, des professionnels du chiffre font des recommandations pratiques, d’autres proposent des feuilles de route pratiques. Leur intérêt majeur réside dans leur capacité à transformer des obligations légales complexes en processus opérationnels clairs et reproductibles.
Face à une réglementation dense (loi n°69-21) et des sanctions potentiellement lourdes, ces méthodologies structurées offrent aux entreprises une démarche pas-à-pas qui minimise les risques d’omission ou d’erreur d’interprétation. En segmentant la déclaration en étapes logiques. De quoi démystifier la conformité pour les non-spécialistes.
Dans cette dynamique, l’expert-comptable, Reda Latrach, propose une feuille de route pratique pour naviguer la complexité réglementaire. Cette méthodologie, structurée en quatre étapes clés, se positionne comme un outil stratégique pour concilier conformité fiscale et optimisation opérationnelle. Analysons les étapes clés de la démarche qu’il recommande, leurs implications juridiques et les bonnes pratiques à adopter pour éviter les écueils.
Rigueur et exclusion ciblée dans la sélection des factures
La première étape, selon Reda Latrach, consiste à filtrer les factures éligibles. Seules celles d’un montant supérieur à 10.000 dirhams sont à retenir, excluant systématiquement les fournisseurs étrangers et ceux ne disposant pas de la qualité de commerçant au sens du Code de commerce. Une exclusion qui vise à aligner la déclaration sur le cadre juridique marocain, en ciblant les acteurs économiques soumis aux mêmes obligations.
Cette sélection initiale réduit le risque d’erreurs déclaratives et concentre l’analyse sur les transactions impactant directement l’écosystème local. Elle soulève toutefois une question : comment garantir l’exactitude des données fournisseurs ? Une vérification minutieuse des statuts légaux (registre de commerce, ICE) s’impose, notamment pour les PME travaillant avec des sous-traitants non enregistrés. La démarche est en soit une réponse structurée à la complexité légale.
En effet, la loi n°69-21, en révisant le Code de commerce, instaure un cadre strict pour les délais de paiement, avec des exigences différenciées selon le chiffre d’affaires des entreprises : délai légal de 60 jours, extensible à 120 jours par accord conventionnel, déclarations annuelles ou trimestrielles et amendes automatiques en cas de manquement. Dans ce contexte, Reda Latrach identifie un enjeu central : la sélection rigoureuse des factures assujetties, en excluant systématiquement les fournisseurs étrangers, les entités non inscrites au registre de commerce, et les factures d’un montant inférieur ou égal à 10.000 DH.
Cette approche ciblée apporte une double valeur ajoutée. D’une part, elle optimise l’efficacité opérationnelle en réduisant de 30 à 50 % le volume de données à analyser, selon les secteurs, en écartant les éléments hors périmètre réglementaire. D’autre part, elle sécurise juridiquement les entreprises en évitant les pièges liés à l’hétérogénéité des droits applicables aux fournisseurs étrangers, souvent source de contentieux pour les PME peu familiarisées avec les nuances juridiques internationales.
En focalisant les efforts sur les factures locales de montant significatif, cette méthodologie transforme une obligation légale complexe en un processus maîtrisable, tout en alignant les pratiques sur les attentes de la DGI — une stratégie pragmatique pour concilier conformité et performance dans un environnement normatif exigeant.
Structuration des données : de l’opérationnel au stratégique
L’expert insiste sur la nécessité de structurer les données dans un fichier Excel, en y intégrant des colonnes spécifiques : date de facture, date de livraison, et surtout un champ «Délai prévu/convenu». Ce dernier distingue les délais contractuels (jusqu’à 120 jours) des délais légaux (60 jours par défaut).
«Le calcul de l’échéance dépend de la date d’émission de la facture : si elle est émise dans le même mois que la livraison, l’échéance part de la date de facture. Sinon, elle débute au 1er du mois suivant la livraison», explique Latrach.
Cette subtilité chronologique est cruciale. En effet, une erreur dans la détermination de la date de livraison ou de facturation peut fausser le calcul des délais, exposant l’entreprise à des sanctions pour déclaration inexacte. Par exemple, une facture émise en retard reporte l’échéance, allongeant artificiellement le délai de paiement déclaré.
Ainsi, la feuille de route place la structuration des données au cœur de la conformité, en transformant un exercice administratif en levier stratégique. En recommandant la création d’un fichier Excel standardisé — avec des colonnes dédiées aux dates de facture, de livraison, délais convenus et calcul automatique des échéances —, elle formalise des éléments souvent traités de manière disparate.
La précision de Latrach, «le délai prévu/convenu ne doit pas dépasser 120 j […] sinon, appliquez le délai légal de 60 j», incarne cette rigueur : elle ancre dans le processus une règle juridique critique, évitant les dépassements accidentels. La distinction explicite entre date de facturation et date de livraison, source fréquente d’erreurs, est clarifiée par des règles objectives — par exemple, si la facture n’est pas émise dans le mois de livraison, l’échéance démarre au 1er jour du mois suivant. Une standardisation qui élimine les ambiguïtés interprétatives, tandis que l’automatisation partielle via des formules Excel (calcul de l’échéance, identification des retards via «date d’échéance – date convenue > 0») convertit des données brutes en indicateurs actionnables.
Ainsi, ce qui était perçu comme une charge bureaucratique devient un outil de pilotage : les entreprises visualisent en temps réel les retards, anticipent les tensions de trésorerie et alignent leurs pratiques sur les exigences légales. En somme, cette structuration opérationnalise la réglementation, tout en posant les bases d’une analyse financière plus profonde — une étape clé vers la maturité data-driven des entreprises.
Identification des retards : de la data à la décision
La détection des factures en retard repose sur un filtrage des écarts entre date d’échéance et date de paiement effectif. Reda Latrach recommande d’utiliser la fonction RECHERCHEV pour croiser les données avec une feuille annexe listant les informations légales des fournisseurs (ICE, RC, adresse). Une étape qui permet non seulement de valider la conformité, mais aussi de préparer les éléments requis pour la plateforme DGI.
Cependant, cette méthode manuelle comporte des limites. Les entreprises traitant des centaines de factures mensuelles pourraient bénéficier de systèmes automatisés intégrant directement ces vérifications. L’expert note d’ailleurs que «cette démarche est présentée indépendamment du système d’information, qui peut automatiser une grande partie de ce process».
En effet, un système d’information peut automatiser une grande partie de ce processus, réduisant les risques d’erreur humaine. Bien que la méthode manuelle préconisée par l’expert soit adaptée aux PME gérant un volume modéré de factures, elle révèle ses limites dans les entreprises traitant un nombre très important de factures mensuelles.
Le risque d’erreurs de saisie, de double comptabilisation ou d’omissions s’accroît exponentiellement avec le volume, compromettant la fiabilité des déclarations. C’est ici qu’une intégration avec un ERP devient stratégique. Cela permet aussi de paramétrer les délais légaux et contractuels directement dans les workflows, générant automatiquement les alertes pour les dépassements.
Disons que l’étape d’identification des retards dépasse la simple détection technique pour devenir un pilier de gouvernance financière. En intégrant une «recherche V» afin de croiser les données factures avec les informations légales des fournisseurs (IF, ICE, registre de commerce), l’approche comble une lacune fréquente : l’absence de corrélation entre les transactions et la conformité juridique des partenaires.
La DGI exige en effet ces mentions légales pour valider les déclarations, sous peine de rejet immédiat — un risque que Latrach neutralise en systématisant cette vérification. La traçabilité renforcée qui en découle sécurise le processus à deux niveaux : d’une part, elle garantit que chaque facture déclarée est associée à un fournisseur identifié et régulier, évitant les erreurs de saisie ou les omissions critiques ; d’autre part, elle crée un historique auditable, où chaque retard est justifié par des données sourcées (dates, conventions, coordonnées légales).
Ce fichier structuré, bien plus qu’un formulaire administratif, devient une preuve de diligence raisonnable en cas de contrôle fiscal, démontrant que l’entreprise a non seulement respecté les délais, mais aussi documenté chaque étape de manière méthodique.
«Ainsi, cette phase transforme des données brutes en un actif décisionnel : en visualisant les retards récurrents liés à certains fournisseurs, les entreprises peuvent ajuster leurs stratégies de négociation ou de trésorerie, tout en renforçant leur crédibilité auprès des autorités fiscales. Une démarche où la rigueur technique sert autant la conformité que l’intelligence économique», soutient un analyste.
Dernière étape : déclaration
La phase finale implique de déclarer les retards sur la plateforme SIMPL-délais de paiement de la DGI, d’abord en mode brouillon. Reda Latrach conseille de transmettre cet état des délais à son commissaire aux comptes, son expert-comptable ou son comptable agréé pour validation préalable. Une collaboration essentielle pour garantir l’exactitude des données et anticiper d’éventuels redressements.
Rappelons que les entreprises doivent déclarer deux catégories de factures : celles payées en retard et celles toujours impayées au-delà du délai légal. Cette dualité implique un suivi continu des échéances, même après la clôture de l’exercice, pour éviter les omissions.
Ainsi, la méthodologie de l’expert-comptable intègre une synergie entre technologie et expertise humaine pour élever la conformité au rang de processus stratégique. En préconisant une déclaration préliminaire en «mode brouillon» sur la plateforme SIMPL-délais de paiement, il introduit une sécurité procédurale : les entreprises peuvent tester leur déclaration, identifier les incohérences (dates erronées, fournisseurs manquants), et rectifier en temps réel avant soumission finale — une précaution essentielle face à l’irréversibilité des erreurs sur les portails fiscaux.
Cette phase de validation technique est complétée par une collaboration structurée avec les experts-comptables. En impliquant ces professionnels agréés, les entreprises ne se contentent pas de remplir une formalité déclarative ; elles alignent leurs données sur les normes CGNC et autres obligations fiscales (TVA, impôt sur les sociétés), créant ainsi une cohérence globale du reporting financier.
Par exemple, un retard de paiement déclaré ici doit correspondre aux écritures comptables (créances clients) et aux déclarations de TVA, sous peine de divergences détectables lors d’un audit. Même en l’absence de factures en retard, l’obligation de déclaration persiste, renforçant la discipline documentaire.
Cette approche hybride — alliant outils numériques (SIMPL) et validation humaine — transforme une contrainte réglementaire en opportunité d’optimisation. Elle consolide la transparence, prévient les risques fiscaux cumulatifs, et inscrit la gestion des délais de paiement dans une logique intégrée de performance financière.
Entre conformité et efficacité opérationnelle
La déclaration annuelle des délais de paiement, bien que perçue comme une contrainte administrative, est un levier de transparence et de performance. La feuille de route proposée par notre expert transcende la simple checklist réglementaire.
Elle incarne une démarche proactive où conformité rime avec efficacité, avec à la clé une réduction du temps consacré à la déclaration grâce au filtrage et à l’automatisation partielle ; la minimisation des amendes et des risques réputationnels ; ou encore en identifiant les retards, les entreprises peuvent renégocier leurs délais fournisseurs ou ajuster leur trésorerie.
En définitive, cette méthodologie ne se limite pas à répondre à la DGI ; elle participe à une gestion financière plus agile, essentielle dans un contexte économique marqué par la pression inflationniste et les exigences croissantes de transparence.
Comme le résume Latrach, «cette démarche est présentée indépendamment du système d’information», invitant ainsi les entreprises à l’adapter à leur maturité technologique.
Bilal Cherraji / Les Inspirations ÉCO