Conseil de gouvernement. Pourquoi Ramid boycotte?

Pourquoi le ministre d’Etat en charge des droits de l’Homme reste-t-il absent des récentes réunions hebdomadaires du Conseil de gouvernement ?
Interrogé sur ce point, Mostafa Ramid explique aux ECO qu’il proteste par là à sa manière contre un « incompréhensible blocage » posé par le Secrétaire général du gouvernement devant la publication du plan national pour la démocratie et les droits de l’Homme au Bulletin officiel…
Fait inédit dans la vie gouvernementale marocaine, un ministre décide de ne plus participer aux conseils de gouvernement en guise de protestation contre un autre membre du gouvernement. Sur le plan réglementaire, l’activité des ministres est réglementée par la Constitution dans le Titre V où il est question du pouvoir exécutif. D’ailleurs, l’article 93 indique clairement que «Les ministres accomplissent les missions qui leur sont confiées par le chef de gouvernement. Ils en rendent comptent au Conseil de gouvernement». L’absence de Ramid peut-elle donc être justifiée? Qu’est-ce qui a poussé le ministre à réagir de la sorte? Et quel est le rôle du chef de gouvernement dans toute cette histoire?
Le motif en question
Mustapha Ramid, ministre d’État chargé des droits de l’Homme, ne prend plus part au Conseil de gouvernement depuis près d’un mois. Il proteste contre un «incompréhensible blocage» au niveau du Secrétariat général du gouvernement (SGG). Ce dernier s’abstient de publier, au Bulletin officiel, le Plan national en matière de démocratie et des droits de l’Homme, alors que la décision a été prise par le Conseil de gouvernement le 21 décembre 2017. Pour rappel, ce plan est le résultat d’un travail accompli de concert avec la société civile et les associations des droits de l’Homme afin de répondre aux exigences internationales en la matière. Ce projet comporte les droits civils, politiques, économiques, sociales, culturelles, environnementales, ainsi que la gouvernance administrative et territoriale. Cette loi mettrait le Maroc au diapason avec les standards internationaux. Face aux tergiversations du gouvernement, les associations des droits de l’Homme commencent à se poser des questions, et certaines n’hésitent plus à remettre en question la crédibilité du ministre qui a mis des mois pour parvenir -difficilement- à des consensus..
Le plaidoyer de Ramid
Contacté par les Inspirations ÉCO, Ramid a confirmé le boycott des travaux du Conseil de gouvernement. Il estime que «Ce plan national de démocratie et des droits de l’Homme avait fait l’objet de débats et d’une présentation au sein du conseil gouvernemental avant d’être approuvé à l’unanimité». Et d’ajouter que «si le gouvernement voulait l’amender, il en avait les prérogatives puisque c’est justement le gouvernement qui est en charge de sa mise en œuvre». Mais comme diraient d’aucuns, il y a anguille sous roche: le secrétaire général du gouvernement n’a pas formulé la moindre remarque, mais refuse en même temps de publier le texte au Bulletin officiel. Cela dure depuis des mois, ce qui a fait perdre patience au ministre d’État, cette situation risquant de le discréditer auprès du monde associatif qui a œuvré avec lui, des mois durant, pour la production du fameux texte.
«Avant de prendre cette décision, le chef de gouvernement avait organisé une réunion à laquelle j’ai pris part avec le SGG. Les arguments avancés par ce dernier n’étaient guère convaincants et ne pouvaient en aucun cas justifier cette rétention», nous déclare Ramid. «J’ai attendu un mois après la tenue de la réunion. Quand j’ai réalisé que rien ne changeait, j’ai décidé de ne plus participer aux conseils gouvernementaux. Cette décision restera en vigueur tant que ledit texte n’aura pas été publié», conclut-il.