Maroc

Changement climatique : les territoires tenus de s’adapter

Pour s’adapter au changement climatique, la bonne échelle est celle du territoire. Voilà ce qu’affirme l’initiative citoyenne OTED, à l’issue de la 4e édition «Parlons Territoires» qui a abordé les chantiers de l’adaptation climatique territoriale. Selon les experts présents, les régions sont les principaux acteurs d’une adaptation opérationnelle.

Sécheresse, désertification, inondations, incendies… l’amplification des phénomènes extrêmes liés au changement climatique est devenue une réalité. Cependant, leur impact varie d’un territoire à l’autre. C’est pourquoi la réponse à cette vulnérabilité climatique, dans le cadre d’une meilleure résilience territoriale, diffère selon les régions, et ce compte tenu du degré de développement des capacités locales pour faire face à l’adaptation et l’atténuation de ces changements.

Aujourd’hui, nul choix pour les territoires marocains que de repenser leurs modèles de développement en procédant à la réalisation de plans d’action face à la vulnérabilité climatique, tout en mettant en œuvre des solutions adaptées à leurs contextes spécifiques. Pour débattre de cette problématique, l’initiative citoyenne OTED a initié, en milieu de semaine dernière, sa 4e édition «Parlons Territoires», sous forme d’une table ronde. Cette rencontre a mis en exergue la nécessité des chantiers d’adaptation climatique, basés, notamment, sur des projets résilients avec des pistes d’adaptation en faveur des populations locales.

«La gouvernance du climat en général et l’adaptation au changement climatique doit être installée dans les territoires, surtout avec le chantier de la régionalisation avancée. Ce mécanisme permet de décliner les actions des Plans territoriaux de lutte contre le réchauffement climatique  (PTRC) dans le cadre des différents programmes de développement régional, en coordination avec le ministère de la Transition énergétique et le département du Développement durable», explique Brahim Hafidi, directeur général de l’Agence nationale pour le développement des zones oasiennes et de l’arganier (ANDZOA).

Neuf régions dotées de leurs PTRC

Pour l’ancien président du Conseil régional Souss-Massa, «les compétences dont disposent actuellement les régions permettent aussi de décliner cette approche sur le plan territorial, y compris pour ce qui est de la formation des élus et des cadres de l’administration territoriale pour une meilleure prise de conscience de ces questions», ajoute-t-il.

Partant de ce constat, neuf régions se sont vues déjà dotées de leurs PTRC dont cinq sont déjà réalisés. Pour rappel, le Souss-Massa qui a été le premier à livrer le sien avec la mise en place du mécanisme régional d’inventaire des GES, notamment le système de Mesure reporting & vérification des émissions de gaz à effet de serre.

«Cette région a été affectée depuis longtemps par les phénomènes de dérèglement climatique et de stress hydrique accentué. Outre l’élaboration de son PTRC, Souss-Massa a adopté une politique de préservation d’eau avec la signature du premier contrat de nappe à l’échelle nationale et l’adoption de solutions alternatives telles que les techniques d’économie d’eau, l’installation d’infrastructures hydriques et le recours, plus récemment, au dessalement d’eau de mer pour l’irrigation agricole et l’approvisionnement en eau potable», précise Brahim Hafidi.

Dans le cadre de la proposition de chantiers afférant à l’adaptation climatique au niveau territorial, Quentin Ballin, responsable d’équipe projet, relevant de la division Agriculture, développement rural et biodiversité de l’Agence française de developpement, a insisté sur une approche territoriale qui soit adaptée à chaque contexte régional.

La régionalisation, un mécanisme fédérateur

«L’idée d’un modèle d’alliance territoriale dédié à l’adaptation climatique est à éviter. Il faut étudier chaque territoire à part pour construire un espace de dialogue entre les acteurs. Dans ce sens, la régionalisation avancée est un mécanisme fédérateur, au même titre que les communes au niveau local», explique Quentin Ballin qui a souligné l’importance de prendre en considération la dynamique de la nappe pour les régions non côtières.

Illustrant ses propos par l’exemple du projet de développement de l’irrigation et d’adaptation de l’agriculture irriguée aux changements climatiques, à l’aval du barrage Kaddoussa, Ballin a souligné le caractère territorial de ce projet relevant de la Région Drâa-Tafilalet et qui a nécessité l’équivalent de 100 millions d’euros.

«Ce projet a inclus la dimension de développement intégré par une approche engageant les populations locales, avec un volet dédié à leur accompagnement et consultation. Il a permis aussi l’adoption de pratiques agricoles plus résilientes face au changement climatique ainsi qu’une priorisation des activités de la population, notamment la gestion des déchets, le transport, le lavage collectif et bien d’autres».

Dans le même ordre d’idées, Mouna Mseffer, journaliste et co-auteur de «Maroc : justice climatique, urgences sociales», a insisté sur l’implication des populations locales et la prise en compte de leurs propositions et solutions face aux changements en cours.

«Le constat principal, qui s’est dégagé des enquêtes réalisées dans le cadre de cet ouvrage, est le manque d’efficacité des politiques publiques, en raison de la carence de concertation et d’implication des populations locales», a-t-elle souligné. Mseffer a abordé, par ailleurs, le rôle des savoirs locaux dans cette adaptation aux changements climatiques, notamment en matière de pratiques agricoles.

Super Esco lance deux projets phares

Toujours dans le cadre de cette proposition de solutions d’adaptation aux changements climatiques au niveau territorial, Ahmed Baroudi, directeur général de la Société d’investissements énergétiques a annoncé le développement d’une coopérative dédiée à l’énergie rurale dans deux régions du pays en vue d’apporter des réponses concrètes à la question de disponibilité des compétences en milieu rural, avec une capacité d’ingénierie locale.

Il s’agit aussi de la conception d’un modèle d’oasis qui sera sélectionné par l’ANDZOA. «Aujourd’hui, l’offre de services en milieu rural est marquée par un déficit qu’il faut résoudre. Ce premier projet développera une offre de services d’installation et de maintenance d’infrastructures d’énergie en faveur des agriculteurs et de la population, d’une manière générale. Les statuts de cette coopérative ont déjà été rédigés avec l’ODCO, et le chantier est prêt à démarrer.

Pour le second projet, il permettra la mise en œuvre de solutions de rationalisation énergétique et l’usage des énergies renouvelables dans le cadre d’une autonomie énergétique oasienne», a affirmé Ahmed Baroudi, DG de la société d’investissements énergétiques, récemment transformée en société d’ingénierie (Super Esco).

Par ailleurs, Faissal Sehbaoui, DG d’AgriEdge a met l’accent sur l’importance des nouvelles technologies numériques, notamment les cartes à vocation agricole. «Elles permettent d’apporter des réponses aux aléas climatiques afin d’analyser les besoins exacts des cultures et des élevages, tout en mesurant l’intensité des facteurs climatiques à fort impact et en opérant un rapprochement entre les besoins et les conditions climatiques, en matière de pratiques agricoles», a-t-il expliqué.

Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO


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