Programme Élite : Un vivier en ébullition
La Bourse de Casablanca se prépare à accueillir la quatrième cohorte d’entreprises dans le programme Élite. Jusqu’à aujourd’hui, le programme accompagne pratiquement 35 sociétés en leur présentant les différentes solutions de financement offertes par le marché des capitaux. Un processus qui se révèle ardu, mais les chefs d’entreprises candidates semblent bien accueillir la démarche. Témoignages…
Marché des capitaux, prêt emprunt, titrisation, système d’informations, normes IFRS…Les sujets pour faire renouer les entreprises avec la place boursière ne manquent pas. En effet, attirer les sociétés à la cote reste incontestablement l’une des priorités de la Bourse. Pour l’heure, la place – en manque de papier frais – tente de réconcilier les entreprises avec les marchés des capitaux à travers son programme Élite. «Ce programme me semble un instrument novateur, que nous commençons à peine à expérimenter», découvre Younès Boumehdi, patron de Hit Radio.
L’objectif étant de faire découvrir aux chefs d’entreprises des alternatives de financement autre que l’endettement bancaire en passant par le capital-investissement et ceci afin de les aider dans leurs prochaines étapes de croissance. «La visibilité financière gagnée à travers le programme Élite nous a facilité l’accès aux sources de financements. Nous avons été contactés spontanément par plusieurs organismes financiers depuis que nous avons rejoint le programme et sommes actuellement en discussions assez poussées», nous confie Si Mohamed Azzaouz, dg de Magriser (leader marocain en micro-irrigation et participant à la troisième cohorte). Un challenge autant pour l’équipe du programme ainsi que pour ces PME marocaines qui – souvent familiales – associent le marché des capitaux à une introduction en bourse qui pourraient limiter leurs prérogatives (perte de contrôle, obligation de transparence …) Pour y remédier, la démarche du programme Élite est de miser sur une transformation progressive. Pour rappel, le programme s’articule en 3 phases : «Get Ready, Get Fit, Get Value», qui ont pour vocation de former et de préparer les candidats aux exigences du marché des capitaux.
Ainsi, ces PME sélectionnées pour leur potentiel de développement devraient s’entourer tout au long du processus par des conseillers, des partenaires académiques, des entreprises cotées, des investisseurs mais également du réseau des entreprises membres du programme Élite en Europe. «Élite est un programme qui se veut un écosystème de mise en relation entre les entreprises et divers partenaires stratégiques (conseillers, investisseurs, Bourse…)», déclare Touhami Rabii, pdg de Gemadec, spécialiste de la transformation digitale. Cet écosystème devrait ainsi faciliter les changements structurels à appréhender par les entreprises. La particularité de ce programme, déjà plébiscité en Europe par la Commission européenne notamment, comme étant le meilleur outil d’accompagnement des PME en place est donc qu’il s’attaque en priorité à l’accélération des changements culturels dans l’entreprise.
Amélioration des structures internes
Pour l’heure, la place boursière de Casablanca s’apprête à accueillir la quatrième cohorte des entreprises. Il faut dire qu’à travers ce programme lancé en avril 2016, la Bourse de Casablanca tente de renforcer son engagement auprès des entreprises. À ce jour, 35 sociétés ont déjà intégré le programme. Elles opèrent dans 11 secteurs et génèrent un chiffre d’affaires de 10 MMDH. Rien que sur la dernière cohorte, 11 entreprises ont bénéficié de ce programme mis en place avec London Stock Exchange (LSE). L’ensemble des 24 entreprises qui constituent les deux premières cohortes d’Élite Maroc ont été sélectionnées pour faire partie des entreprises qui inspirent l’Afrique et bénéficient ainsi d’une visibilité internationale et régionale.
D’ailleurs, c’est l’une des particularités des dernières promotions où quasiment toutes les entreprises recrutées ont des présences ou exportent sur le reste du continent. L’accompagnement des entreprises se poursuit par ailleurs la seconde phase pour la première promotion a été lancée. Elle permettra aux entreprises d’évaluer leurs systèmes organisationnels et financiers afin notamment de consolider leurs pratiques en matière de communication sociale et financière. «Le programme Élite va nous permettre d’appréhender le marché financier et ceci en travaillant sur l’optimisation de notre organisation et nos différents programmes de croissance à travers une stratégie bien définie et un business plan solide. À moyen terme, nous aurons grâce au programme Élite jeté les bonnes bases pour l’introduction de notre entreprise en bourse», conclut Fouad Benzakour, dg de Super Cérame, mais l’idéal pour la Bourse serait d’arriver à une introduction sur les années à venir. Une ambition qui – du côté des investisseurs – devrait permettre de régler le sérieux problème de liquidité qui subsiste sur le marché. L’échantillon est d’ailleurs assez large et certaines pépites se distinguent du lot, comme Gemadec, Bricoma ou encore Super Cerame…Les médias ont également fait leur entrée dans l’univers du marché des capitaux (Hit Radio, PR Médias).
En effet, «les entreprises Élite sélectionnées dans les différentes cohortes se caractérisent par leur diversité sectorielle, leur taille et les problématiques diverses auxquelles elles doivent faire face. Elle présente un point commun important, celui d’améliorer leur structure interne pour accéder à un marché des capitaux exigeant», assure Yann Assor, le patron Corporate Finance au sein de PwC Afrique francophone. La prochaine édition du programme promet d’être encore plus éclectique en termes de candidats.
Témoignages
Mohamed Azzaouz
DG de Magriser
Notre groupe est arrivé à un stade majeur de son développement ou les circuits de financements bancaires classiques ne correspondent plus à nos attentes, c’est pourquoi nous avons opté pour le programme Élite. L’accès aux marchés des capitaux nous permet d’envisager des sources de financements plus flexibles (e.g : obligations convertibles) tout en minimisant les inconvénients de crédits bancaires tels que les garanties personnelles excessives exigées par les établissements bancaires. La croissance de chiffre d’affaires est l’un des meilleurs baromètres de performance d’une entreprise. À ce titre, nous réalisons depuis 4 ans une croissance annuelle moyenne de plus de 25%. Le financement du BFR devient donc un enjeu crucial pour pérenniser cette croissance.
Touhami Rabii
PDG de Gemadec
Gemadec a décidé de se lancer dans le programme Élite dans le cadre de sa démarche de progrès. C’est un processus d’amélioration continue de sa gouvernance engagé depuis plusieurs années, qui s’est couronné par plusieurs certifications et labels qui hissent Gemadec au niveau des plus grands standards internationaux. Parce que notre conviction est qu’une entreprise ne peut avoir des ambitions internationales sans être dans un référentiel international. En plus, notre objectif est de faire bénéficier notre management des formations d’accompagnement dispensées dans le cadre du programme. Enfin, Élite nous permettra de nous ouvrir sur le marché financier pour soutenir notre plan de développement. Je peux même dire qu’il arrive un moment où la taille financière d’une entreprise devient si importante que ses investissements ne pourront être couverts par ses actionnaires d’origine ou l’autofinancement ou encore par les prêts bancaires. Ainsi le financement via le marché des capitaux devient alors la seule solution. Il est donc important de se préparer à cette éventualité. Le programme Élite permet de donner les outils nécessaires pour accéder aux diverses sources de financement qu’offre le marché financier et plus particulièrement le marché des capitaux.
Younès Boumehdi
Patron de Hit Radio
Nous avons eu la chance d’être sélectionné par la Bourse de Casablanca en même temps que des entreprises prestigieuses. Le premier enjeu de l’intégration du programme Élite est de bénéficier d’un accompagnement dynamique de haut niveau. Cela permettra aussi de renforcer les compétences des hauts cadres de Hit Radio, qui, il faut le noter vient de rejoindre le peloton Élite. Nous ne pouvons donc pas parler de réelles retombées sur notre activité. À ce jour, nous avons pu nouer des contacts. Le premier cycle de formation a donné du «punch» aux collaborateurs qui ont pu y participer. je tiens à préciser aussi que pour une entreprise en croissance comme la nôtre, il est important d’étudier tous les modes de financement. Le marché des capitaux est particulièrement adapté à des opérations de croissance externe ou pour accompagner dans la durée un plan de développement ambitieux.
Fouad Benzakour
DG de Super Cérame
D’aucuns ne peut nier la pression exercée sur la trésorerie des entreprises industrielles et les difficultés rencontrées aujourd’hui pour accéder aux sources de financement – traditionnelles – avec des exigences dissuasives parfois. Dans ce cadre le marché financier se présente comme une alternative concrète qui peut apporter des solutions de financement et jouer le rôle de levier pour atteindre les objectifs de croissance. Depuis notre intégration au programme Élite, plusieurs organismes nous ont approchés afin de nous accompagner dans la mise en place d’un financement via le marché des capitaux. Pour dire que l’enjeu n’est pas seulement d’accompagner notre développement et notre croissance et perfectionner la gouvernance au sein de notre organisation et échanger l’expérience avec les membres de l’écosystème Élite, mais aussi de gagner en notoriété et en image de marque, d’autant plus que Super Cérame fait partie dorénavant du top 20 mondiaux de la céramique. Le programme reste ainsi une expérience enrichissante et un lieu d’échange d’expériences pour favoriser l’innovation et l’entrepreneuriat. Chacun de nos membres du programme Élite sont en contact direct avec des PME dans notre activité de tous les jours, des PME auxquelles nous pouvons servir de mentors pour accéder aux avantages du programme comme nous le faisons pour les aider à se mettre à niveau de nos exigences qualitatives. Nous sommes favorables à des rencontres grandes entreprises et PME afin de développer des relations de partenariat qui profiteraient à l’ensemble.
Yann Assor
Head of Corporate Finance PwC Afrique francophone ( consultant )
Le programme Élite instauré par la Bourse de Casablanca est un projet unique destiné aux entreprises marocaines à fort potentiel désireuses d’accéder au marché de capitaux dans les meilleures conditions. Il constitue une pépinière des futures grandes capitalisations de la Bourse de Casablanca. Les sociétés désireuses d’accéder aux marchés des capitaux doivent disposer d’un capital social minimum de 50 MDH, disposer des outils adéquates telle qu’une bonne gouvernance, un business plan solide étayé par une stratégie de développement réaliste, une comptabilité fiable et des outils de contrôle de gestion permettant une meilleure appréciation de la rentabilité de l’entreprise.