Marchés : Quelles perspectives pour le second semestre ?
Les placements censés faire fructifier l’épargne investie ont bien rempli leur mission, lors du premier semestre de l’année en cours. Qu’en sera-t-il pour la deuxième moitié de l’année ? Analyse.
Les placements censés faire fructifier l’épargne investie ont bien rempli leur mission au premier semestre de l’année en cours. La Bourse est, en effet, plutôt euphorique depuis quelques mois. La reprise du secteur immobilier coté ainsi que la publication des résultats semestriels légèrement en hausse par les entreprises du Masi ont suffi pour relancer le marché boursier dans son ensemble. Les indices phares du marché ont ainsi clôturé le premier semestre avec des performances de 6,5% pour le Masi et 7,04% pour le Madex. Cette embellie au titre des six premiers mois de l’année en cours trouve également son origine dans la liquidité abondante dont fait preuve le marché marocain depuis quelques mois.
Effet de rattrapage
Dans le détail, la performance du Masi provient de la bonne forme affichée par un certain nombre de secteurs phares de la Bourse de Casablanca, principalement l’immobilier qui a marqué une envolée de 48,8% sur la même période. L’indice sectoriel a profité de la trajectoire positive qu’ont opérée les trois valeurs phares le composant, à savoir Addoha (ADH) avec une performance de 53,25%, Alliances (ADI) avec +51,2% et Résidences dar Saada (RDS) avec +36,7%. À en croire les analystes, les principaux éléments expliquant cette bonne forme du secteur coté de l’immobilier sont les réalisations des sociétés phares du secteur.
En effet, à l’exception du groupe Alliances qui a affiché des résultats déficitaires, les autres sociétés phares du secteur immobilier coté, notamment Addoha et Résidences Dar Saada, ont affiché des réalisations positives. Le groupe Addoha a respecté son Plan Génération Cash et a commencé à communiquer sur ses réalisations trimestrielles afin de rassurer le marché. Idem pour le groupe Résidences Dar Saada qui a eu des réalisations en ligne avec son budget et a enregistré une amélioration de ses marges opérationnelles. En parallèle, le groupe a également instauré une politique de communication financière par trimestre pour mieux informer la communauté financière.
À l’évidence, le marché actions a tiré profit d’un effet de rattrapage sur l’immobilier qui était fortement pénalisé au cours des deux dernières années. Ainsi, le faible niveau de valorisation du secteur coté de l’immobilier en début d’année a laissé un potentiel de croissance important des cours des sociétés du secteur. Notons qu’à fin 2015, le P/E du secteur coté de l’immobilier s’est établi à 11,2x contre un P/E marché de 17,4x. Soulignons par ailleurs que la tendance de hausse sur le marché boursier n’a pas manqué d’impacter positivement les performances des OPCVM actions et diversifiés au premier semestre, dont les rendements se sont significativement améliorés depuis le début de l’année.
En attendant les résultats semestriels
En termes de perspectives, c’est l’embrouille totale pour le marché actions. L’euphorie observée sur le premier semestre commence à s’essouffler et pour preuve, le marché a légèrement corrigé sur les deux derniers mois. «Les investisseurs se sont rabattus sur le marché actions en début d’année pour compenser le manque à gagner généré par la baisse des taux obligataire. Cependant, les titres cotées ont pris tellement d’ampleur qu’ils ont été surévalués en raison de l’euphorie présente sur ce même marché. Cependant, aujourd’hui, il n’ya pas de stimulateurs de nature à encourager une performance haussière durable» nous confie un analyste.
De plus, 2016 a été une mauvaise année agricole et les effets néfastes ne vont pas tarder à se ressentir sur l’investissement et la consommation. «On devrait certainement commencer les effets néfastes sur la consommation des ménages au deuxième semestre, ce qui va se traduire par une baisse de performances financières des sociétés, entre autres, de la cote» nous explique le même analyste. Aussi, dans un contexte où la croissance économique est au ralenti, les sociétés de la cote devraient être doublement impactées et afficher des croissances modérées, selon les experts.
Pas de précipitation sur le marché
L’autre composante qu’il faut prendre en compte, à en croire notre analyste, est les taux d’intérêt. Ces derniers sont en train d’emprunter une trajectoire haussière. «Si la tendance des taux atteint des niveaux élevés et donc assez confortables aux yeux des institutionnels, ils n’auront aucune raison de faire un arbitrage en faveur du marché actions. Ces derniers accorderont moins d’importance à ce marché qui poursuivra sa correction», souligne l’expert. C’est donc le contexte macroéconomique global qui va dicter le comportement des taux d’intérêt ainsi que la croissance des entreprises, et de facto, leur performance sur le marché actions. Notons par ailleurs que si l’on tient compte de la prévision de la Banque centrale d’une poursuite de l’amélioration de la liquidité, on devrait s’attendre à ce que les taux d’intérêt se détendent à nouveau d’ici la fin de l’année et le cas échéant, à un regain d’intérêt sur le marché actions.
Marché obligataire
En revanche, rien ne semble arrêter la baisse des taux sur le marché obligataire au premier semestre 2016. La rareté des bons du Trésor, essentiellement court et moyen termes, a continué d’accroître leur valeur sur le marché secondaire. Cette tendance a persisté en raison d’une amélioration des finances publiques et d’une demande importante des investisseurs en bons du Trésor. Par ailleurs, la détente des taux obligataires n’a pas manqué d’avoir un impact sur le rendement des produits dits de taux. Cet impact est mitigé en fonction du produit et de la durée de placement.
Tout d’abord, la baisse des taux des bons du Trésor a augmenté la valeur des anciens bons du Trésor détenus en stock. Cela s’est traduit par une appréciation de la valeur des actifs des OPCVM obligataires. Autrement dit, la valeur liquidative des OPCVM obligations court terme (CT) et moyen et long termes (MLT) a augmenté consécutivement à la baisse des taux et a généré par conséquent des plus-values aux investisseurs. En revanche, cette configuration est moins favorable aux OPCVM monétaires car ces derniers sont investis dans des actifs moins rémunérateurs que ceux détenus en 2014. La rémunération de certains produits de placement bancaires a également des changements suite à la baisse des taux obligataires. Il s’agit des comptes sur carnet ouverts auprès des banques dont la rémunération est indexée sur ces taux.
Notons qu’un renversement de tendance s’est opéré suite à l’annonce par BAM de la mesure d’augmentation du taux de la réserve obligatoire. «Les banques ont commencé à emprunter auprès de BAM au taux directeur. De ce fait, les taux monétaires qui traitaient à des niveaux bas- qui touchaient les 1,50%- sont remontés. Ils sont actuellement à un niveau de 1,75%. Ils sont tirés à la hausse par les coûts de financement des banques auprès de la Banque centrale qui se font à 2,25%» nous explique notre expert. En termes de perspectives, si le prix du pétrole reste à son niveau bas actuel et que la balance commerciale poursuit son redressement, cela induira une poursuite de l’amélioration de la situation de la liquidité qui neutralisera l’effet de l’augmentation de la réserve décrétée par Bank Al-Maghrib.