Les Cahiers des ÉCO

Jihane El Bahhar : Une conteuse à la caméra

Jihane El Bahhar, scénariste et réalisatrice

Pour son premier long métrage derrière la caméra, la scénariste Jihane El Bahhar a décidé de raconter un Maroc riche en contrastes en portant haut et fort la voix des Marocains qui vivent dans des conditions difficiles, dans les montagnes du Moyen-Atlas. Portrait d’une conteuse engagée qui vient de sortir «Au pays des merveilles», en salles depuis le 15 mars.

Avec le cinéma comme passion et l’écriture comme moyen d’expression, Jihane El Bahhar est connue dans le métier pour concocter de belles histoires. Lauréate de la section audiovisuelle de la faculté Ben M’sik de Casablanca, la jeune réalisatrice a participé à la cellule de scénario de plusieurs sitcoms comme «Lalla Fatima», «Dar oumi Hania» ou encore «Yak hna jirane», avant de se consacrer à l’écriture de téléfilms à l’instar de «Had sadaqua» de Adil Fadili et de «Juste pour les couples» de Hassan Benjelloun, ou encore le film «Femmes en miroirs» de Saad Chraibi. «J’ai l’impression qu’on banalise, qu’on minimise le métier de scénariste.

Les réalisateurs préfèrent écrire les scénarios eux-mêmes, tout faire eux-mêmes alors qu’écrire un scénario, c’est tout un métier!», confie celle qui, après plusieurs formations au Maroc et à l’étranger pour se perfectionner, décide de donner vie à son premier court métrage «Shift+suppr», primé dans plusieurs festivals nationaux et internationaux, ayant notamment remporté le prix du meilleur scénario lors de la la huitième édition du Festival international du film de Beyrouth. De court métrage en court métrage, la cinéaste marocaine décide de se lancer dans l’aventure du long métrage.

Après trois années de travail acharné, «Au pays des merveilles» est né. «L’idée de réaliser un film a longtemps germé en moi, mais je ne me sentais pas prête. J’ai toujours voulu faire du cinéma, mais je ne me voyais pas dans la réalisation. Mon premier amour, c’est l’écriture et le scénario», confie Jihane El Bahhar, qui a décidé de sauter le pas avec le soutien de son compagnon de vie, co-scénariste et producteur du film, le journaliste Jamal El Khanoussi. Encouragée par son entourage, l’aventure de la réalisation a commencé par la volonté et la nécessité, presque, de raconter une histoire qui lui tenait vraiment à cœur. Au pays des merveilles raconte la souffrance des habitants de ce Maroc profond, dans les montagnes de l’Atlas, à travers une approche comique qui porte à l’écran les conditions climatiques dures et glaciales en l’absence d’infrastructures basiques dans cette région. «Les gens dans ces villages survivent, ils ne vivent pas. Ils vivent dans des conditions difficiles, meurent de froid. Je tenais à tourner là-bas, à vivre dans les mêmes conditions que ces gens dont je raconte l’histoire. Le froid est glacial, ils n’ont pas assez de bois pour se réchauffer. Souvent, c’est fatal!», explique la scénariste qui croit en la force de la comédie pour faire passer des messages. Elle pense directement à Majdouline Idrissi, Aziz Dadas, Mohamed Choubi, Malek Akhmiss, Houda Sidki et Fadwa Taleb pour faire vivre ses personnages et raconter l’histoire d’une femme bourgeoise, snob et prétentieuse, que les événements ont poussée à partager la vie d’une famille modeste dans les montagnes du Moyen-Atlas, où les conditions de vie sont difficiles et le quotidien pénible.

Le film a été tourné à 80 kilomètres de la ville d’Azrou. «Les conditions de tournage étaient difficiles, mais je tenais à tourner sur place. Je tenais à reporter à l’image la réalité de ces Marocains que l’on a tendance à oublier. Mon but est que le film éveille chez le spectateur ses émotions et nourrisse des sentiments positifs qui vont le pousser à la réflexion et à la méditation», confie celle qui est passionnée par l’univers de Tim Burton et qui considère «La vie est belle» de Roberto Benigni comme un chef-d’oeuvre. «Le titre en arabe du film sonne mieux puisque le Maroc est certes le pays des merveilles, mais «l3ajayibe» traduit ce côté un peu surréaliste. C’est un pays de contradictions, où les différences sociales sont souvent choquantes». La belle plume du cinéma marocain pense déjà à son prochain film, qui est en cours d’écriture. Celle qui  ne s’est jamais vue cantonnée à son «simple» statut de femme a des projets plein la tête, en termes de réalisation. «Même si j’adore la comédie, je suis en train d’écrire une histoire qui pourrait être un drame. Je ne sais pas encore si je vais la transformer en comédie ou l’assumer en véritable mélodrame. L’avenir nous le dira. C’est cela, la force de l’écriture. Elle évolue constamment. Je me laisse guider par l’histoire».


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