Afrique de l’ouest : La turquie sur les traces du MAROC
Le président de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan, vient de boucler une tournée dans 4 pays de l’Afrique de l’Ouest. Ce déplacement s’est soldé par la signature de plusieurs accords bilatéraux et donne un nouveau signal fort sur les ambitions des Turcs qui apparaissent comme de redoutables concurrents pour les opérateurs marocains.
La Turquie est de retour sur le continent. En plus du sommet Afrique-Turquie qui a réuni à deux reprises dirigeants africains et turcs en 2008 et 2014 (www.leseco.ma), Recep Tayyip Erdogan a pris cette fois son bâton de pèlerin pour sillonner, à sa manière, une partie du continent africain. Du 28 février au 3 mars, le chef de l’État turc a visité quatre pays d’Afrique de l’Ouest. Accompagné d’une forte délégation officielle et de quelque 150 hommes d’affaires, le président de la Turquie a visité deux économies anglophones, à savoir le Nigeria et le Ghana, et deux francophones, la Côte d’Ivoire et la Guinée-Conakry. La «tournée» a été couronnée par la signature de plusieurs accords et mémorandums bilatéraux. En Côte d’Ivoire par exemple, neuf accords de coopération, dont deux relatifs aux investissements, ont été conclus dans ce pays qui a accueilli 100 millions de dollars des investisseurs turcs.
Enjeux
Ce déplacement d’Erdogan, aux allures d’«offensive turque», intervient quelques jours après son passage au Sénégal, visite au cours de laquelle il a été annoncé que c’est une entreprise turque qui se chargera désormais de terminer les travaux de construction du nouvel aéroport international du pays, suite au départ de Saudi Bin Laden. Si Erdogan prend le temps de se déplacer en Afrique dans ce contexte de tensions extrêmement vives à la frontière syrienne de la Turquie, c’est parce que les enjeux sont économiquement très importants pour l’ex-puissance ottomane. Bien que loin derrière les puissances occidentales, la Turquie entend pleinement tirer son épingle du jeu dans l’émergence annoncée du continent.
Déclaration de Malabo
Ce positionnement est centré sur des secteurs clés et en vogue en Afrique : biens de consommation, d’équipement, mais surtout les BTP, à travers des gains de marché dans d’importants chantiers d’infrastructures. Depuis la Déclaration de Malabo en 2014, et sur demande des chefs d’État africains, le champ d’intervention des opérateurs turcs est appelé à s’élargir à l’agriculture, à l’industrie, de même qu’au secteur minier, en plus de la promotion de l’industrie pharmaceutique. En somme, la Turquie avance à grands pas sur le continent. Si elle n’arrive pas à rattraper les grandes puissances, la «Sublime porte» s’emploie à creuser l’écart face aux nouveaux acteurs en jeu… comme le Maroc.
Et le Maroc ?
Ces dernières années, avec la poussée rapide du royaume sur le continent, on s’attend de plus en plus à un match Maroc-Turquie. Cependant, le royaume a encore un grand retard à rattraper : «les entreprises turques sont très habituées à l’export, ce qui n’est pas encore le cas des opérateurs marocains qui, en grande majorité, s’y initient», reconnaît d’emblée Hassan Sentissi, le président de l’Association marocaine des exportateurs (ASMEX). Selon lui, en plus de leur expérience, les concurrents turcs «bénéficient de nombreux avantages et des subventions» que les sociétés marocaines n’ont pas encore. D’où l’urgence, pour les entreprises nationales, de soigner leur offre exportable à l’international, notamment en direction de l’Afrique !
Chiffres clés
4
Le président Erdogan a visité 4 pays en 5 jours, à savoir la Côte d’Ivoire, le Nigeria, le Ghana et la Guinée. Plusieurs accords bilatéraux ont été signés.
150
Quelque 150 hommes d’affaires turcs ont accompagné le président Erdogan, et au moins 5 ministres.
23,4
Le montant des échanges entre la Turquie et l’Afrique a atteint 23,4 milliards de dollars en 2014.
10
Depuis l’an 2000, les échanges avec l’Afrique subsaharienne ont été multipliés par 10.
2,4
Le montant sus-cité représente 2,4% des échanges de l’Afrique avec le reste du monde.
50
La Turquie ambitionne de porter les échanges avec l’Afrique à 50 milliards de dollars en 2018.
3
Depuis 2009, la Turquie a triplé le nombre de ses ambassades en Afrique et en compte actuellement plus de 30.
33
Entre 2008 et 2016, la Turkish Airlines est passée de 4 destinations africaines à 33, dans 18 pays du continent.
25
La Turquie est le 25e pays non africain membre et actionnaire de la BAD.