Politique

Liquidation de la retraite des conseillers : la polémique est loin d’être close

Après un blocage qui a duré plusieurs semaines, la proposition de loi sur la liquidation du régime de retraite des conseillers a franchi le cap de la Commission des finances à la Chambre des représentants. Les députés ne se sont pas bousculés au portillon pour adopter ce texte qui continue de susciter des remous.

Dernière ligne droite pour la proposition de loi relative à la liquidation du régime de retraite des conseillers. Adopté lundi dernier par la Commission des finances à la Chambre basse après plusieurs tergiversations, le texte, qui continue de susciter des remous, devra bientôt franchir le cap de l’institution législative. Bien qu’il ait fait l’objet de critiques acerbes et de bras de fer par certains députés, la proposition de loi est passée en dix minutes comme une lettre à la poste par le cinquième des membres de la Commission des finances, d’après une source interne.

Sur 44 députés, uniquement neuf parlementaires ont été présents à la réunion d’adoption du texte dont cinq ont voté pour (PJD, RNI, MP et Istiqlal), trois contre (deux de l’USFP et un de la FGD) et un a marqué son abstention (PAM), selon notre source qui estime que l’absence des parlementaires de la commission en dit long sur leur position vis-à-vis du texte controversé. Il ne reste plus que la phase de la séance plénière pour entériner la proposition de loi.

À cet égard, on s’attend à des discussions animées autour de ce texte, même si la tendance générale est pour son adoption, sans amendements. Plusieurs voix au sein de la Chambre des représentants s’expriment contre la version actuelle de la proposition de loi qui a été élaborée et adoptée par les conseillers avant la fin de la session parlementaire d’automne. Seuls deux groupes parlementaires ont présenté des propositions d’amendement. Le PAM et l’USFP ont appelé à ne permettre aux conseillers de récupérer que la valeur de leurs cotisations.

S’agissant des cotisations du Parlement (l’État), il a été proposé de les transférer au Fonds spécial pour la gestion de la pandémie du coronavirus. Mais in fine, cette proposition d’amendement n’a pas été introduite au texte qui permet aux parlementaires de la Chambre des conseillers de récupérer leurs cotisations, celles de l’État ainsi que les intérêts de leurs placements.

En tout, il s’agit d’une enveloppe budgétaire de 130 MDH dont plus de 30 MDH de part patronale de l’État. Les conseillers ont opté pour un mode de calcul différent de celui qui a été adopté pour la liquidation de la retraite des représentants, car ils estiment que la situation financière de leur caisse de retraite n’est pas similaire à celle de la Chambre des représentants.

Celle-ci, qui est déjà liquidée, est déficitaire depuis 2017, alors que l’épuisement des réserves de la caisse de retraite de la deuxième Chambre n’est prévu qu’à la fin de 2023. Contrairement aux ex-députés, les anciens conseillers, eux, continuent toujours de percevoir les indemnités de retraite. Rappelons que la proposition de loi de la Chambre basse, qui a été adoptée lors de la session d’automne, vise à verser aux députés le total des montants de leurs cotisations soit 2.900 DH par mois.

Ainsi, un député ou un ancien député qui n’a jamais bénéficié de la pension parlementaire de retraite devra percevoir un montant de 174.000 DH pour un mandat de cinq ans. Si les cotisations dépassent le montant total des pensions perçues par les anciens députés, la différence sera restituée aux personnes concernées ou à leurs ayants droit.

La liquidation du régime de retraite des deux Chambres s’imposait, car il est déficitaire par nature. D’ailleurs, sa faillite était prévisible depuis 2014, date à laquelle le signal d’alarme a été déclenché. Le système aurait pu alors être sauvé si des mesures avaient été prises à temps, selon nombre de parlementaires. La réforme paramétrique aurait pu éviter le scénario de la liquidation du régime en corrigeant l’ensemble des dysfonctionnements. Les parlementaires qui bénéficient de la pension de retraite représentaient le double de ceux qui cotisaient.

La situation s’est aggravée avec la baisse du nombre des conseillers de 275 à 120 en raison des nouvelles dispositions constitutionnelles ainsi que par l’augmentation du taux de renouvellement des députés et des conseillers lors des dernières élections. Ainsi, le ratio entre le nombre de cotisants et le nombre de pensionnés s’est fortement dégradé. Même si le gouvernement aurait mis la main à la poche, en 2017, il aurait été difficile de maintenir le système.

La position des conseillers

Plusieurs parlementaires de la Chambre des conseillers ont défendu bec et ongles leur proposition de loi. En ce qui concerne le reproche relatif à la restitution des montants de cotisations versées par l’État, ils estiment que cette logique n’est pas tenable, car même les indemnités versées aux parlementaires ou leurs cotisations à la caisse de retraite proviennent de l’État.

La caisse de retraite reçoit une cotisation globale de 5.800 DH (part de l’adhérent et part de l’État) au nom de chaque parlementaire, précise-t-on. L’idée de verser une partie du budget de la caisse au Fonds anti-Covid était proposée par certains parlementaires de la Chambre des conseillers, avant de décider de répartir le montant total sur les parlementaires et les anciens conseillers. «On ne connaissait pas la véritable situation de la caisse», selon un conseiller de l’opposition qui souligne que la formule choisie permet de garantir les acquits de tous les ayants droit.

Jihane Gattioui / Les Inspirations Éco



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