Justice sociale : priorité à la relance du dialogue social
«Le dialogue social et les enjeux de l’État social», telle a été la thématique du 6e forum parlementaire international sur la justice sociale qui tenu, le 21 février, à la Chambre des conseillers. L’enjeu consiste dans la promotion d’un dialogue social fondé sur le consensus et la contractualisation.
C’est à l’initiative du Conseil économique social et environnemental (CESE) et de la Chambre des conseillers que cette nouvelle édition du forum parlementaire sur la justice sociale s’est tenue. Elle intervient dans un climat exceptionnel imposé par la crise sanitaire et ses impacts tant d’ordre social qu’économique. Les résultats des rapports et études, établis sur le sujet par le CESE, «constituent des bases solides de débats et perspectives méthodologiques et directrices, permettant d’explorer des solutions et des réponses collectives innovantes aux questions et enjeux pertinents», indique la note de cadrage de cet événement.
Cette dernière rappelle, également, l’avis émis par le CESE, intitulé «Vers une nouvelle génération de dialogue social au Maroc», et qui propose diverses solutions d’ordre procédural. Lors de cette édition, l’accent a été mis sur la modernisation du cadre législatif et institutionnel, en promulguant une loi-cadre sur le dialogue social ainsi que sur la promotion du Conseil de négociation collective en tant qu’organisme consultatif national chargé du dialogue social et de la négociation collective. Il faut dire que l’adoption d’une approche participative et consensuelle, dans le cadre d’un dialogue social tripartite ainsi que l’élaboration de la loi relative aux syndicats et de la loi organique sur le droit de grève restent parmi les principaux objectifs à réaliser par les partenaires sociaux, en 2022, année cruciale pour le parachèvement du chantier de la couverture sociale.
Parmi les pistes préconisées, la création d’un dialogue social sectoriel, national et régional, que ce soit dans le public ou dans divers secteurs économiques relevant du privé, tout comme «la promotion du dialogue social au sein de l’entreprise, accompagnée d’un renforcement de la représentation des salariés. Il s’agit, dans le même ordre d’idées, de veiller à soutenir les entreprises et les encourager à conclure des conventions collectives», indique la feuille de route conjointe du CESE et de la Chambre des conseillers. Pour rappel, le renforcement du dialogue social, en tant que mécanisme de démocratie participative, devra passer par son ouverture sur de nouveaux acteurs. Pour ce faire, la promotion de la culture du dialogue social et de la formation est plus que jamais nécessaire, selon les principales pistes dégagées lors de cette nouvelle édition du forum parlementaire sur la justice sociale.
Les principales réponses apportées
Plusieurs questions ont été débattues au cours de ce forum, en vue d’explorer les pistes et réponses pratiques aux contraintes engendrées par la crise sanitaire. Dans ce cadre, il a été notamment procédé à l’évaluation des points forts et des points d’amélioration du système actuel de dialogue social afin de «passer à un nouveau dispositif où les rôles des différents mécanismes nationaux, sectoriels et territoriaux en la matière seraient activés au niveau des unités de production». Parallèlement à cette transition, il s’agira, dans un deuxième temps, de renforcer la capacité proactive des mécanismes de médiation à travers le dialogue social, «dans un contexte marqué par l’émergence de nouveaux types de relations professionnelles et de nouvelles problématiques qui dépassent les conflits de travail classiques, tout en renforçant la demande sociétale d’accès aux droits économiques, sociaux et culturels, tant au niveau national que régional, notamment en temps de crises». Le forum a permis aussi de mettre l’accent sur la nécessité d’élargir le dialogue social afin d’inclure de nouvelles questions découlant des obligations constitutionnelles et conventionnelles du Maroc, notamment celles liées à l’égalité effective, la lutte contre la discrimination sexuelle au travail, l’élimination du travail des enfants, la garantie des conditions de travail décent pour les personnes handicapées, et l’intégration des activités informelles.
Cap sur la paix sociale
«Un dialogue social participatif et régulier s’avère nécessaire afin atteindre la stabilité et la paix sociale tout en permettant de promouvoir une croissance plus inclusive», indique la feuille de route du forum parlementaire. Ceci est d’autant plus nécessaire dans le contexte des défis actuels posés par la révolution numérique et l’impact de la pandémie ainsi que par les changements accélérés qui en résultent. Il faut rappeler que ces derniers affectent le taux et la qualité des emplois, ainsi que les conditions et l’environnement de travail. À noter, par ailleurs, que le Forum sur la justice sociale avait abordé la question, lors de sa deuxième édition en 2017, sous l’angle de l’institutionnalisation et de son importance pour la réalisation de la justice sociale et du développement durable.
«Cette dernière demeure une question aiguë, notamment dans le cadre du renforcement de la construction de l’État social et à la lumière de l’affirmation des directives Royales visant à l’adopter et l’institutionnaliser en tant que choix stratégique pour le Royaume du Maroc», indiquent les organisateurs du forum.
Par ailleurs, dans le contexte exceptionnel que connaît le monde depuis l’apparition de la pandémie, «un dialogue social régulier, fondé sur le consensus et la contractualisation, revêt une importance capitale compte tenu du taux de chômage élevé (en particulier chez les jeunes), de la faible productivité, de l’importance de l’économie informelle, des mauvaises conditions de travail, de l’insuffisance de la participation des femmes au marché de l’emploi et de la faible couverture de la protection sociale». Ce qui pousse l’ensemble des acteurs à investir dans les opportunités disponibles en vue de jeter les bases d’un dialogue social participatif régulier et d’apporter des réponses concrètes et innovantes aux obstacles qui se dressent toujours devant les partenaires sociaux.
Younes Bennajah / Les Inspirations ÉCO