Politique

Emploi : le gouvernement rebat ses cartes

Le gouvernement entend redéfinir ses priorités en matière d’emploi, en raison des répercussions de la pandémie sur le marché du travail. Bientôt, la commission ministérielle de l’emploi se réunira pour discuter les conclusions des commissions techniques. Le gouvernement compte aussi faire passer la législation de discorde ayant trait au droit de grève, à l’organisation de l’échiquier syndical et à la réforme du code du travail.

En ces temps de crise, la redéfinition des priorités en matière d’emploi s’impose, selon le gouvernement. La commission ministérielle de l’emploi, qui avait dû ajourner sa réunion programmée en février dernier à cause de la pandémie, devra bientôt plancher sur ce dossier sur la base des conclusions des réunions des commissions techniques qui ont déjà révisé les priorités. Le gouvernement brandit la carte de «force majeure» pour justifier la hausse du taux de chômage et son incapacité à honorer ses engagements en matière d’emploi. Comme en attestent les chiffres, on est encore loin du compte, alors que le mandat gouvernemental tire à sa fin. Selon les statistiques du ministère du Travail et de l’insertion professionnelle, sur la période allant de 2017 à 2019, le gouvernement a créé quelque 486.435 emplois dans le secteur privé (nombre des nouveaux déclarés à la CNSS, sans compter les cas de régularisation), et 142.572 autres postes dans le secteur public, soit un taux de réalisation de 52% de l’objectif des 1.200.000 emplois tel qu’il a été fixé par le plan «Moumkin».

Ces chiffres officiels sont pris avec des «pincettes» par les députés. Il faut dire que la polémique sur les chiffres n’est pas encore tranchée, eu égard au grand écart qui demeure posé entre les chiffres du gouvernement et ceux du Haut-commissariat au Plan en matière de création d’emplois. Pour cause, la méthode de calcul, l’angle de traitement du dossier et les indicateurs adoptés diffèrent d’une institution à l’autre. Rappelons que la stratégie gouvernementale prévoit l’insertion professionnelle de plus de 200.000 personnes par an à travers nombre de mesures (formation, incitations au profit des entreprises, optimisation de l’impact des investissements publics sur l’emploi, réforme législative…). Néanmoins, il s’avère difficile de mettre en œuvre toutes les mesures gouvernementales visant la promotion de l’emploi. Une situation qui s’est davantage compliquée en 2020 en raison de la crise sanitaire. Du coup, le plan quinquennal de promotion de l’emploi sera étendu jusqu’en 2030.

Législation controversée
Même sur le plan juridique, l’Exécutif peine à convaincre les partenaires sociaux de faire passer la législation de discorde. À ce titre, le ministre du Travail et de l’insertion professionnelle, Mohamed Amekraz, vient de s’engager devant les députés de la commission des secteurs sociaux sur le fait que ce dossier sera bientôt discuté au Parlement ; à commencer par le projet de loi organique sur le droit de grève qui est au point mort au sein de la Chambre basse depuis son transfert à l’institution législative par le gouvernement de Benkirane en 2016. De son côté, la présidente de la commission des secteurs sociaux, Saida Ait Bouali, décline toute responsabilité du Parlement au sujet du retard accusé en matière d’examen de ce texte. Les parlementaires attendent le feu vert du gouvernement pour programmer ce projet de loi organique tant redouté par la plupart des centrales syndicales qui affichent un niet catégorique quant à l’ouverture de ce dossier, bien que la loi fondamentale stipule la nécessité d’adopter cette législation.

Mohamed Amekraz se veut rassurant à ce titre, soulignant qu’il est «ouvert» aux amendements, car il est convaincu que «certaines dispositions du texte nécessitent d’être révisées, mais au sein du Parlement». Le responsable gouvernemental estime que ce projet de loi organique doit être accompagné du projet de loi sur les syndicats. Sur ce point, l’Exécutif attend toujours le feed-back des partenaires sociaux au sujet de la dernière mouture leur ayant été transmise par le département du Travail. Or, la plupart des centrales syndicales traînent les pieds car elles sont réticentes à cette législation controversée alors que le texte est très attendu par le gouvernement pour réglementer l’échiquier syndical, notamment sur le volet de la démocratie interne et celui du contrôle financier. Dans les rangs des partenaires sociaux, la division des centrales syndicales permet au gouvernement de tirer son épingle du jeu sur ce dossier. Plus que cela, l’Exécutif fait montre de son impatience.

Selon Amekraz, l’accélération de la cadence s’impose pour que cette réforme puisse, enfin, voir le jour. «On ne peut pas attendre indéfiniment… Le consensus doit se faire au sein du Parlement», précise-t-il. S’agissant du Code du travail, la réforme tant attendue par le patronat, sera bientôt entamée, en dépit de la réticence des syndicats. Mais ce chantier, comme le laisse entendre le chef du département du Travail, sera long et risque de ne pas aboutir au cours de ce mandat gouvernemental. Amekraz tient à indiquer que même les syndicats pointent du doigt certains dysfonctionnements du Code du travail qui doit être mis au goût du jour. Précisons à cet égard que c’est la mise en place de la flexibilité sur le marché du travail, comme recommandé par les partenaires économiques, qui est le plus redouté par les partenaires sociaux. Il s’agit en effet de la principale pierre d’achoppement qui retarde la révision du Code du travail. La CGEM, rappelons-le, plaide pour une flexibilité responsable en matière des relations contractuelles et pour l’adoption d’une approche visant la promotion de la compétitivité de l’entreprise. Les syndicats estiment de leur côté qu’une telle réforme ne doit pas être opérée en cette conjoncture de crise.

Où en est la couverture sociale des indépendants ?

Les «adouls» ont ouvert le bal du chantier d’activation du système de la couverture sociale au profit des indépendants et des personnes exerçant une activité libérale. Cette catégorie sera suivie par les guides touristiques et les huissiers de justice en ce mois de novembre. Actuellement, le gouvernement est en train de finaliser les décrets relatifs aux architectes et aux artistes. D’autres catégories sont dans le pipe. Il s’agit notamment des agriculteurs (1,5 million) qui vont bientôt bénéficier, à leur tour, de la couverture sociale. Les discussions avec ces professionnels sont à un stade avancé, grâce à une étude menée sur leur situation, selon le ministre du Travail et de l’Insertion professionnelle. En ce qui concerne les commerçants dont le nombre est estimé à 850.000, les discussions vont bientôt être finalisées. Le décret est attendu après l’adoption du projet de loi de Finances qui instaure la contribution professionnelle unique pour les commerçants et artisans. S’agissant des professionnels du transport, il reste à apporter quelques retouches avec le ministère de l’intérieur pour que la couverture de cette catégorie soit effective.

Jihane Gattioui / Les Inspirations Éco


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