Zone euro : incertitudes sur la croissance
La Commission européenne a encore baissé mercredi ses prévisions de croissance pour 2023 et 2024 dans la zone euro, invoquant l’inflation élevée et le resserrement de la politique monétaire qui ont eu «un impact plus fort que prévu». La croissance du PIB se limiterait ainsi à 0,6% en 2023 (-0,2 point) et 1,2% en 2024 (-0,1 point).
L’Office européen des statistiques Eurostat a confirmé mardi un recul de 0,1 point du produit intérieur brut des 20 pays partageant la monnaie unique, de juillet à septembre, en glissement trimestriel, après une stagnation sur les trois premiers mois de l’année et une progression de 0,2% au deuxième trimestre. «Les derniers indicateurs de conjoncture et les données d’enquête pour le mois d’octobre indiquent une activité économique également modérée au quatrième trimestre », souligne mercredi la Commission européenne. «Nous approchons de la fin d’une année difficile pour l’économie de l’UE. Les fortes pressions sur les prix et le resserrement monétaire nécessaire pour les contenir, ainsi que la faiblesse de la demande mondiale, ont pesé sur les ménages et les entreprises », a souligné le commissaire à l’Économie, Paolo Gentiloni.
À l’horizon 2024, «nous prévoyons une légère reprise de la croissance, à mesure que l’inflation se ralentira, avec un marché du travail qui restera solide», a-t-il ajouté, tout en soulignant la fragilité de toute prévision dans le contexte de tensions géopolitiques mondiales. «Le conflit en cours au Proche-Orient a eu jusqu’à présent un impact économique limité en dehors de la région, mais les tensions géopolitiques accrues ont encore augmenté le risque de perspectives assombries», a reconnu le commissaire italien. Bruxelles table toutefois sur un rebond de la croissance à 1,6% en 2025 dans la zone euro.
Inflation en chute libre
L’affaiblissement de la croissance en Europe est étroitement lié au combat contre l’inflation mené par la Banque centrale européenne (BCE) avec un resserrement inédit des conditions de crédit et son principal taux d’intérêt porté au niveau historiquement élevé de 4%. Or, l’institution basée à Francfort a prévenu que les risques inflationnistes étaient encore trop élevés pour envisager la moindre baisse. Les taux élevés réduisent la demande de crédit, et pèsent du même coup sur la consommation et les investissements des ménages et des entreprises. Avec la chute des prix de l’énergie, ils ont contribué à ramener l’inflation à 2,9% sur un an en octobre, selon Eurostat, contre 10,6% il y a un an.
«À mesure que le resserrement monétaire fait sentir ses effets sur l’économie, l’inflation devrait continuer à diminuer, bien qu’à un rythme plus modéré», estime la Commission européenne qui table sur «un allègement des pressions inflationnistes dans l’alimentation, les produits manufacturés et les services».
Bruxelles voit ainsi l’inflation reculer à 2,2% en 2025. Dans ce contexte, le marché du travail européen devrait rester solide. La Commission table sur un taux de chômage « globalement stable » à 6,5% cette année et l’an prochain, proche de son plus bas historique de 6,4%. Sur le front budgétaire, Bruxelles prévoit la poursuite de la réduction graduelle des déficits publics dans la zone euro, à 3,2% du PIB en 2023 et 2,8% en 2024, après 3,6% en 2022, grâce à la suppression des mesures temporaires de soutien aux ménages et aux entreprises mises en oeuvre dans le contexte de la pandémie puis de crise des prix de l’énergie. La réduction des déficits se traduirait par une baisse de taux d’endettement qui passerait de 92,5% du PIB de la zone euro en 2022, à 90,4% en 2023 et 89,7%.
Sami Nemli / Les Inspirations ÉCO