Monde

Les ONG dénoncent l’opportunisme du gouvernement espagnol

Le gouvernement espagnol a adopté une mesure permettant aux «anciens mineurs» marocains d’accéder au marché du travail agricole durant la crise. Une décision jugée opportuniste par les ONG opérant auprès de cette frange de la population.
La montagne a accouché d’une souris. C’est le constat réalisé par les ONG et organisations de défense des droits des migrants au lendemain de la publication d’un décret permettant l’embauche des migrants irréguliers dans le secteur agricole, en manque de main-d’œuvre.
Les ONG espagnoles estiment que cette mesure est une «instrumentalisation» des malheurs de cette catégorie démunie pour faire tourner l’économie du pays en cette période de crise sanitaire.
De fait, le gouvernement espagnol a publié, mardi dernier, un décret permettant aux jeunes migrants âgés entre 18 et 21 ans d’être recrutés dans le secteur agricole pour venir en aide à ce secteur qui souffre d’une pénurie de main-d’œuvre.
Le ministre de l’Agriculture Luis Planas a justifié le recours à cette mesure par la fermeture des frontières au Maroc. Le responsable a ajouté que le royaume a pris «une décision souveraine» pour lutter contre la pandémie, ce qui empêchera les ouvrières agricoles marocaines de se déplacer en Espagne pour couvrir les besoins en main-d’œuvre dans le secteur agricole.
La veille de la publication dudit décret, les ONG espagnoles se laissaient bercer par l’espoir de voir cette décision inclure également les migrants irréguliers. Or, intimidé par la droite radicale, le gouvernement espagnol a restreint la liste des bénéficiaires de cette mesure.
Outre les migrants dont le titre de séjour arrive à expiration le 30 juin, les «anciens mineurs» qui étaient placés sous la tutelle des gouvernements régionaux pourraient aussi prétendre à cette disposition. Il s’agit en grande partie de jeunes Marocains, lesquels sont arrivés mineurs en Espagne et ont été livrés à leur sort une fois la majorité atteinte.
Interpellé, Ahmed Khalifa, vice-président de l’Association marocaine pour l’intégration des migrants, peine à cacher sa déception. «Nous nous attendions à beaucoup plus. La mesure sert seulement les intérêts du gouvernement en cette période exceptionnelle», dénonce-t-il.
Pour cet acteur associatif, la situation réclame des décisions plus courageuses et non des mesurettes, réclame notre interlocuteur. De plus, ce décret pèche par son ambiguïté. Que se passera-t-il une fois levé l’état d’urgence? Quelle sera le statut de ces jeunes?
Ce sont, en somme les points qui inquiètent plusieurs associations après l’adoption de ce règlement. Par ailleurs, les acteurs associatifs regrettent que les migrants irréguliers s’affairant dans les exploitations agricoles ne bénéficient pas de cette mesure.
«C’était une occasion en or pour régulariser leur situation, d’autant plus qu’ils sont sur place et exposés à la marginalisation et l’exploitation», ajoute le responsable associatif. «Il n’existe aucune garantie pour ces jeunes. Le gouvernement a abandonné aux mains des entrepreneurs la gestion des mesures sanitaires. Ces jeunes seront exposés à des risques mais sans aucune garantie», déplore notre source.
L’Espagne estime que ces besoins en main-d’œuvre pour garantir l’approvisionnement alimentaire s’élève à 80.000 ouvriers. D’autre part, 9.727 anciens mineurs ne disposant pas d’un titre de séjour ont été recensés en 2019, contre 2.573 en possession de ce sésame. Sur un autre registre, Khalifa soulève le sort des jeunes migrants âgés entre 16 et 18 ans.
Comme nous l’avions publié, le Secrétariat d’État à la Migration avait prévu de permettre à cette catégorie d’accéder au marché du travail à partir de 16 ans. Or, l’acteur associatif estime que ce décret était l’occasion de mettre en œuvre cette décision. «Nous voulons des mesures à long terme, qui offrent une solution durable à un vrai problème et non des décisions ponctuelles pour combler un déficit en main-d’œuvre», exhorte Khalifa.

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