Culture

Cinéma: la pertinence d’Asghar Farhadi

Le cinéaste iranien le plus talentueux de sa génération est un fabricant de chefs d’œuvres. Celui qui sait contourner le système et braver les interdits donne naissance à des films ancrés dans la culture de son pays. Il est cohérent même quand il s’en éloigne. Retour sur la filmographie habitée du grand Asghar Farhadi.

«Une séparation» (2011)

Un film d’une puissance rare qui lui a valu l’Oscar du meilleur film étranger. «Une séparation», c’est l’histoire de Nader qui engage une aide-soignante pour s’occuper de son père malade quand sa femme le quitte. Il ignore alors que la jeune femme est enceinte et a accepté ce travail sans l’accord de son mari, un homme psychologiquement instable. «Une séparation» a obtenu l’Ours d’or lors du Festival de Berlin en 2011. Les interprètes ont, eux, reçu l’Ours d’argent de la meilleure interprétation, ce qui est très rare dans une compétition. Un film qui vient combattre les clichés selon Allo Ciné. À travers deux femmes très différentes, «Une séparation» dresse le portrait en creux de la femme iranienne si mal comprise en Occident. Asghar Farhadi témoigne : «Les spectateurs occidentaux ont souvent une image très déformée de la femme iranienne qu’ils voient comme soumise, confinée aux travaux domestiques et déconnectée de toute activité sociale. Il y a sans doute un certain nombre de femmes iraniennes qui vivent ainsi mais pour la plupart, elles sont engagées dans la vie sociale et avec bien plus de volontarisme que les hommes. Un film qui n’est pas inspiré de faits réels et qui lui a été inspiré par une musique chez des voisins. Le réalisateur était sur un autre scénario quand des images se sont imposées d’elles-mêmes. L’intention de Farhadi était de «susciter des interrogations». Selon lui, «c’est au spectateur de trouver des réponses». À vous de jouer !

«Le passé» (2013)

Quand il décide de faire un film en France, le réalisateur iranien donne de la profondeur à son histoire et à ses personnages. Après quatre années de séparation, Ahmad arrive à Paris depuis Téhéran, à la demande de Marie, son épouse française pour procéder aux formalités de leur divorce. Lors de son bref séjour, Ahmad découvre la relation conflictuelle que Marie entretient avec sa fille, Lucie. Les efforts d’Ahmad pour tenter d’améliorer cette relation lèveront le voile sur un secret du passé. «Le passé» fait partie de la Sélection officielle de l’édition 2013 du Festival de Cannes, en compétition. C’est la première fois qu’Asghar Farhadi, le réalisateur auréolé de prix pour «Une séparation» et «À propos d’Elly», foule le sol de la Croisette. Bérénice Bejo y a reçu le Prix d’interprétation féminine. Avec «Le passé», Asghar Farhadi reste dans ses thématiques de prédilection qu’il exploite avec les très en vogue Bérénice Bejo (The Artist) et Tahar Rahim (Un prophète) : la déchirure entre les hommes, le divorce et les conflits familiaux. C’est également la première fois que le réalisateur iranien tourne en France avec des acteurs français. Selon Allo Ciné, Asghar Farhadi s’est interrogé sur la façon dont il aurait abordé son film s’il l’avait tourné en Iran. Là-bas, selon lui, les gens s’enferment dans une sorte de mutisme et s’expriment de façon indirecte, ce qui n’est généralement pas le cas en France. Il a fallu qu’il s’adapte à cela. Ainsi, c’est le personnage iranien (Ali Mosaffa) qui fait parler les autres. Pour autant, le réalisateur n’a rien prémédité. Un film d’une rare intensité sur le poids du silence, des secrets, du passé.

«Le client» (2016)

Toujours dans sa quête de complexité de l’humain, Asghar Farhadi raconte l’histoire d’Emad et Rana, contraints de quitter leur appartement du centre de Téhéran en raison d’importants travaux menaçant l’immeuble. Ils emménagent dans un nouveau logement. Un incident en rapport avec l’ancienne locataire va bouleverser la vie du jeune couple. Farhadi avait depuis longtemps une histoire simple dans la tête et sur laquelle il prenait des notes de manière régulière. Le cinéaste s’est replongé dans ses notes au moment où il a décidé de faire un film en Iran. Il explique par ailleurs avoir également eu envie, depuis toujours, de mettre en scène un long métrage qui touche au milieu du théâtre. Le titre original du film fait écho à celui de la pièce «Mort d’un commis voyageur» d’Arthur Miller que les personnages d’Emad et Rana interprètent sur scène. Asghar Farhadi l’a lue lorsqu’il était étudiant et a été marqué par sa dimension critique vis-à-vis d’un «épisode» de l’histoire américaine dans lequel une catégorie sociale s’est retrouvée ruinée du fait d’un processus de modernisation rapide. On se souvient en 2017 que le réalisateur iranien avait boycotté la Cérémonie des Oscars après avoir vu son visa refusé par les autorités américaines. Il raflera cette année-là, encore une fois, l’Oscar du meilleur film étranger.



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