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Une nouvelle enquête parlementaire lancée

Les parlementaires de la chambre haute viennent de constituer une commission d’enquête parlementaire pour jeter la lumière sur l’importation des déchets au Maroc. Ayant suscité une vive polémique lors du précédent mandat gouvernemental, ce sujet avait poussé le ministère de tutelle à se justifier. La version officielle n’a pas convaincu les parlementaires. L’heure de vérité a sonné.

L’affaire des déchets importés d’Italie, qui avait suscité un tollé en juillet 2016, n’est pas encore close. Les parlementaires de la chambre haute entendent dépoussiérer ce dossier en enquêtant sur l’autorisation octroyée par le gouvernement pour l’importation des déchets au Maroc. Présidée par le Parti authenticité et modernité, une commission d’enquête vient tout juste d’être constituée. Elle devra livrer son verdict dans six mois. La décision de la création d’une telle commission date de plusieurs mois. Ce retard s’explique par le contexte électoral de 2016 ainsi que le blocage de la formation du gouvernement, qui ont chamboulé l’agenda de la Chambre des conseillers.

Les parlementaires devront effectuer des visites de terrain aux cimenteries concernées par l’incinération des déchets importés et auditer tous les intervenants dont le secrétariat d’État chargé du développement durable. La conseillère de la Confédération démocratique du travail (CDT), Rajae Kessab, par ailleurs membre de la commission d’enquête parlementaire sur l’importation des déchets, tient à signaler que les parlementaires refusent que le Maroc soit un dépotoir pour d’autres pays, d’autant plus qu’il s’avère que le royaume ne dispose pas de structures qui permettent d’effectuer l’incinération conformément aux standards internationaux. Les parlementaires entendent non seulement mettre l’accent sur cette fameuse affaire d’importation des déchets d’Italie mais aussi traiter le dossier dans sa globalité. Même le volet législatif est à étudier pour détecter les failles juridiques. Les opérations d’importation sont effectuées conformément aux dispositions de la loi n° 28-00 relative à la gestion des déchets et à leur élimination, notamment son article 43 qui autorise l’importation de ce type de déchets non dangereux en vue de leur recyclage ou de leur valorisation, et celles de la Convention de Bâle dont le Maroc est signataire depuis 1995 et qui interdit le transfert des déchets dangereux des pays développés vers les pays en développement. Le cadre juridique serait-il lacunaire ? En tout cas, les conseillers vont le passer au peigne fin avant de formuler leurs recommandations.

Depuis des années, quelque 450.000 tonnes de déchets par an entrent au Maroc. Rappelons qu’en 2016, la ministre de tutelle Hakima El Haité avait défendu bec et ongles son département en précisant que toutes les mesures avaient été prises pour garantir la non dangerosité de ces produits sur la santé publique. Ses arguments n’ont pas visiblement convaincu les parlementaires qui l’avaient interpellée en commission sur le sujet.

Selon la version officielle, l’autorisation d’importation et d’incinération des déchets passe par plusieurs étapes. Quelque 19 documents sont exigés conformément aux normes européennes pour que la cargaison entre sur le territoire marocain. À cela s’ajoute un document «anti-mafia» quand les déchets proviennent d’Italie. Des analyses sont effectuées par un laboratoire international pour s’assurer que les déchets ne représentent aucun danger. Et avant d’octroyer l’autorisation, des analyses doivent être faites pour s’assurer que l’opération d’incinération est conforme aux normes européennes.

Une question se pose avec insistance sur les raisons qui poussent les industriels marocains à importer les déchets plutôt que d’utiliser ceux produits au niveau national. Il faudra, selon les responsables, attendre que le Maroc dispose d’une structure nationale en matière de ramassage, de tri et de valorisation des déchets dans les décharges pour pouvoir procéder à l’incinération des déchets locaux. Cela devrait permettre de promouvoir une industrie nationale en la matière. L’objectif affiché est d’arriver en 2020 à un taux de 50% des déchets marocains utilisés dans la production de l’énergie. Dans le cadre de la stratégie nationale de développement durable, le développement d’une économie circulaire est érigé en priorité. Des filières de valorisation de déchets sont mises en place et d’autres sont en cours de développement par les opérateurs privés en partenariat avec certains départements ministériels. Mais encore faut-il s’assurer que le secteur privé soit doté des équipements nécessaires pour éviter les répercussions négatives des opérations d’incinération non contrôlées ou non conformes aux standards internationaux sur l’environnement et la santé des citoyens. Les industriels du ciment sont appelés à mettre à niveau leurs installations d’incinération afin de pouvoir traiter les RDF (combustibles solides de récupération) conformément aux lois en vigueur et aux normes européennes. Les conclusions de la commission d’enquête parlementaire sont très attendues par l’opinion publique marocaine pour confirmer ou infirmer la version officielle. Mais encore faut-il que les recommandations parlementaires ne restent pas lettre morte, à l’instar de celles d’autres commissions d’enquête.


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