Tribune : Horizon Press Group, une aventure qui a du sens
Samir Chaouki
Président fondateur
Le 15 novembre 2009, à 15 heures, l’effervescence était à son extrême dans la rédaction de notre nouveau quotidien «Les Échos quotidien». Et pour cause, les équipes s’affairaient sur le bouclage du premier numéro du journal, dont la Une portait sur le Projet de loi de finances 2010 avec la photo de Salaheddine Mezouar, ministre de l’Économie et des Finances, au gouvernement Abbas El Fassi.
Un nouveau quotidien et une nouvelle aventure dans un environnement médiatique économiquement tendu. Je me rappelle qu’un confrère, que j’apprécie et je respecte, avait qualifié le projet de «journal mort-né», prédisant un sombre sort à notre nouveau-né ! Le temps lui a montré qu’il avait été dupé par le son d’une cloche aphone. Il s’en est excusé après. Les Échos quotidien, porté par la société Horizon Press, qui deviendra plus tard un groupe multi-médias, est le fruit d’une complicité entre deux hommes qui ont mis sur les rails cette locomotive en cet été 2009, mon cher ami Moulay Hafid Elalamy (MHE), en tant que monteur de l’architecture financière et moi-même. Une aventure inoubliable ! Tout a commencé par un entretien téléphonique, lorsque j’appelais MHE pour lui demander de se rencontrer pour pouvoir lui soumettre une proposition. Quelle ne fut pas ma surprise quand il m’a répondu, avec son ton marrakchi : «C’est pour lancer un journal, n’est-ce pas ? Tu sais, je ne suis pas intéressé par la presse mais je le ferai avec toi. Passe demain, on passera en revue les détails». Le reste ne fut que formalité. Dès que l’information a commencé à circuler, un air de résistance s’est installé dans la sphère du business des médias, à telle enseigne qu’on m’a sommé de monter ce projet avec d’autres groupes économiques au prix de plusieurs avantages ! Tentative ridicule, mesquine et bien sûr vaine.
Par ailleurs, la relation entre les actionnaires et l’équipe dirigeante était des plus professionnelles avec une muraille de Chine dont les administrateurs tenaient à préserver la solidité, tout en responsabilisant les dirigeants sur le contenu et la ligne éditoriale.
Le 16 novembre 2009, Les Échos quotidien voit officiellement le jour, avec une équipe forte de la maturité de ses cadres et du dynamisme de ses jeunes. Un début non sans difficultés, puisque ce fut le premier journal à être boycotté par certains annonceurs dès son lancement. Une pression qui n’a servi qu’à renforcer notre volonté de réussir.
D’ailleurs, nous distinguions, par conviction, le volet du contenu de celui lié aux relations commerciales. C’est à ce titre que les groupes économiques ayant décrété un boycott non annoncé bénéficiaient de la même couverture médiatique dont faisaient l’objet les autres, avec les mêmes exigences de professionnalisme et de neutralité. Au bout de la première année d’existence du journal, ces résistances commençaient à se relâcher l’une après l’autre, de la manière la plus naturelle.
Je me rappelle que certains dirigeants de ces entités avaient soufflé, après coup, qu’ils appréciaient la qualité de traitement de l’information relative à leurs groupes en dépit de l’inexistence de rapports commerciaux ! Il ne fut pas évident d’expliquer qu’il s’agissait de deux choses distinctes.
Fin 2010, on nous intentait notre premier (et dernier) procès pour «diffamation». Nous étions pourtant très regardants sur les règles d’éthique journalistique. Un imposant holding s’estimait au-dessus de la critique grâce à sa générosité publicitaire ! Il réclamait donc des dommages et intérêts de 20 millions de dirhams, rien que cela ! La première audience au tribunal de première instance coïncidait avec l’ambiance délétère du 20 février 2011. Et comme des centaines de clients ayant subi un préjudice suite à leurs transactions avec ce groupe avaient organisé un sit-in ce jour devant le tribunal avec des banderoles, drapeaux…, ce groupe a rapidement décidé de retirer sa plainte par souci de discrétion.
En 2012, une surprise d’un tout autre genre nous tombait dessus. Le groupe français «Les Echos» nous faisait parvenir, par le biais de ses avocats, une mise en demeure pour utilisation d’un label (Les Echos) protégé au niveau de la Chambre internationale de la propriété intellectuelle basée en Suisse. Nous avons eu beau expliquer que les audiences étaient différentes et que notre journal est exclusivement national, le groupe français avait un autre argument. Nous venions de lancer notre journal en ligne www.lesechosquotidien.ma et, selon le média français, notre site détournait une partie de ses internautes.
Finalement, ce fut un mal pour un bien. Nous décidons donc, en 2013, de changer la dénomination du quotidien. Après de longs mois de réflexion, d’ateliers, d’analyses, Les Inspirations ÉCO arrivait dans les kiosques avec une volonté ferme de renforcer le positionnement de ce quotidien dans le segment de la presse économique et financière. Un nouveau cap était ainsi pris, et sur le plan du contenu très convoité par la sphère corporate, et sur le volume publicitaire qui a suivi ce changement.
La même année, MHE est nommé ministre de l’Industrie et du Commerce et quitte le conseil d’administration. IL ne manquera pas de jouer de son ton taquin et de me lancer que nous pouvions critiquer son ministère comme bon nous semblait, «mais si vous écrivez des contre-vérités, on vous intente un procès».
Au cours des années qui suivirent, l’entreprise s’est lancée dans une stratégie de diversification et s’est érigée en groupe de presse multicanal. Au-delà du quotidien économique, du site d’informations générales, de la web tv arabophone Horizon TV, et des autres formats éditoriaux développés, nous gardons toujours en nous la fierté d’avoir été félicités par S.M le Roi Mohammed VI pour notre coup d’essai dans le domaine de l’édition de beaux livres. La lettre royale reçue pour le livre publié à l’occasion des 15 années de règne de SM le Roi Mohammed VI, traduit un an plus tard en anglais, était une première dans le secteur des médias !
Par ailleurs, dans le même élan de diversification, notre expérience inédite La Caravane des régions fut un franc succès, tout comme le livre blanc de la régionalisation publié à son issue. C’est dire que Horizon Press Group, mené par son vaisseau amiral Les Inspirations ÉCO a su s’imposer comme titre de référence dans la presse écrite spécialisée.
Une posture qu’il va encore consolider en développant une formule d’abonnement digital qui va rapidement positionner le support média comme leader en la matière avec pas moins de 4.100 abonnements (le 2e en Afrique après un journal sud-africain). C’est donc le cœur rempli de fierté que je passai le flambeau en 2019, lorsque je décidai de me retirer de la gestion pour des raisons personnelles. En guise de plan de continuité, le Conseil d’administration décide de s’allier au Groupe Crossword par une fusion-absorption portée par Horizon Press Group.
En dépit d’une conjoncture défavorable marquée par le Covid-19, la nouvelle direction a pu relever les défis, surmonter les contraintes et aller dans le sens des objectifs arrêtés par le Conseil d’administration, dont je suis toujours membre.
Aujourd’hui, 15 années après son lancement, Horizon Press Group dispose de son propre siège et s’appuie sur un quotidien économique de référence, trois sites d’information francophones, trois sites d’information arabophones, une web TV en plus de la plateforme L’infomédiaire. Les ambitions du groupe ne sont sûrement pas près de s’arrêter là.
Plusieurs projets de croissance sont dans les tiroirs et verront le jour probablement avant le 20e anniversaire. Toute l’équipe sur place, dirigeants, journalistes, techniciens, administratifs, commerciaux … disposent de tous les atouts pour réussir ces challenges, avec le soutien indéfectible du Conseil d’administration et des administrateurs.
Samir Chaouki / Les Inspirations ÉCO