Secteur de l’eau potable et assainissement liquide : 30,8 MMDH de business à se faire d’ici 2026 !
Sollicité par la Fédération des industries métallurgiques, mécaniques et électromécaniques (FIMME) afin de s’enquérir des opportunités de business dans le secteur de l’eau potable et l’assainissement liquide, l’ONEE-Branche eau détaille les grands axes de son programme d’investissement 2022-2026.
Y a-t-il du business à faire dans le secteur de l’eau potable et l’assainissement liquide, dans les années à venir, pour les professionnels de la Fédération des industries métallurgiques, mécaniques et électromécaniques (FIMME) ? Pour en savoir un peu plus, ces derniers ont approché l’ONEE-Branche eau afin de s’enquérir sur les grands axes de son programme d’investissement 2022-2026. Ils ne pouvaient pas trouver meilleur interlocuteur que l’organisme chargé de la planification de l’approvisionnement en eau potable du Royaume, et chargé de la programmation des investissements relatifs à l’eau potable et l’assainissement liquide.
Comme le souligne Zineb Sbai, chef de la division programmation et suivi des investissements de l’ONEE-Branche eau, avec une batterie de 1.800 puits et forages, 94 stations de traitement d’eau dont 9 de dessalement et 11 stations de déminéralisation, «les installations sont suffisantes pour assurer l’alimentation en eau potable» des Marocains.
Cependant, l’office a élaboré un programme d’investissement découlant de son processus de planification, en vue d’assurer l’adéquation entre l’offre et la demande en eau potable des différentes localités et de diversifier les ressources hydriques, tout en assurant la continuité du service public dans les meilleures conditions de qualité et de coût. Mais aussi, en adéquation avec le Programme national pour l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation 2020-2027 qui, par ailleurs, constitue la première tranche du Plan national de l’eau (PNE) 2020-2050. Soulignons que plusieurs objectifs sont assignés à ce programme d’investissement, entre autres, contribuer à la préservation des ressources et lutter contre le gaspillage, retarder au maximum les investissements dans les projets de production très onéreux, ou encore limiter l’accroissement de la consommation énergétique des installations. À ce titre, il est prévu d’investir 30,8 milliards de dirhams (MMDH) sur la période 2022-2026 dans le secteur de l’eau potable et l’assainissement liquide.
Du business à se faire dans la production et le transport de l’eau potable ainsi que dans l’amélioration des performances
Ce montant est ventilé comme suit : 14,9 MMDH pour la production et le transport, 3,9 MMDH au profit de l’amélioration des performances, 7,8 MMDH pour la généralisation de l’accès à l’eau potable (AEP) dans le monde rural, et 4,2 MMDH pour l’assainissement liquide.
Soulignons que dans ce budget, 4,3 MMDH sont prévus pour être réalisés cette année. En termes de répartition sur les 12 régions du Royaume, pour une meilleure visibilité des investissements, il apparaît que le gros des investissements est affecté aux Régions de l’Oriental (17%), Grand Casablanca-Settat (12%), Fès-Meknès (12%) et Tanger-Tétouan-Al Hoceima (11%) en raison, principalement, de la construction des stations de dessalement qui y sont prévues. Ces investissements devraient contribuer à un certain nombre de points d’amélioration de performance.
À commencer par un débit additionnel de 15,8 m3/s dont 50% par dessalement. «Ils vont permettre de poser plus de 3.400 km de conduites d’adduction et de distribution, d’arriver à un rendement des conduites d’adduction de 96,4% et de 76% en termes de rendement des conduites de distribution. Ces investissements vont permettre également d’atteindre un taux d’accès de 99,3% à l’eau potable», explique Zineb Sbai.
Bientôt un peu plus d’eau non conventionnelle dans nos robinets
Vu la conjoncture actuelle, la stratégie du Royaume est de s’orienter un peu plus vers les eaux non conventionnelles. Entendez ainsi l’eau issue de processus de dessalement, de déminéralisation, ou de traitements spécifiques variés. À ce titre, il est prévu d’engager les travaux de plusieurs projets dans les prochaines années. Si à Casablanca, le projet de dessalement d’eau de mer est déjà engagé en mode PPP, les travaux du transport (conduite) ne le sont pas encore. Affichant un linéaire de 76,5 km pour un coût prévisionnel de 1,8 MMDH pour la première tranche, ces travaux sont prévus d’être engagés en 2023.
À Laayoune, par exemple, la station de dessalement d’eau de mer a été mise en service dernièrement en 2022, grâce au forage côtier qui l’alimente en eau brute. Cependant, il est prévu d’engager en 2023 des travaux de prise d’eau de mer pour un coût de 400 MDH. «C’est presque 2,2 km à l’intérieur de l’océan pour un débit de 2.000 litres/seconde », explique l’experte de l’ONEE.
Un contexte hydraulique assez spécial
Il faut dire que les efforts consentis par l’Office se font dans un contexte hydraulique assez spécial marqué par une forte variabilité spatiale et interannuelle des ressources en eau à travers le territoire marocain, avec, notamment, 51% des ressources en eau qui se trouvent concentrées dans le Nord du Royaume, principalement dans les bassins de Sebou et Loukkos, qui représentent à peu près 7,4% de la superficie totale du Maroc. Les 92,4% restants du territoire se partagent 49% des ressources en eau.
À cela s’ajoute une raréfaction accentuée de l’eau et de la baisse des apports, de 30% en moyenne à l’échelle nationale, en comparant les périodes 1945-1980 et 1980-2018. Ces quatre dernières années, ce phénomène de baisse des apports d’eau s’est davantage accentué pour atteindre 50%, et plus particulièrement cette année 2022 qui a connu une chute de 85%. Le secteur de l’eau connaît également un problème de surexploitation des nappes souterraines.
Comme l’explique Zineb Sbai, «le rapport du Plan national de l’eau (PNE) fait ressortir un volume exploitable de 4 milliards de mètre cubes (m3). Mais malheureusement, du fait de cette surexploitation, le volume prélevé, de 5,1 milliards de m3, dépasse le volume exploitable». L’autre problème est celui du gaspillage d’eau dû aux faibles rendements de certaines installations. Il s’agit de celles relatives à l’irrigation pour l’agriculture et l’eau potable.
À titre d’illustration, pour ce qui est de l’eau potable, les installations affichent «presque 24% de perte moyenne d’eau au niveau de la distribution et un peu moins de 5% au niveau des adductions de production. Pour l’irrigation, les installations affichent une moyenne de 30% de perte d’eau». Et ce, sans compter le problème d’envasement des barrages, qui réduit le potentiel hydrique et impacte la disponibilité des ressources, tout en sachant qu’il y a une forte dépendance aux ressources en eaux superficielles, qui atteint les 70%. Le faible recours aux eaux non conventionnelles vient aussi complexifier la donne. En 2021, à peine 2,4% de l’eau produite par l’ONEE est non conventionnelle.
Ce qui explique la forte ambition d’inverser cette courbe, en recourant de plus en plus au dessalement, à la déminéralisation et aux traitements spécifiques. Et cela n’est pas sans conséquences, puisque l’Office se retrouve avec des coûts de développement en forte croissance, liés aux nouvelles technologies en jeu, mais aussi à l’éloignement des ressources en eau des zones de consommation. Toutes ces problématiques sont exacerbées par l’augmentation accrue des besoins en eau potable, une tendance liée à la croissance démographique, au changement des habitudes des populations, mais aussi au développement socio- économique, industriel et touristique important que connaît le Royaume.
Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO