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Réserves de change : les transferts MRE tiennent la barre

A 93,7 milliards de dirhams en 2021, les envois des fonds des MRE constituent la première source en devises du pays reléguant le tourisme loin derrière, depuis deux ans. A noter la bagarre sans merci que se livrent les groupes BCP et Attijariwafa Bank sur ce marché. 

Sur les 342 milliards de réserves de change attendues cette année dans les coffres de la banque centrale, les transferts des Marocains résidant à l’étranger (MRE) ou Marocains du Monde – selon la nomenclature BCP, à 87,3 milliards de dirhams – devraient être encore la locomotive de la capacité du pays à financer ses engagements extérieurs et le déficit structurel de sa balance commerciale.

L’argent transféré au Maroc par les 5 millions de MRE représente 25% des avoirs officiels de réserve du pays, réserves d’or comprises. C’est de loin, aujourd’hui, la première source en devises du Royaume après la bascule intervenue en 2020 suite à la chute de revenus du tourisme entraînée par l’arrêt de l’activité due à la pandémie du Covid-19.

Pendant que les recettes en devise du tourisme fondaient, les envois de fonds par les MRE avaient montré une étonnante résilience qui avait surpris Bank Al-Maghrib : 68 milliards de DH en 2020 et 93 milliards l’année suivante au point que son gouverneur s’était engagé à décrypter ce «miracle» en questionnant les banquiers. Une des raisons de cette résilience tient au rôle d’amortisseur social que jouent les transferts des MRE. Sur 100 dirhams envoyés au Maroc, 80% sont destinés à l’assistance familiale.

Au plus fort des restrictions liées à la pandémie, il y a eu de la part de Marocains du monde un réflexe de plus de solidarité envers leurs familles restées au Maroc, confie un banquier qui se dit «avoir été surpris par l’explosion de ses objectifs» dans un contexte de ralentissement économique dans les traditionnels foyers de la diaspora marocaine en Europe.

Jusqu’en 2019, le tourisme tenait les transferts de Marocains du monde à bonne distance par un écart moyen de 1,5 à 4 milliards au cours des quinze dernières années à l’exception du mano a mano relevé en 2011 (voir graphiques). Et encore, cet écart serait sans doute moins important car il est un peu biaisé par l’intégration des transactions de change manuel réalisées au Maroc dans les recettes touristiques, que le client soit non-résident ou pas.

Avec celui de l’emploi, l’argument de pourvoyeur en devises du pays fut longtemps mis en avant par les opérateurs du tourisme (surtout de l’hôtellerie) pour étayer la demande de mesures d’incitation du secteur auprès des pouvoirs publics.

Mais la montée en puissance d’autres métiers mondiaux du Maroc à l’export, notamment l’automobile et les phosphates, a fini par ramollir l’argument de contributeur aux réserves en devises. Et sur le plan fiscal, le ministère des Finances, sous le mandat de Benchaâboun, releva que le tourisme était un «petit» contributeur aux recettes du Trésor au regard du paquet de dégrèvements d’impôt dont il bénéficiait.

En conséquence, il avait été décidé de suspendre toute nouvelle dépense fiscale ciblant l’industrie du tourisme, au grand dam de la profession.

Selon nos informations, cette doctrine ne devrait pas changer. Au-delà de leur rôle social, les fonds des MRE constituent une ressource stratégique pour le secteur bancaire dont ils représentent 40% des dépôts. Opérateur «historique» sur ce marché, le groupe BCP garde le lead avec 100 milliards de dirhams de dépôts dans les comptes du million de clients MRE qu’il revendique (voir notre édition du mardi 28 juin 2022).

Mais la concurrence se fait pressante et l’«avantage du pionnier» est en train de fondre petit à petit. Chez AWB (Attijariwafa bank), la diaspora marocaine est au cœur de sa stratégie de développement, souligne expressément la banque dans le Document d’enregistrement universel 2021 à l’intention des actionnaires.

Le groupe affirme se positionner comme «un acteur de référence en matière d’«Immigrant Banking» Ainsi, il a mis en place un modèle économique lui permettant de servir et d’accompagner le client au Maroc et dans son pays de résidence. Les résultats sont plutôt probants : en 2021, les dépôts des MRE chez Attijariwafa Bank s’élevaient à 47 milliards de dirhams pour un peu plus de 800.000 clients.

Tirant profit de la réussite de son modèle avec les MRE en Europe, AWB a dupliqué le même schéma envers les diasporas africaines provenant des pays où le groupe est présent : Tunisiens, Sénégalais, Ivoiriens et Maliens vivant en Europe relèvent aujourd’hui d’un marché stratégique pour la banque.

L’Espagne, nouveau terrain de compétition

Avec une diaspora marocaine de près de 700.000 personnes, l’Espagne est un nouveau champ de bataille des banques marocaines pour capter les transferts et l’épargne des MRE. Attijariwafa Bank s’appuie sur le partenariat avec son actionnaire, le groupe Santander.

Le partenariat couvre, entre autres, un adossement d’Attijariwafa Bank au groupe Santander, pour renforcer son positionnement auprès de la clientèle des Marocains résidant chez notre voisin ibérique. Les actions portent principalement sur le développement d’une offre diversifiée en faveur des MRE, dans les domaines du transfert d’argent, du crédit à la consommation, de la monétique et de la prévoyance.

Sur le plan commercial, cela se traduit par l’implantation de bureaux AWB dédiés aux MRE, dans une partie du réseau du groupe Santander.

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO

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