Éco-Business

Papier : L’ADPAC en veut à Med Paper

Les importateurs et transformateurs de papier ont publiquement exprimé leur mécontentement suite à l’instauration de nouvelles mesures protectionnistes en faveur de Med Paper, qu’ils qualifient d’écocides pour leurs activités.

L’Association marocaine des importateurs de papiers et cartons (ADPAC) sont mécontents, et ils le font savoir. Réunis jeudi 16 juin à Casablanca au siège de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), pour échanger sur les principales entraves à la pérennité de leurs activités, les professionnels de l’impression et de la transformation de papier ont tous pointé du doigt les mesures protectionnistes prises en faveur du papetier national Med Paper, filiale de CDG Développement. Ces mesures consistent en la mise en place d’entraves supplémentaires à l’importation de papier en bobine et en rame, conformément aux dispositions prévues par l’article 78 de la loi N°15-09 relative aux mesures de défense commerciale. Effective depuis quelques mois, cette mesure prévoit un droit additionnel ad valorem de 25% qui sera appliqué sur les importations de papiers et de cartons de toutes natures et grammages, à l’exception des produits destinés à l’édition. Le bouclier couvrira une période de 5 ans, et protégera ainsi la rentabilité de Med Paper en lui octroyant un avantage comparatif inouï: celui de vendre à plus de 25% moins cher. Or, si cette mesure redonne le sourire au papetier national, cela est loin d’être le cas chez les importateurs, qui fustigent ce qu’ils considèrent comme étant un «système d’assistanat qui ne règle nullement le problème».

Mission de sauvetage
Plusieurs intervenants se sont accordés à dire que le principal problème de Med Paper ne résidait pas dans la concurrence faite à ses produits par des sociétés étrangères, mais plutôt dans l’orientation choisie par le management qui «s’entête à produire du papier qui ne nous satisfait pas». Et de poursuivre: «la société s’engage sur des délais et sur une qualité que son niveau technique actuel ne permet pourtant pas de garantir». En effet, les importateurs ont, tour à tour, fait part de leur insatisfaction totale vis-à-vis du business model suivi par Med Paper dont les défaillances impactent significativement leurs activités puisque les engagements pris avec leurs clients dépendent directement de la capacité de Med Paper à tenir ses propres promesses, ce qui n’est jamais le cas, selon les membres de l’ADPAC.

Aussi, toujours selon les plaignants, le grammage n’est presque jamais respecté, en comparaison avec la qualité des produits importés qui, en plus de respecter les exigences techniques, protégeraient l’outil matériel de l’usure, au moment où les produits Med Paper auraient tendance à la précipiter. Enfin, l’ADPAC a tenu à préciser que le but de ces contestations (qui devraient déboucher sur l’émission d’une requête d’annulation à l’attention du ministère de tutelle) ne visent pas l’étouffement du papetier national, mais versent plutôt dans la réorganisation du secteur. Cette réorganisation, l’ADPAC la veut efficace et optimisée, axée sur les forces de chacune des parties prenantes. Pour Med Paper, cela se traduirait par l’abandon des activités dans lesquelles la société a du mal à percer, et se focaliser sur les produits dits «particuliers», difficilement trouvables même à l’import. Pour les importateurs, il s’agit d’une mission de sauvetage d’un sous-secteur, celui de l’impression, qui emploie 100.000 personnes au minimum.

Rappelons que le ministère délégué chargé du Commerce extérieur avait organisé, le 7 avril dernier, une audition publique dans le cadre de l’enquête de sauvegarde sur les importations de papier en bobine et en rame. L’audition avait alors invité les importateurs et transformateurs à participer aux échanges afin que leurs arguments soient exposés, expliqués et pris en considération lors des délibérations devant mener à une décision. À l’origine de l’initiative, on retrouve une plainte déposée par Med Paper.

Un bouclier pour 5 ans
Les faits remontent au 27 février 2015, date à laquelle la société avait sollicité des mesures de sauvegarde visant à protéger la production nationale de la concurrence étrangère. Et par production nationale, Med Paper se référait à la sienne puisqu’il est l’unique industriel marocain à confectionner le produit, objet de la discorde. La plainte avait été jugée recevable par le département chargé du Commerce extérieur, et a donné lieu, le 9 juin 2015, à l’ouverture officielle d’une enquête devant définir le caractère anticoncurrentiel des actions entreprises par les exportateurs des deux produits visés, en l’occurrence le papier en bobine et en rame.

L’autorité ministérielle a ainsi qualifié de crédibles les arguments de Med Paper, se basant sur les données présentées à la fois par la société plaignante et par l’Office des changes, qui confirme dans ses comptes rendus l’appréciation sectorielle faite par le papetier national. Un an plus tard, soit le 9 juin 2016, Med Paper obtient gain de cause, et se voit doté d’un bouclier pour 5 ans, ce que les professionnels de l’ADPAC digèrent de plus en plus mal. Med Paper attribue toutefois ses contre-performances, devenues chroniques depuis quelques années, à la réduction substantielle de ses parts de marché, ses capacités de production, son chiffre d’affaires et ses marges de profitabilité. Le tout attribuable, selon Med Paper, à la montée incontrôlée des importations depuis 2010.

Et force est de constater que ces importations ont bel et bien augmenté: au premier semestre de 2015, elles étaient de 100% plus importantes que leur niveau observé à la même période de 2014. Bref, la discorde promet de perdurer.


whatsapp Recevez les actualités économiques récentes sur votre WhatsApp

Évolution des prix des fruits et légumes à Casablanca



Rejoignez LesEco.ma et recevez nos newsletters



Bouton retour en haut de la page