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Mobilité durable au Maroc : les clés d’une transition réussie

Le Maroc est confronté à des défis environnementaux, économiques et sociaux qui nécessitent une transition vers une mobilité plus durable et accessible à tous les citoyens. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) plaide en faveur d’une rupture dans les paradigmes de mobilité, afin de promouvoir un modèle écologiquement vertueux, socialement inclusif et créateur d’opportunités économiques. Détails.

Dans un monde confronté aux défis environnementaux, économiques et sociaux, le Maroc doit s’efforcer de développer une mobilité plus durable et accessible à tous les citoyens. C’est l’essence du plaidoyer du Conseil économique, social et environnemental (CESE), lors du Forum de la mobilité durable. Grosso modo, le plaidoyer du CESE appelle à une véritable rupture dans les paradigmes de mobilité au Maroc, vers un modèle plus vertueux écologiquement, plus inclusif socialement et créateur d’opportunités économiques. Une transition complexe mais indispensable pour relever les défis actuels et futurs.

«Les besoins en mobilité s’accroissent, entraînant davantage d’externalités négatives», souligne Driss Ilali, expert, s’exprimant au nom du CESE.

Il cite les émissions de CO2 et de particules fines générées par les transports, principaux responsables du réchauffement climatique et de la pollution locale. Avec une croissance annuelle de la demande énergétique de plus de 5% dans le secteur des transports, représentant 40% de l’énergie finale nationale (dont 90% d’origine fossile importée), l’urgence de repenser la mobilité au Maroc est patente. Bien que des progrès aient été réalisés, avec le développement d’infrastructures modernes comme le TGV et des réseaux de tramways, Ilali insiste sur les défis persistants : «Le transport des personnes et de leurs biens connaît une demande exponentielle, alors que son modèle d’organisation a atteint ses limites, lié à des politiques centrées sur l’infrastructure routière et la voiture individuelle».

Parmi les carences identifiées, l’offre insuffisante et peu accessible des transports en commun, les inégalités d’accès selon les territoires, et la précarité de la mobilité rurale. «60% des citoyens se déplacent à pied», illustre l’expert, appelant à une «transition écologique cohérente» vers un nouveau modèle, plus équitable, efficient et respectueux de l’environnement.

Le CESE recommande ainsi d’améliorer l’accessibilité aux modes durables, en développant des infrastructures rurales et en réduisant les fractures spatiales. «Encourager des solutions alternatives aux véhicules personnels», plaide Ilali, citant les bus à haut niveau de service, le covoiturage et des «tramways de nouvelle génération, plus légers et agiles». À court terme, il préconise de privilégier «la motocyclette électrique produite localement» dans des villes pilotes.

Repenser la gouvernance du transport
D’un point de vue économique, ces propositions répondent à plusieurs enjeux cruciaux. En favorisant les transports collectifs et l’électromobilité, elles permettraient de réduire la dépendance aux importations d’énergie fossile, tout en créant des opportunités industrielles locales. Le développement d’une filière marocaine de véhicules électriques légers pourrait ainsi constituer un moteur de croissance durable. Sur le plan social, l’amélioration de l’accès aux transports publics dans les zones rurales et périurbaines défavorisées faciliterait l’inclusion économique de ces populations, leur donnant davantage d’opportunités d’emploi et de services.

Enfin, d’un point de vue environnemental, la transition vers des modes de déplacement plus verts permettrait au Maroc de s’inscrire dans une trajectoire bas-carbone, limitant son empreinte climatique et ses émissions de polluants locaux. Cependant, la mise en œuvre d’un tel virage nécessitera d’importants investissements publics et privés, ainsi qu’une gouvernance repensée des transports, comme le suggère la recommandation de «réformer le système des taxis».

Vers un modèle de mobilité durable et accessible
La mobilité durable représente un défi de taille pour le Maroc, mais également une opportunité économique majeure à saisir. Comme le souligne Driss Ilali, «il faudrait reconsidérer la mobilité au-delà de sa dimension énergétique et écologique en tant que secteur créateur de richesses et d’emplois».

Au cœur des enjeux se trouve la nécessité d’une approche holistique, mêlant réformes réglementaires, investissements infrastructurels et incitations à l’innovation technologique. Comme le souligne l’expert, «mettre à niveau le code de la route, de la sécurité routière d’une manière compatible des principes de la durabilité. Intégrer des besoins en matière de mobilité aux exigences urbanistiques».

Sur le plan réglementaire, l’adoption de normes strictes en matière d’émissions de gaz à effet de serre et la mise en place d’une «comptabilité d’empreintes carbone» constitueraient un signal fort aux acteurs économiques. Parallèlement, repenser l’aménagement urbain avec une priorité à la mobilité douce (transports en commun, pistes cyclables, etc.) est indispensable.

Les investissements dans les infrastructures de transport ferroviaire, identifié comme «un créneau intéressant» par Ilali, permettraient de réduire la dépendance au transport routier et de développer une offre de mobilité à la fois durable et compétitive. Mais la transition ne pourra se faire sans l’appui d’un écosystème innovant, porté notamment par les startups «proposant des solutions alimentées par le numérique et l’intelligence artificielle». De nouvelles formations aux «métiers de la mobilité durable» seront également nécessaires pour accompagner ces mutations.

Sur le plan économique, cette transition représente un formidable moteur de croissance verte et d’emplois. Le développement d’une filière nationale de recyclage des véhicules et batteries usagés, riches en matériaux précieux comme les terres rares, en est l’illustration. Comme le note le membre du CESE, «ces déchets, perçus comme déchets aujourd’hui, sont aussi des richesses en matière de récupération».

Pourquoi ne pas créer une «commission interministérielle» chapeautant cette transition complexe ?

La mobilité durable est un puissant levier de diversification économique, de réduction des importations énergétiques, mais aussi d’attractivité industrielle à l’international pour le Maroc. A condition de mettre en œuvre les réformes adéquates. «L’opérationnalisation des recommandations nécessite l’adhésion de l’ensemble des acteurs», prévient Ilali, plaidant pour la création d’une «commission interministérielle» chapeautant cette transition complexe. Une coordination renforcée entre autorités nationales, régions, communes et partenaires sociaux sera en effet indispensable.

Bilal Cherraji / Les Inspirations ÉCO


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