Maroc-Espagne : La coopération sur de nouveaux rails
Le chef de gouvernement espagnol reconduit devrait prendre part à la COP22 à Marrakech le 15 novembre. L’occasion pour les deux chefs de gouvernements de renouveler leurs ambitions de coopération et d’entente.
Le chef de gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, sera parmi les convives de la conférence de l’ONU sur les changements climatiques (COP22) qui se tiendra à Marrakech du 7 au 18 novembre. Selon l’agenda du président de l’Exécutif espagnol, Rajoy se rendra à Marrakech le 15 novembre pour prendre part à cette messe internationale. De la sorte, Rajoy consolidera cette tradition, initiée par l’ex-chef du gouvernement, le socialiste Felipe Gonzalez, durant laquelle le chef du gouvernement espagnol effectue sa première visite au Maroc. En répondant présent à l’invitation du Maroc, Rajoy démontre, s’il le faut encore, la symbiose entre les deux pays sur le plan institutionnel. Le conservateur espagnol était parmi les premiers leaders internationaux à féliciter Abdelilah Benkirane et son parti pour leur victoire aux élections législatives.
Dans le communiqué émis à cette occasion, le chef de gouvernement espagnol a mis l’accent sur le fait que «les relations bilatérales ont été marquées, durant ces cinq dernières années, par une coopération loyale et responsable dont se réjouissent les deux gouvernements». De même, Rajoy a insisté sur le fait que, durant les prochaines années, il sera question d’approfondir cette relation et a fait part de sa «bonne volonté» pour atteindre cet objectif. Mais quels sont ces dossiers prioritaires pour les deux voisins ? D’emblée, figure le volet économique. De fait, l’Espagne aspire à davantage d’égards de la part du milieu économique marocain. C’est dans ce sens que, durant une visite effectuée le mois dernier à Rabat, le secrétaire d’État espagnol aux Affaires extérieures n’avait pas hésité à confier les ambitions d’affaires de son pays sous le ciel marocain.
Passer à la vitesse supérieure
Ignacio Ibañez avait déclaré, devant son homologue Mbarka Bouaida, que son gouvernement souhaite que les grandes entreprises de la péninsule aient accès aux mégas-projets d’infrastructures et aux marchés publics. Le diplomate espagnol a reconnu que les chiffres portant les échanges commerciaux sont satisfaisants, mais que l’Espagne aspire toutefois à une présence de poids dans le tissu économique national. Le premier client et fournisseur du royaume veut passer à la vitesse supérieure «Nous voulons travailler encore plus sur le volet économique. Les données sur les échanges se portent bien, mais nous n’avons pas encore atteint le niveau souhaité», a-t-il clamé. Sans détour, le responsable ibérique a admis le souhait de son pays de voir ses grands groupes remporter les marchés publics d’envergure lancés par le gouvernement marocain. Sur le plan des accords, le protocole de pêche arrive à terme en 2018. Sauf surprise, tout porte à croire que le Maroc n’entravera pas sa reconduction et les pêcheurs espagnols sont confiants quant à la bonne volonté des négociateurs européens et marocains de renouveler le pacte. En ce qui concerne la sécurité et la lutte anti-terroriste, les deux pays sont présentés comme le bon exemple en matière de coopération contre le terrorisme jihadiste dans le pourtour méditerranéen.
À cet égard, le gouvernement espagnol avait proposé au royaume d’exporter ce cas d’école en faisant profiter les pays de l’Afrique subsaharienne et les régions nord-africaines de ce modèle de coopération. Ce succès concerne aussi le dossier de l’immigration. Certes, la gestion de cet épineux dossier déplait aux ONG défendant les droits des migrants, mais les instances européennes semblent être plus que satisfaites du modèle maroco-espagnol pour faire face aux flux migratoires. Sur le plan international, l’Espagne s’est avérée être un bon allié du Maroc durant les moments de tension qu’a traversés la diplomatie marocaine. Madrid a appuyé Rabat dans l’affaire de l’arrêt européen contre l’accord agricole et a soutenu, discrètement certes, les positions du Maroc devant le Conseil de sécurité de l’ONU durant le différend opposant le Maroc et le secrétaire général onusien Ban Ki-moon. Ce soutien n’a aucune raison de fléchir durant ce mandat.
Quid de l’accord de réciprocité ?
Quant à la situation de la communauté marocaine établie en Espagne, la signature de l’accord de réciprocité permettant aux citoyens des deux pays de voter aux élections municipales de leurs pays d’accueil n’a que trop tardé. Le gouvernement marocain n’a pas inscrit ce point dans l’agenda des réunions bilatérales. De son côté, le gouvernement du PP n’est pas pressé de le ratifier. Les conservateurs n’ont aucun intérêt à ce que ce texte entre en vigueur durant leur mandat de crainte que les électeurs marocains fassent pencher la balance électorale en faveur de la gauche espagnole, connue pour se positionner en faveur des immigrants. Surtout si l’on sait que cette initiative de permettre le vote des résidents étrangers aux municipales fut adoptée par les socialistes durant le mandat de José Luis Zapatero.