Éco-BusinessTable ronde

Marché. Quelle est la prévalence du «Made in China» au Maroc ?

Les importateurs des principaux constructeurs chinois présents sur le marché marocain ont développé leurs spécificités, lors d’une table ronde du Cercle des ÉCO, qui s’est tenue sous le thème «Automobile: Les marques chinoises en force». Adil Bennani, président de l’AIVAM, Achraf Hajjaji, DGA d’Auto Nejma et Saad Menioui, directeur de la marque Changan au Maroc, ont livré leur vision.

La marque Changan est la plus ancienne en Chine. Elle est entrée dans le top 15, l’an dernier, avec 2,5 millions de véhicules vendus à l’échelle internationale. Réputée pour sa qualité et sa fiabilité, elle compte plusieurs sous-marques, comme Deepal, Avatr et, principalement, Nevo qui sont celles des véhicules électriques et hybrides. Leur ambition est d’entrer dans le top 10 d’ici 2030 avec un objectif de vente de 5 millions de véhicules.

Ce potentiel a conduit Saad Menioui, à accepter de diriger la marque au Maroc, explique-t-il. La gamme sur notre marché comporte 4 véhicules 100% thermiques SUVB, STID et la citadine Sedan. Bientôt Changan lancera ses modèles électriques, et peut-être l’hybride aussi. La marque possède un point de vente à Casablanca, boulevard Moulay Slimane. Un deuxième showroom sera inauguré dans la même ville. L’ambition est d’en ouvrir dix d’ici 2025. Achraf Hajjaji, représentant du pionnier de la voiture électrique au Maroc, BYD, en avait considéré plusieurs autres. Il a choisi le n°1 mondial des véhicules à énergies renouvelables. BYD fabrique les deux tiers de ce parc mondial, elle est la quatrième capitalisation boursière de son secteur, derrière Tesla, Toyota et Mercedes.

La marque a cessé de fabriquer des modèles thermiques, et propose exclusivement des solutions HEV, PHEV et EV. Son installation au Maroc date de l’an dernier, elle propose aujourd’hui 5 modèles. Le réseau de distribution comportait les premiers jours 4 points de vente, couvrant Casablanca, Rabat, Tanger et Marrakech. Une ouverture est prévue à Agadir avant la fin de l’année, et Auto Nejma ambitionne de couvrir 85% du marché marocain dès l’an prochain.

Construire son image

La question de la concurrence entre les marques japonaises et allemandes ne se pose plus aujourd’hui, mais elles se posaient il y a 30 ou 50 ans. La fabrication japonaise était considérée comme très bas de gamme. «Le Japon s’est industrialisé, s’est développé jusqu’à fabriquer les produits les plus fiables au monde», explique Adil Bennani. «C’est une question de temps.» Aujourd’hui, il y a un déficit d’image pour les marques chinoises, dans les pays de destination. Mais la Chine est en train de suivre le même chemin que les Japonais, à une vitesse supérieure. Ce qui va construire l’image chinoise, c’est la fiabilité des véhicules, le bouche-à-oreille des clients heureux fera boule de neige.

Saad Menioui tient à souligner que les résultats d’une étude-consommateurs, menée par son groupe, ont fait ressortir un étonnant taux d’acceptation des Marocains. C’est pourquoi dans son positionnement Changan assume à 100% son origine chinoise avec le slogan «China powered, Italian design».

Achraf Hajjaji, de la marque BYD, remarque en riant que lui n’a parlé que de Chine. Il rappelle aussi l’histoire des constructeurs sud-coréens, qui se sont imposés en 15 ans. Ils ont été les premiers à proposer des garanties de 7 ans, etc. Adil Bennani se souvient d’une présentation faite dans les bureaux de Toyota, au Japon, en 2002. Parlant de la concurrence, il évoque Hyundai. Un cadre s’était tellement offusqué de cette comparaison qu’il avait quitté la réunion, faisant un esclandre très rare au Japon.

Pourtant, 5 ou 6 ans plus tard, Hyundai faisait bien partie des tableaux de benchmark fournis par Toyota à ses partenaires. Cette histoire, conclut le président de l’AIVAM, met en évidence que la perception d’une marque change avec le temps. Et ce qui la fait évoluer dans le bon sens, c’est la discipline, la qualité et le travail bien fait. Ce que les Chinois sont en train de faire depuis quelques années.

Réduire le gap de legacy

Avec internet, le client sait aussi ce qui se passe à l’international, souligne Achraf Hajjaji, ce qui n’était pas le cas il y a 15 ou 20 ans. Or, la réputation du «Made in China» évolue dans le monde. Le vendeur peut expliquer à son client que tel modèle rare au Maroc se vend pourtant à 30.000 exemplaires par mois dans le monde, et que cela dure depuis 2 ou 3 ans. Le client pourra en trouver la confirmation en demandant à Chat GPT. «La réputation internationale participe à la création de l’image au Maroc», soutient Adil Bennani.

À cela il faut rajouter de la communication. C’est pourquoi certaines marques commencent à investir dans des évènements de portée internationale, il s’agit de construire cette image. «Le prix est une variable importante, ajoute Achraf Hajjaji, mais BYD n’est pas le moins cher du marché électrique, au contraire.» Il s’agit toutefois d’un bon rapport qualité-prix, si l’on considère toute la technologie embarquée, la sellerie, etc.

Actuellement, la Chine maîtrise toute la chaîne de valeur et produit à grande échelle, cela lui permet d’offrir ce rapport qualité-prix imbattable, remarque Saad Menioui. Les Marocains peuvent et doivent en tirer profit eux aussi. Ne serait-ce qu’en testant ces véhicules. Adil Bennani souligne qu’une marque chinoise ne peut pas se permettre d’être plus chère que celles comme Porshe ou d’autres, qui portent un «legacy», un héritage considérable, un capital de 120 ou 130 ans d’histoire de compétitions et de prix sportifs. Il est impossible de l’effacer d’un coup.

Toutefois, d’autres marques arrivées plus tard ont su les «bridger», les rattraper. Cela va forcément prendre du temps, mais l’échelle de ce temps se raccourcit, insiste-t-il. Dans l’industrie du téléphone, cette différence n’existe plus entre Huawei, Apple et Samsung. La technologie et la qualité ont permis de construire un legacy désormais installé. Il devrait se passer la même chose dans l’automobile.

Marketing perfectible

Achraf Hajjaji reconnaît qu’il y a un débat interne entre les importateurs et les constructeurs quant aux noms des marques et modèles. «Ces marques ont réussi sur les volets industrialisation et savoir-faire. Toutefois, chez les constructeurs, il n’y a pas un étranger autour de la table de réflexion. Nos vis-à-vis, chez toutes les marques, ne sont que des Chinois. Mais je crois qu’ils vont apprendre vite et qu’ils devront intégrer du personnel venu d’ailleurs. Par exemple, BYD a engagé un designer venu de chez Audi. Cela se voit dans la qualité du design. Pour le marketing, dont le branding et le naming, il leur reste du travail à faire pour savoir plaire au goût du client international.»


Adil Bennani
Président de l’AIVAM

«Une marque chinoise ne peut pas se permettre d’être plus chère que celles comme Porshe ou d’autres, qui portent un héritage considérable, un capital de 120 ou 130 ans d’histoire de compétitions et de prix sportifs. Il est impossible de l’effacer d’un coup. Toutefois, d’autres marques arrivées plus tard ont su les «bridger», les rattraper. Cela va forcément prendre du temps, mais l’échelle de ce temps se raccourcit. Dans l’industrie du téléphone, cette différence n’existe plus entre Huawei, Apple et Samsung. La technologie et la qualité ont permis de construire un legacy désormais installé. Il devrait se passer la même chose da Japon s’est industrialisé, s’est développé jusqu’à fabriquer les produits les plus fiables au monde. C’est une question de temps. La réputation internationale participe à la création de l’image au Maroc».

Achraf Hajjaji
Directeur général adjoint d’Auto Nejma

 «La réputation du Made in China évolue dans le monde. Le vendeur peut expliquer à son client que tel modèle rare au Maroc se vend pourtant à 30.000 exemplaires par mois dans le monde, et que cela dure depuis 2 ou 3 ans. Le client pourra en trouver la confirmation en demandant à ChatGPT».

Murtada Calamy / Les Inspirations ÉCO

 


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