Les recommandations du CESE
Le statut des fédérations doit être mis à jour pour jouer leur rôle de proposition en matière de réforme industrielle. Il va falloir diversifier, densifier et augmenter la valeur ajoutée en phase avec les mutations mondiales.
Dans son dernier rapport sur la politique industrielle dont Les Inspirations ÉCO détient copie, le Conseil économique, social et environnemental a émis des recommandations pour une industrie marocaine du futur. Pour concevoir et piloter ce que le CESE qualifie d’«Industrie Maroc 4.0», il va falloir commencer par la gouvernance. Une gouvernance institutionnalisée, lisible et responsable pour porter la vision avec des prérogatives bien définies pour chaque intervenant. L’État exerçant des prérogatives régaliennes et assumant ses rôles clés de stratège, de régulateur et de force d’impulsion et d’incitation.
Par ailleurs, il faut renforcer le rôle des fédérations sectorielles en tant que forces de proposition, en matière de stratégie industrielle, à travers un texte de loi. Ce dernier doit amender ou remplacer le dahir de 1959 qui les définit en tant qu’associations. Plus encore, le rapport du CESE recommande que le statut juridique de la CGEM aille au-delà de la reconnaissance qui lui est de facto octroyée pour l’élection des représentants du secteur privé, siégeant au sein de la Chambre des conseillers. Outre l’appui des fédérations sectorielles, les champions nationaux méritent un accompagnement particulier. À l’orée de l’entrée potentielle du Maroc dans la CEDEAO, il est nécessaire d’appuyer des locomotives ayant le potentiel de devenir des acteurs industriels régionaux, voire panafricains. Dans ce sens, il est judicieux de créer une intégration entre industrie et services, un secteur dans lequel le Maroc dispose déjà d’acteurs ayant la taille critique.
Le CESE explique à cet égard que le soutien aux grands pavillons nationaux est une bonne entrée en matière. Citons-en le transport aérien, maritime, les nouvelles technologies, l’industrie de pointe, les TIC, l’assurance, la réassurance. Sans perdre de vue la banque et la finance ayant fait leur preuve dans l’Afrique subsaharienne. Il est recommandé, dans ce sens, de mettre en place au sein du Conseil national de l’industrie (proposé dans le rapport), un comité spécialisé en charge de ce sujet. Cette entité serait composée de manière paritaire entre représentants des pouvoirs publics impliqués dans la projection internationale du royaume (AMDIE, MAEC, AMCI…), grandes entreprises marocaines, multinationales, et monde académique. Cette synergie quand bien même nécessaire, n’est toutefois pas facile à décliner dans la réalité. Des procédures, des lois et des passerelles doivent être imaginées pour aboutir à l’harmonie voulue en matière de promotion et de rayonnement du pays dans la région. Contrairement à ce que l’on peut penser, la réforme de l’industrie ne doit pas nécessairement passer par une main-d’œuvre bon marché et une flexibilité sauvage du monde du travail. La deuxième plus importante recommandation du CESE porte justement sur une nouvelle relation au travail. Il s’agit de réinventer le pacte social en assurant une convergence entre compétitivité, attractivité, responsabilité et cohésion sociale. La priorité doit être ainsi donnée à l’emploi décent et à la réforme et la généralisation du système de protection sociale. Sur le registre régional, le CESE recommande de créer un lien entre la production de richesses sur un territoire et les recettes qui lui reviennent. De cette manière, les régions seront encouragées à faire plus d’efforts pour attirer les investissements industriels et améliorer leur climat des affaires.
Par ailleurs, dans le cadre de la régionalisation avancée, le CESE propose une meilleure insertion des zones industrielles avec le schéma logistique national air-terre-mer. La quatrième recommandation phare du CESE est de libérer les énergies et les initiatives et de densifier le tissu industriel. À partir d’un diagnostic qui fait ressortir l’étroitesse du tissu industrielle, la faible diversité des produits manufacturés et de la valeur ajoutée locale, il devient pressant d’agir sur le climat des affaires. Il faut, souligne le rapport, ouvrir la voie à de nouveaux profils d’acteurs industriels. De cette manière, la densification tant voulue peut avoir lieu et partant sortir d’une économie de rente à une économie inclusive et productrice de valeur.
Foncier: avoir les mêmes avantages que l’immobilier
Parmi les freins qui ralentissent la densification industrielle, figure l’accès au foncier abordable. Le CESE recommande à ce propos de favoriser l’émergence d’instruments financiers en mesure de permettre la mise à disposition de foncier industriel à prix compétitif, à la fois en matière d’acquisition que de location. De surcroît, cela permettrait à certains acteurs de pouvoir procéder, à des opérations d’extensions dans des délais compétitifs. Pour y arriver, le rapport du CESE prône d’adapter le cadre des Organismes de placement collectif immobilier (OPCI) au secteur industriel, afin d’accorder à ce dernier les mêmes avantages. Plus particulièrement, sont visées les dispositions relatives à l’exonération permanente d’impôts sur les bénéfices provenant de la location de terrains ou immeubles à usage industriel, qui permettraient d’accroître l’attractivité de ce type de produits. En parallèle, et pour répondre à ce même besoin d’accroissement du financement mobilisable en faveur de l’industrie, il est recommandé d’introduire un abattement permettant de pallier le non-amortissement des terrains industriels.