Les 500 champions africains : comment les entreprises marocaines ont-elles évolué ?

Avec un chiffre d’affaires cumulé de 55,9 milliards de dollars, les grands groupes du Royaume, classés dans le Top 500 du magazine Jeune Afrique pour l’année 2025, se démarquent par leur résilience dans un contexte global tendu. Le mastodonte OCP (10e) occupe une place de choix mais il n’est pas le seul. Le Maroc est représenté par 54 entreprises, dont 39 sont issues du secteur privé. Fait notable : Dislog Group est le seul opérateur marocain à y faire son entrée cette année et figure désormais en bonne place.
Cette année encore, le Maroc tire son épingle du jeu à l’échelle économique africaine et s’impose comme un acteur continental de référence. C’est ce qui ressort du classement Top 500 des champions économiques africains pour l’année 2025. Un classement établi chaque année par le magazine Jeune Afrique et dans lequel le Royaume figure en bonne place. Une résilience qui contraste avec un contexte continental où les champions africains perdent de l’élan, bousculés une nouvelle fois par les troubles monétaires et par la baisse des prix des matières premières.
Fort d’une population d’environ 38 millions d’habitants et d’un PIB de 144 milliards de dollars en 2023, le Maroc, lui, a fait le pari d’un secteur privé fort et diversifié. Une formule qui s’avère gagnante. Ainsi, le Royaume est représenté par 54 entreprises, majoritairement privées. On en compte quelque 39.
À titre de comparaison, le voisin algérien ne compte qu’un total de 13 sociétés, qui plus est principalement publiques (10). Avec un chiffre d’affaires cumulé de 55,9 milliards de dollars, les groupes actifs dans le Royaume contribuent à 7,60 % du CA global des champions africains de l’économie.
Dans les détails, le mastodonte des phosphates OCP (10e) occupe une place de choix avec ses 8,3 milliards de dollars de chiffre d’affaires. Assise sur 70% des réserves de phosphate de la planète, la compagnie marocaine a su dépasser le stade de l’extraction minière en misant sur la transformation du phosphate en engrais, marché dont elle possède 26% des parts à l’échelle mondiale. La société publique développe une stratégie diplomatico-économique panafricaine qui consiste à nourrir le continent tout en participant à son développement.
La société investit dans des secteurs aussi divers que l’éducation, la cartographie des sols et l’innovation. La progression d’entreprises comme Royal Air Maroc dans le classement est spectaculaire. Le groupe conduit par Abdelhamid Addou «crève les nuages» avec une percée de 42 places par rapport à 2024 pour se hisser à la 91e place.
On remarque par ailleurs que deux entreprises marocaines du Top 100 de ce classement ont changé de leadership. Il s’agit de Maroc Telecom, 47e au tableau 2025, présidé depuis le 25 février dernier par Mohamed Benchaâboun, jusque-là patron du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, et de l’ONEE (Office national de l’électricité et de l’eau potable), qui occupe la 42e place.
C’est désormais Tarik Hamane qui est à sa tête. Mais loin de reposer sur quelques flagships, le Maroc s’appuie surtout sur un tissu économique plus diversifié. Mines, automobile, télécommunications, banques, commerce, agro-industrie, énergie, services… Les grands groupes du Royaume classés dans le Top 500 sont majoritairement privés et occupent plusieurs secteurs stratégiques. «Cette diversité assure une meilleure résilience de l’économie face aux chocs, même si celle-ci peine encore à rivaliser en taille», estime Othmane Fahim, directeur de la recherche et de l’économie chez EFCC Consulting à Casablanca, cité par Jeune Afrique.
On notera, suivant cette dynamique, l’entrée pour la première fois de Dislog Group, groupe industriel marocain intégré et diversifié opérant dans trois secteurs clés en forte croissance (hygiène, alimentation et santé) et comptant des unités industrielles au Maroc et en Europe. Alors qu’il en était absent jusqu’ici, Dislog Group est la seule entreprise marocaine à faire son entrée dans le classement, où elle occupe le 451e rang, devant des opérateurs pourtant habitués de ce ranking (voir encadré).
Le Maroc peine encore à progresser dans le classement des grandes entreprises africaines. Le pays doit relever plusieurs défis structurels, notamment un tissu industriel restreint, une forte dépendance aux importations, un marché intérieur de taille réduite, ainsi qu’une croissance insuffisante pour permettre à ses entreprises de changer d’échelle.
De plus, la compétitivité reste perfectible. Les entreprises marocaines évoluent dans un environnement concurrentiel marqué par des contraintes telles que le coût élevé de l’énergie, une fiscalité lourde et une certaine rigidité administrative.
Cependant, Othmane Fahim nuance cette situation en soulignant que «l’ouverture du Royaume chérifien au secteur privé favorise l’attraction des investissements étrangers et l’intégration aux chaînes de valeur mondiales». Il espère que le Maroc pourra franchir un cap en matière d’industrialisation et de compétitivité, ce qui lui permettrait de mieux se positionner dans le Top 500 grâce à de nouveaux champions panafricains. Un expert algérien, cité par Jeune Afrique, conclut sur une note optimiste : «Avec son ouverture sur le continent et ses investissements industriels, le Maroc construit son avenir. Il y a fort à parier que le développement du pays paiera beaucoup plus».
Dislog Group, le champion marocain qui monte
Pas plus loin que l’année 2024, il était hors radar. En 2025, le marocain Dislog Group fait une entrée remarquée dans le classement des 500 champions économiques africains de Jeune Afrique.
Le groupe, fondé en 2005, occupe désormais la 451e place, devant des acteurs marocains de renom tels que Les Eaux minérales d’Oulmès (458e), Sothema (471e), Mutandis (474e), Nexans Maroc (481e), Radeema (482e), Auto Nejma (487e) ou encore Jet Contractors (492e). Sa prouesse, Dislog Group la doit à une stratégie ambitieuse de croissance et de diversification.
Développeur de marques opérant dans l’économie de la vie et acteur de référence dans les secteurs de l’alimentation, de l’hygiène et de la santé, le groupe compte quelque 150 marques, qu’elles soient propres ou partenaires, et un volume logistique annuel traité de 552.000 palettes, équivalent à 440.000 tonnes par an.
Employant 3.400 personnes, le groupe est devenu leader de son marché en seulement une quinzaine d’années grâce à son positionnement de Full Service Provider, qui intègre, via ses différentes filiales, l’ensemble de la chaîne de valeur, de la production jusqu’au panier de la ménagère.
Ilyas Bellarbi / Les Inspirations ÉCO