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Le flou juridique et fiscal persiste pour les agents locaux

La pression fiscale sur cette catégorie de salariés pousse l’UMT à prévoir une mobilisation massive en ce début d’année. Les salariés veulent un amendement de l’article 3 du Code du travail ainsi qu’une limitation drastique du principe d’extraterritorialité, considérant les ambassades et représentations diplomatique comme «employeurs privés».

Les représentations diplomatiques étrangères ont trois catégories de salariés. Les agents nationaux, protégés par le Code du travail de leur pays d’origine, les fonctionnaires internationaux, catégorie choyée par un statut unique conféré par l’Organisation des Nations Unies, et, enfin, les agents locaux. Cette dernière catégorie, dont la situation est la plus précaire socialement, se retrouve à la croisée d’un régime juridique ambivalent et d’une situation fiscale oppressante. En effet, plusieurs agents travaillant pour les missions diplomatiques et consulaires, ainsi que pour les ONG internationales accréditées au Maroc, se plaignent des «conditions de travail inadéquate, des licenciements abusifs et d’absence de cotisations aux organismes de prévoyance sociale», comme l’indique le syndicat unitaire des services espagnol, affilié à l’UMT.

Les responsables de la centrale dénoncent, entre autres, «l’attribution inégalitaire des revenus en fonction des statuts». Des sources travaillant dans les missions diplomatiques espagnoles et britanniques affirment même qu’elles subissent, depuis quelques mois, des pressions de la part de leurs employeurs en raison de leurs «activités associatives». Raison pour laquelle la centrale compte opérer une mobilisation nationale en ce début de 2018, avec à l’appui une communication agressive pour sensibiliser l’opinion publique. Aux termes de la charte de l’Organisation internationale du travail, l’agent local «dispose d’un contrat de travail soumis au droit du pays d’exercice de l’emploi et aux conventions internationales du travail. L’agent bénéficie des mêmes droits que les autres salariés qui travaillent dans le pays». C’est ainsi que la fameuse «immunité absolue» a été abandonnée.

En effet, dans un arrêt rendu par la Cour internationale de justice en 2009, concernant un contrat de travail signé par l’ambassade du Qatar aux États-Unis, le principe d’immunité n’est pas applicable lorsque les représentations diplomatiques agissent dans le domaine du droit privé. La Cour de cassation française a ainsi jugé que l’État saoudien ne pouvait se prévaloir du principe d’immunité pour ne pas déclarer à un régime français de protection sociale le professeur qu’il avait engagé. Celui-ci avait donc le droit de saisir les juridictions françaises du différend qui l’opposait à son employeur. Ainsi, cette immunité n’est reconnue à un État que pour les actes accomplis en tant que puissance publique ou dans l’intérêt d’un service public et non pour ceux effectués dans la forme et suivant les normes du droit privé, c’est-à-dire de la même manière qu’une personne privée aurait pu le faire. De par ce statut, les services de l’État à l’étranger sont donc soumis au droit local du travail. En revanche, concernant les charges sociales et les impôts, ces services sont redevables aux termes du droit local, ou des conventions bilatérales. L’article 3 du Code du travail marocain n’intègre en aucun cas cette catégorie d’employés.

En outre, ces salariés ne font l’objet d’aucune législation particulière. D’où la raison d’être de l’offensive «sociale» menée par l’Union marocaine du travail, qui demande un amendement de cette disposition. L’argumentaire du syndicat indique que «plus de 3.000 agents employés dans les missions diplomatiques et consulaires, ainsi que les organisations internationales, ne disposent ni de couverture médicale, ni de cotisation à des caisses de retraite». Cette volonté de mobilisation survient également après la montée de la pression fiscale. Si dans le Code du travail marocain l’employeur est tenu de prélever à la source l’Impôt sur le revenu (IR), les missions diplomatiques, elles, échappent à cette mesure. Selon l’article 74 de la loi 17-89 relative à l’IR (promulguée en novembre 1989), les contribuables domiciliés au Maroc et employés par les organismes internationaux et les missions diplomatiques ou consulaires accrédités au Maroc sont imposés «par voie de rôle», il leur revient donc de se déclarer au fisc et de s’acquitter de l’IR, indépendamment de leur employeur. Un système déclaratif réfuté par la centrale syndicale qui estime que «même la jurisprudence de la Cour de cassation indique que c’est à l’employeur que revient la responsabilité de payer les échéances fiscales retenues à la source».


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