L’Afrique au cœur de la transition énergétique mondiale : quels enjeux pour le Maroc ?
Selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie, l’Afrique dispose d’un potentiel considérable pour jouer un rôle clé dans la transition énergétique mondiale. Décryptage des enjeux et des opportunités qui s’offrent au Maroc dans ce contexte. Zoom sur les conclusions du rapport de l’AIE.
Selon un récent rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) intitulé «Investissement dans les énergies propres pour le développement en Afrique», le continent africain fait face à d’immenses défis énergétiques, mais dispose également d’un potentiel considérable pour devenir un acteur clé de la transition énergétique mondiale.
Cette étude, commandée dans le cadre de l’initiative «Énergie pour la croissance en Afrique» lancée par le G7, souligne la nécessité urgente d’augmenter massivement les investissements dans les énergies propres afin de répondre à la demande énergétique croissante et d’atteindre les objectifs climatiques de la région.
Selon les estimations de l’AIE, les investissements énergétiques annuels en Afrique devront plus que doubler pour dépasser 240 milliards de dollars d’ici 2030, dont environ 75% seront consacrés aux énergies renouvelables.
Un enjeu de taille pour les industries émergentes
Au-delà des investissements dans l’accès à l’énergie et le secteur électrique, le rapport met en lumière l’importance cruciale de développer de nouvelles industries liées aux technologies d’énergies propres. L’Afrique, riche en ressources minérales critiques comme le cobalt, le platine, le manganèse et le cuivre, dispose d’atouts majeurs pour s’imposer dans des secteurs clés tels que l’extraction et la transformation des minerais, la production d’acier et de ciment à faibles émissions, la fabrication de batteries, de panneaux solaires, d’éoliennes et d’électrolyseurs.
Cependant, à l’heure actuelle, seule l’exploitation minière des minerais critiques est réellement développée en Afrique. Le rapport souligne que certains pays, comme l’Égypte, le Kenya et le Maroc, ont su tirer parti de leur mix énergétique peu émetteur de carbone, de leur main-d’œuvre croissante et de leurs coûts compétitifs pour attirer de nouveaux investissements dans ces industries émergentes.
Des défis de financement à relever
Malgré ces perspectives prometteuses, le rapport de l’AIE souligne les obstacles majeurs au financement des investissements énergétiques en Afrique. En raison des risques perçus comme plus élevés et des coûts d’emprunt élevés, le coût du capital peut être deux à trois fois supérieur dans les économies émergentes par rapport aux économies avancées. Selon l’analyse de l’AIE, les systèmes énergétiques africains nécessitent en moyenne 30 milliards de dollars de financements concessionnels par an, jusqu’en 2030, pour permettre de tripler les investissements du secteur privé requis sur la même période.
Le financement concessionnel apparaît donc comme un levier essentiel pour catalyser les investissements privés dans les énergies propres en Afrique. En somme, l’Afrique se trouve à la croisée des chemins face aux défis énergétiques et climatiques mondiaux. Si le continent dispose d’atouts indéniables pour jouer un rôle de premier plan dans la transition énergétique, il doit relever le défi colossal de mobiliser les investissements nécessaires. Dans cette perspective, le Maroc, grâce à sa stratégie ambitieuse et son positionnement régional, a tous les atouts pour devenir un acteur incontournable des industries vertes émergentes en Afrique.
Les atouts-clés du Maroc pour s’imposer
Il faut dire que le Maroc bénéficie d’atouts stratégiques majeurs pour s’imposer comme un acteur clé des industries vertes émergentes en Afrique et dans la région méditerranéenne. En tant que pays membre de l’AIE depuis 2016, le Royaume s’est engagé résolument sur la voie de la transition énergétique. Grâce à des investissements massifs dans les énergies renouvelables, notamment l’éolien et le solaire, le Maroc vise à porter la part des énergies propres à 52% de son mix électrique d’ici 2030.
Cette stratégie de décarbonation du secteur électrique, couplée aux abondantes ressources minérales du pays en cobalt, cuivre et manganèse, place le Royaume dans une position avantageuse pour attirer les investissements dans la chaîne de valeur des véhicules électriques, des batteries et des énergies renouvelables. Le Maroc a d’ores et déjà développé une expertise de pointe dans le recyclage des batteries, compétence clé pour assurer la circularité de ces filières stratégiques.
Parallèlement, les importants déploiements d’énergies renouvelables ont permis au Maroc d’acquérir un savoir-faire de premier plan dans ces technologies. Avec un mix électrique de plus en plus décarboné, le pays dispose ainsi d’un avantage comparatif pour attirer les industries grandes consommatrices d’électricité verte, comme la production d’hydrogène vert par électrolyse ou la fabrication de composants pour l’éolien et le solaire.
Dans cette optique, le Maroc a récemment annoncé son ambition de devenir un producteur et exportateur majeur d’hydrogène vert en Afrique et en Méditerranée, en tirant parti de son potentiel solaire et éolien exceptionnel. Cette stratégie de diversification s’inscrit dans la vision du Royaume de se positionner comme une plaque tournante de l’industrie verte sur le continent.
Le Maroc peut également capitaliser sur ses atouts géographiques et logistiques, avec des infrastructures portuaires performantes et une situation privilégiée à proximité de l’Europe, marché stratégique pour l’écoulement de sa production industrielle verte. De plus, en tant que seul pays d’Afrique du Nord membre de l’AIE, il bénéficie d’un important effet de levier en termes d’expertise technique, d’assistance et d’attractivité pour les investissements internationaux dans les filières vertes.
Réserves, potentiel en EnR et expertise
Doté de ressources minérales stratégiques, d’un important potentiel en énergies renouvelables et d’une expertise industrielle grandissante dans ces secteurs, disposant d’infrastructures compétitives et d’une situation géographique favorable, le Maroc est idéalement positionné pour s’ériger en pionnier africain des nouveaux secteurs liés à la transition énergétique mondiale, au service d’un développement durable et créateur de valeur ajoutée.
Bilal Cherraji / Les Inspirations ÉCO