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Inégalités des genres. Quel est le manque à gagner pour la croissance ?

Le Maroc perd une part importante de ses revenus en raison des inégalités entre les hommes et les femmes sur le marché du travail. La réduction de ces inégalités permettrait au Maroc d’accroître considérablement le taux de croissance de son PIB par habitant. Le gain économique additionnel est estimé de 0,2 à 1,95 point de pourcentage en rythme annuel du taux de croissance du PIB.

La participation économique des femmes reste faible au Maroc comme en atteste leur part limitée dans la population active (22,2% en 2018). C’est l’une des principales sources des inégalités de genre. À cela s’ajoute le niveau élevé du taux de chômage parmi les femmes (14% en 2018 contre 8,4% pour les hommes).

Les pertes en termes de croissance et de revenu générées par la faible participation des femmes au marché du travail sont quantifiables. Une étude menée par le FMI et citée dans le rapport sur le budget axé sur les résultats tout en tenant compte de l’aspect genre qui accompagne le projet de Loi de finances 2020 (RBG) fait ressortir que les inégalités entre les sexes peuvent expliquer les écarts du taux de croissance du PIB par habitant au Maroc par rapport à plusieurs groupes de référence (Asie, Europe émergente et Amérique latine). On déduit que la réduction des inégalités entre les hommes et les femmes et l’amélioration du taux de scolarisation au Maroc aux mêmes niveaux que ceux enregistrés en moyenne par les pays du benchmark, permettraient au royaume d’accroître le taux de croissance de son PIB réel par habitant par rapport aux trois groupes, respectivement de 1%, de 1,5% et de 0,75%.

Ces résultats rejoignent les conclusions d’une étude menée par le département de l’Économie et des finances : la mise en place de politiques pour réduire les discriminations basées sur le genre dans le milieu de travail conjuguée au pouvoir de négociation de la femme au sein du ménage seraient suffisantes pour induire un gain économique additionnel estimé de 0,2 à 1,95 point de pourcentage en rythme annuel du taux de croissance du PIB. Une autre analyse visant la quantification des pertes de revenu engendrées par une mauvaise répartition des femmes dans la population active démontre que le Maroc perd une part importante de ses revenus en raison des inégalités sur le marché du travail. Les coûts associés aux inégalités  en termes d’accès  à l’entrepreneuriat pourraient atteindre 46% du revenu par habitant par rapport à une situation où les femmes ont le même niveau de participation à la main-d’œuvre et à l’entrepreneuriat que les hommes, comme c’est précisé dans le rapport sur le budget genre qui rappelle l’enquête du HCP sur le budget «temps» des femmes et des hommes en 2012 : la valorisation du temps domestique des femmes au Maroc (valeur monétaire correspondant au SMIG) porte la contribution des femmes au PIB élargi aux services domestiques non marchands à 39,7% et en valorisant le travail domestique des femmes par la rémunération salariale moyenne par heure dégagée de la comptabilité nationale ( 22 DH/heure), la contribution des femmes au PIB élargi aux services domestiques non marchands est portée à 49,3%. C’est pourquoi le gouvernement tend depuis des années à élaborer un budget tenant compte de l’aspect genre. L’actuel rapport qui accompagne le PLF 2020 «acte le début de l’opérationnalisation des voies d’amélioration identifiées».

Des avancées ont été enregistrées comme le renforcement des capacités analytiques ainsi que les mécanismes instaurées par la Loi organique des finances prônant les vertus de la budgétisation sensible au genre mais il reste encore beaucoup de défis à relever en matière d’évaluation, de programmation et de planification budgétaires. C’est dans ce cadre que le ministère de l’Économie et des finances en partenariat avec l’ONU femmes ont mené durant le premier semestre de 2019 une étude approfondie portant sur la refonte du rapport sur le budget axé sur les résultats en tenant compte de l’aspect genre.

L’objectif étant de faire un diagnostic  sur la mise en œuvre et le suivi de la budgétisation sensible au genre, de réviser le contenu du rapport y afférent pour redresser les dysfonctionnements et de développer des kits de formation au profit des départements ministériels et des parlementaires.  Le diagnostic établi a permis d’introduire des améliorations au rapport portant sur le budget genre de cette année. Il s’agit, notamment, de la mise en place d’un canevas clair pour l’élaboration du rapport qui fournit aux départements ministériels des orientations détaillées comprenant des modèles et des explications adéquates, la coordination ministérielle en matière de promotion de l’égalité des genres…


Moteur de développement

Les écarts de participation à la population active entre les hommes et les femmes demeurent persistants au niveau international. Aucun pays n’a pu réduire cet écart à moins de 7 points de pourcentage d’après le RBG. L’exclusion des femmes des possibilités de participer à la création des richesses signifie que le bassin global de talents est inférieur à ce qu’il pourrait être. Les femmes ne représentent à l’échelle mondiale que 38% de la richesse en capital humain contre 62% pour les hommes. Dans les pays à revenu faible ou moyen inférieur, les femmes ne participent qu’à hauteur d’un tiers à la richesse en capital humain. Par habitant, l’inégalité des revenus entre les sexes pourrait entraîner une perte de richesse de 23.620 dollars par personne dans le monde. La perte de richesse en capital humain due à l’inégalité entre les sexes est estimée à 160,2 milliards de dollars. Ce qui veut dire que la richesse en capital humain pourrait augmenter de 21,7% à l’échelle mondiale et la richesse totale de 14% avec l’égalité des gains entre les sexes.



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