Crypto-actifs, marché à terme… La modernisation du cadre financier s’accélère

Le système financier marocain présente un double visage en 2024. Alors que les indicateurs macroéconomiques affichent une stabilité rassurante, le rapport de Bank Al-Maghrib, l’ACAPS et l’AMMC révèle une transformation profonde en coulisses. Une modernisation active pour adapter le cadre financier aux innovations et aux risques émergents.
Pendant que l’économie marocaine retrouvait son souffle en 2024, avec une croissance solide et une inflation enfin domptée, les régulateurs financiers menaient une offensive sur un autre front, celui de la modernisation. Le rapport annuel sur la stabilité financière, publié conjointement par Bank Al-Maghrib, l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) et l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), révèle cette double dynamique.
Derrière une façade de stabilité retrouvée, la transformation profonde de l’architecture financière du Royaume s’accélère. Encadrement des crypto-actifs, lancement du marché à terme et renforcement de la cyber-résilience ne sont plus des projets lointains, mais les piliers d’une stratégie active pour préparer la place financière aux défis et aux opportunités de la prochaine décennie.
La consolidation des outils de surveillance et de prévention
Le renforcement du dispositif prudentiel a constitué un axe de travail central en 2024. Une étape importante a été franchie avec l’homologation de la circulaire conjointe relative aux conglomérats financiers, qui vise à améliorer la surveillance des grands groupes financiers intégrés.
En parallèle, Bank Al-Maghrib a parachevé son dispositif de prêteur en dernier ressort. Cette mesure, qui précise les conditions d’intervention en cas de besoin de liquidité d’urgence, est un instrument jugé essentiel pour la gestion de crise et la préservation de la stabilité globale. Les travaux de modernisation se sont également poursuivis sur le plan législatif.
La réforme de la loi bancaire, menée en collaboration avec les partenaires institutionnels, se précise de plus en plus. Elle a pour objectif de renforcer les mécanismes de résolution bancaire, alignant ainsi le cadre marocain sur les standards internationaux. Ces initiatives structurelles démontrent une volonté de consolider la résilience du système face aux chocs potentiels, en s’appuyant sur des fondations réglementaires robustes et actualisées.
L’adaptation aux nouvelles frontières de la finance
L’année 2024 a été marquée par des avancées concrètes vers l’élargissement de l’offre du marché de capitaux. Le déploiement du marché à terme et de sa Chambre de compensation a connu des progrès significatifs sur les plans réglementaire et opérationnel. La publication des arrêtés relatifs aux règles prudentielles et aux règlements généraux des entités de marché a posé les bases de son lancement effectif, complétée par une stratégie de communication et de formation à destination des futurs acteurs.
En parallèle, les autorités se sont positionnées sur le sujet des actifs numériques. Le groupe de travail, piloté par Bank Al-Maghrib, a finalisé le projet de loi sur les crypto-actifs, qui a été transmis pour introduction dans le circuit législatif.
Cette démarche proactive vise à encadrer le développement des technologies financières tout en maîtrisant les risques associés. La création du «Morocco fintech center» s’inscrit dans cette même logique, en offrant un soutien juridique et financier aux porteurs de projets innovants, favorisant ainsi une modernisation encadrée de l’écosystème.
Cyber-résilience : une priorité au cœur de la stabilité du système
Face à la digitalisation croissante du secteur financier, la sécurisation des infrastructures de marché (IMF) est devenue une priorité stratégique. Le rapport indique que ces infrastructures, essentielles au bon fonctionnement de l’économie, ont maintenu un haut niveau de fiabilité et de disponibilité en 2024.
L’évaluation de leur maturité en matière de cyber-résilience a montré une nette amélioration, confirmée par les résultats d’audits externes. Ces derniers ont permis d’identifier des plans d’action spécifiques pour continuer à élever le niveau de sécurité. Le cadre réglementaire a également évolué pour intégrer cette dimension. La publication du décret relatif au recours aux prestataires de services cloud par les infrastructures d’importance vitale impose des normes claires pour la gestion des données sensibles.
Cette mesure, ainsi que le suivi continu des risques opérationnels et de fraude, illustre l’engagement des régulateurs à garantir l’intégrité et la résilience des systèmes d’information, un pilier fondamental de la confiance dans le système financier à l’ère numérique.
Mehdi Idrissi / Les Inspirations ÉCO