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Croissance économique et CO2 : le dilemme environnemental du Maroc

Le Royaume est aujourd’hui confronté à une problématique environnementale majeure, alors que son développement économique entraîne une hausse importante des émissions de CO2. Une étude récente a mis en évidence une corrélation alarmante entre la consommation d’énergie, la croissance économique et les émissions de gaz à effet de serre. Avec l’augmentation de la consommation d’électricité et d’énergie globale, les émissions de carbone continuent de croître, menaçant les efforts de développement durable du pays.

D’après récente étude menée sur la période 1990-2020, examinant la relation entre la consommation énergétique, la croissance économique et les émissions de CO2 au Maroc, une corrélation directe et significative a été observée entre ces trois variables. Les résultats montrent qu’une augmentation de seulement 1% de la consommation d’électricité par habitant entraîne une hausse de 0,36% des émissions de carbone.

De manière similaire, une hausse de 1% du PIB par habitant génère une élévation de 0,76% des émissions, tandis qu’une augmentation de 1% de la consommation énergétique globale fait grimper les émissions de 2,06%. Ces chiffres démontrent que la croissance économique, bien qu’elle soit nécessaire pour le développement du pays, a un impact négatif direct sur l’environnement, en exacerbant les émissions de gaz à effet de serre et en contribuant à la dégradation écologique.

Énergies fossiles, le principal moteur de la pollution
L’étude, publiée dans l’European Scientific Journal, s’appuie sur des analyses de séries temporelles et des tests de cointégration pour évaluer la relation à long terme entre les émissions de CO2, la croissance économique et la consommation d’énergie au Maroc. Elle met en évidence un dilemme crucial pour le pays : malgré sa quête de croissance économique soutenue, l’augmentation de la consommation d’énergies fossiles continue de nuire à l’environnement.

Le Maroc voit ses émissions augmenter de manière constante depuis les années 1990, même si elles restent relativement modestes par rapport à celles des pays industrialisés. Cela s’explique en partie par la progression du niveau de vie, mesuré par le PIB par habitant, qui a évolué de manière parallèle à celle des émissions de CO2.

Les secteurs les plus touchés par cette hausse des émissions incluent l’électricité, les transports et l’industrie manufacturière. Le secteur énergétique marocain, toujours fortement dépendant des énergies fossiles, contribue massivement à cette augmentation. Le pétrole, en particulier, représente 66% des émissions de CO2, suivi par le charbon (31%) et le gaz naturel (3%). La prédominance des énergies fossiles dans le mix énergétique marocain pose ainsi un défi majeur pour la réduction des émissions à long terme.

Pour répondre à cette problématique et s’inscrire dans une dynamique de développement durable, l’étude recommande d’intensifier les efforts en matière de recherche et développement, particulièrement dans le secteur des énergies renouvelables. L’objectif est d’accroître l’efficacité énergétique du pays tout en réduisant son empreinte carbone. Le Maroc a déjà réalisé des avancées importantes dans le domaine des énergies renouvelables, mais une transition plus ambitieuse est nécessaire pour réduire sa dépendance aux énergies fossiles.

Cette nécessité d’une action plus audacieuse est d’ailleurs soulignée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans son rapport de 2024 concernant le Maroc. L’OCDE prévient que, bien que le pays ait des émissions relativement faibles par habitant, ces dernières pourraient croître rapidement si le modèle énergétique actuel, dominé par les énergies fossiles, n’est pas réformé.

La taxe carbone, un levier pour une transition juste
L’OCDE recommande également l’instauration d’une taxe carbone, un outil fiscal permettant d’internaliser les coûts environnementaux liés à l’usage des énergies fossiles. Cette taxe constituerait un levier essentiel pour ralentir la croissance des émissions tout en générant des recettes fiscales supplémentaires qui pourraient financer les réformes climatiques du pays. Ces revenus pourraient être réinvestis dans des projets verts, visant à améliorer l’efficacité énergétique ou à soutenir les secteurs les plus affectés par cette transition écologique.

Toutefois, pour éviter des répercussions économiques négatives, notamment pour les entreprises les plus vulnérables, l’OCDE préconise une mise en place progressive de cette taxe carbone. Cela permettrait aux acteurs économiques de s’adapter en douceur, tout en encourageant l’innovation dans les technologies à faibles émissions et en renforçant les initiatives visant à réduire la dépendance aux énergies fossiles.
Le Maroc s’est fixé des objectifs climatiques ambitieux, notamment une réduction de 45,5% de ses émissions d’ici 2030 et l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050. Pour atteindre ces objectifs, un effort supplémentaire sera nécessaire.

L’OCDE insiste sur l’importance de la tarification du carbone, jugeant cette mesure cruciale pour orienter les investissements vers des solutions plus durables et responsabiliser les acteurs économiques. Comme le souligne le rapport de septembre 2024, «taxer les émissions de gaz à effet de serre contribuerait à financer les réformes nécessaires tout en incitant les entreprises à adopter des pratiques plus durables».

Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO

 


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