Éco-Business

Carburant. Les prix pourraient frôler les 25 DH/litre !

Dans sa dernière étude économique sur le Maroc, le Groupe Crédit Agricole note une résistance structurelle de l’économie du Royaume, malgré les crises. Mais il table aussi sur un doublement du prix des importations d’énergie.  

«Jusqu’où ira la hausse des prix à la pompe ?», s’interrogeait la Une des Inspirations Éco n°3101 du mercredi 18 mai 2022. Le scénario économique dressé par le Groupe Crédit Agricole nous en donne une idée. Grosso modo, les prix devraient grimper davantage.

«Sur le premier trimestre, la valeur des importations d’énergie représentait pratiquement 6% du PIB et affichait une hausse de 87%, par rapport à la même période de l’an dernier. Nous nous attendons à ce que les importations d’énergie doublent en prix», explique Olivier Le Cabellec, expert intervenant dans le décryptage de l’étude économique du Groupe Crédit Agricole, aux côtés d’Isabelle Job-Bazille, directrice des études économiques du Groupe.

Quand on sait qu’au 27 mars 2022, le prix du diesel atteignait 13,06 DH pour un baril à 118,72 dollars, au 1er avril le litre de diesel à la pompe revenait à 14,30 DH pour 107,74 dollars le baril, et qu’à ces niveaux, le scénario de Crédit Agricole annonce un doublement du prix à l’import, il y a de quoi sérieusement s’inquiéter.

Rappelons que les prix des carburants au Maroc poursuivent leur envolée et si l’on s’essayait à des prévisions sur la base du scénario du groupe financier, le prix des carburants à la pompe pourrait grimper jusqu’à frôler les 25 DH/litre. Mardi 17 mai, le litre d’essence dans les stations Shell est monté à 15,43 DH alors que celui du gasoil s’est situé à 14,58 DH.

Il y a donc une marge d’environ 10 DH de plus à provisionner. La facture à l’importation de plusieurs autres produits devrait grimper. Concernant l’ammoniac, par exemple, la facture au 1er trimestre 2022 a été multipliée par cinq. Et selon Olivier Le Cabellec, «la facture pour les importations d’ammoniac risque de s’élever probablement à 500 millions d’euros pour le Maroc, alors qu’elle était à 100 millions d’euros avant».

C’est la crise !


Cela est dû à la succession des crises, dit-on. Des crises, le Maroc en a connues plusieurs ces 15 dernières années : la crise financière de 2008, la forte augmentation des prix du pétrole entre 2011 et 2013, qui avait fortement affecté le solde courant du Maroc, la crise sanitaire du Coronavirus en 2020, ou encore la crise géopolitique avec la guerre actuelle en Ukraine. Mais aussi la crise climatique relative au changement climatique à l’échelle planétaire, qui affecte les pays producteurs comme le Maroc.

Parlant de la crise en Ukraine, la récente étude économique du groupe Crédit Agricole note qu’elle a accentué des fragilités préexistantes des pays émergents, notamment la décélération de la croissance, les pressions inflationnistes, un environnement financier international plus tendu, et des problématiques sur la soutenabilité des dettes.

Pour le Maroc, ces impacts se sont traduits par une très forte décélération de la croissance, l’accentuation de la sécheresse qui affecte le PIB agricole sera en récession; des pressions inflationnistes assez élevées, notamment sur les céréales et le transport.

Ce qui est assez inhabituel pour le Maroc. L’autre impact pour le Maroc est visible au niveau de l’environnement financier international, qui est plus tendu, avec une légère hausse des taux de financement.

En ce qui concerne la soutenabilité des dettes, le groupe bancaire rappelle le léger surendettement du Royaume issu des chocs externes successifs (crise sanitaire, fragilité climatique, impacts de la guerre en Ukraine) d’où une hausse des surendettements (recours au FMI lors de la crise Covid-19).

Mais aussi d’autres risques émergents, notamment des risques de tensions sur le blé, des mesures fiscales en faveur des plus pauvres et de leur pouvoir d’achat qui vont retarder la réduction du déficit budgétaire.

L’impact sur l’inflation et la croissance compte tenu de la pondération de ces éléments


L’étude économique du groupe note une sensibilité assez modérée du Maroc aux relations commerciales avec la Russie et l’Ukraine.

Mais par contre une forte sensibilité à la hausse des prix des matières premières, qui se matérialise de façon douloureuse sur les marchés. En ce qui concerne les prévisions de croissance, la banque annonce de fortes révisions à la baisse.

Elle table sur une «croissance du PIB de 1,7% pour l’année 2022», compte tenu de la rupture des chaînes d’approvisionnement, la sécheresse et les risques inhérents à la baisse de la croissance des pays du Sud de l’Europe, notamment l’Espagne, l’Italie et la France, de gros partenaires commerciaux du Maroc.


Croissance en berne en 2022, accentuation du déficit courant, le défi de l’aléa climatique

La sécheresse historique que vit le Maroc va avoir des conséquences assez dramatiques, souligne l’étude. «D’après nos calculs, chaque chute de 10% du PIB agricole a un impact d’environ 1,5% sur la croissance du PIB national au Maroc. Donc, par rapport à nos premières estimations qui étaient d’environ 3,5 – 4% d’augmentation du PIB, cette crise climatique sur le PIB agricole va retirer 1,5% de croissance cette année», table le scénario du groupe.

Parlant de récession agricole, les économistes se questionnent, à l’échelle internationale, sur l’impact du réchauffement climatique mondial qui frappe les pays, avec des sécheresses qui, auparavant, revenaient tous les 10 ans.

Maintenant, ces phénomènes s’accélèrent tous les 5 ans, voire 2 ans. Pour tenter de comprendre ce phénomène, les scientifiques planchent sur cette question qui est un vrai défi pour le Maroc dont 15 à 20% du PIB proviennent de l’agriculture, un secteur qui emploie 35% de la population active. Sur cette base, l’étude recommande au Maroc de réactualiser le Plan Maroc Vert, en fonction des nouvelles données climatiques.

Par Modeste Kouamé 


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