Aéronautique: les industriels se tournent vers la production Carbonfree
C’est l’un des nouveaux axes sur lequel travaillent ardûment, en ce moment, les industriels marocains de l’aéronautique et du spatial. L’objectif est de ne pas rater le virage que le secteur aéronautique est en train de prendre pour aller vers l’avion vert en 2035 et l’émission zéro carbone dans l’aviation civile à l’horizon 2050.
Il y aura bientôt du nouveau dans le secteur de l’aéronautique au Maroc ! Les industriels du GIMAS (Groupement des industries marocaines aéronautiques et spatiales) sont, en effet, en train de travailler ardûment à l’ajout d’un nouvel atout dans leur offre. C’est notamment celui qui consiste à s’orienter vers la conception et la réalisation de pièces et machines de nouvelle génération, basées sur des technologies respectant la production Carbonfree, c’est-à-dire s’alignant parfaitement sur l’objectif d’émission zéro carbone, que s’est fixé le secteur aéronautique mondial à l’horizon 2050.
Une nouvelle orientation annoncée à la 1re édition de l’Aerospace Meetings Casablanca…
Cette nouvelle orientation a été annoncée, mardi dernier, lors de la 1re édition de l’Aerospace Meetings Casablanca 2020-2021, organisée par l’AMDIE (Agence marocaine de développement des investissements et de l’export), en partenariat avec le GIMAS et Advanced Business Event. À cette occasion, le président du GIMAS, Karim Cheikh a d’abord déclaré que «tout le monde s’accorde à dire que l’industrie aéronautique traverse de fortes turbulences à l’échelle mondiale. Je tiens à saluer les industriels de notre plateforme aéronautique marocaine qui ont fait preuve d’une grande résilience par leur capacité à s’adapter, innover dans des conditions complexes et surtout apporter des solutions immédiates. Nous avons été parmi les rares plateformes aéronautiques à continuer à travailler pendant toute la période du confinement».
Poursuivant son propos, le patron du GIMAS a ensuite expliqué qu’«à quelque chose malheur est bon. Cette turbulence a permis au GIMAS, en collaboration avec tous ses partenaires, notamment le ministère de l’Industrie, l’AMDIE, Maroc PME et d’autres, de fixer un plan d’actions prioritaires, de revisiter l’offre Aéro Maroc et de structurer les actions différemment à travers un plan de relance.»
Et d’ajouter que «cette crise a démontré que les cartes de la chaîne de valeur mondiale doivent être distribuées différemment. On parle de l’empreinte carbone, de l’avion vert pour 2035 et de la propulsion à l’hydrogène. Pour ce faire, les chantiers clés, dans lesquels le Maroc doit être présent, ont été définis. Il s’agit de la décarbonation de notre production, la digitalisation de nos processus industriels, l’évolution vers l’industrie 4.0 par les technologies avancées, l’ingénierie et la recherche-développement appliqués».
…qui requiert de nouveaux investissements
En effet, pour garder leur place de sous-traitants privilégiés des grands avionneurs comme Boeing et Airbus ou encore des grands donneurs d’ordre comme Safran, Hexcel, Snecma, etc., les industriels marocains n’ont d’autre choix que de s’inscrire dans cette nouvelle dynamique green. Et même si ces innovations de rupture passent par de nouveaux investissements, mais il faudra s’y mettre !
Le ton est donné par certaines compagnies dont une bien connue sous nos cieux. Le 18 mai 2021, Air France-KLM a fait voler un Airbus A350 alimenté au biocarburant de Paris à Montréal, ce qui traduit la volonté de la compagnie aérienne d’examiner un carburant à faibles émissions. Le vol AF 342 d’Air France a décollé de l’aéroport Charles de Gaulle avec un mélange de 16% de carburant d’aviation durable dans ses réservoirs de carburant, produit en France par Total à partir d’huiles de cuisson usagées.
Ce vol a marqué une «ambition commune de décarboner le transport aérien et de développer une chaîne d’approvisionnement SAF en France», ont déclaré les entreprises dans un communiqué conjoint avec le financement aéroportuaire ADP. Le carburéacteur produit à partir de la biomasse ou synthétiquement à partir d’énergie renouvelable a le potentiel de réduire les émissions de carbone, bien qu’à un coût élevé par rapport au prix du kérosène.
À partir de l’année prochaine, les vols au départ de la France utiliseront 1% de carburant d’aviation durable, ou SAF (Sustainable Aviation Fuel), avant les objectifs de l’Union européenne fixés à 2% d’ici 2025 et à 5% d ‘ici 2030, dans le cadre de la politique du Green Deal de l’UE. À signaler que ces efforts de verdissement de l’aviation civile sont menés partout dans le monde.
Pour cause, la contribution du transport aérien au dérèglement climatique est importante. Le premier impact est l’émission de CO2 dû à la combustion de kérosène, les moteurs d’avion utilisant exclusivement des combustibles fossiles. La combustion d’un litre de kérosène émet plus de 3 kg de CO2. L’aviation civile émet au niveau mondial 1,1 milliard de tonnes de CO2 par an, soit 2,6% des 37 gigatonnes de CO2 d’origine fossile rejetées annuellement.
L’aviation a aussi des impacts hors CO2 sur le climat. Ces impacts proviennent notamment de l’émission à haute altitude de divers polluants et particules issus de la combustion incomplète du kérosène (NOx, suies, SOx, vapeur d’eau, etc.). Ils se traduisent par la formation de nuages d’altitude, une oxydation du méthane (effet refroidissant) et la formation d’ozone dans les basses couches de l’atmosphère (troposphère). L’impact le plus fort est généralement attribué aux contrails, des nuages d’altitude (cirrus) directement générés par les suies issues de la combustion du kérosène. Ces impacts ont un effet très fort sur le climat, mais sont de courte durée. L’effet net de ces impacts a un pouvoir de réchauffement global à 100 ans (la métrique pour comparer les divers gaz à effet de serre) qui serait au moins équivalent à celui du CO2 émis directement.
Aziz Diouf / Les Inspirations Éco