Stratégie logistique : Nécessité de dépasser les contraintes
Le développement de la stratégie logistique se heurte à bon nombre de contraintes : recours insuffisant à une logistique moderne, prédominance d’une logistique traditionnelle, faiblesse du taux d’externalisation des prestations logistiques et forte présence du secteur informel.
La stratégie nationale de développement de la compétitivité logistique est visiblement sur les rails, au vu des réalisations effectuées au cours des dernières années. Mais, les enjeux sont de taille en raison des contraintes et des défis à relever pour pouvoir atteindre les objectifs prévus et faire émerger un secteur logistique performant, de l’avis même du ministre de l’Équipement, du transport et de la logistique, Aziz Rabbah. Le responsable gouvernemental cite notamment le recours insuffisant à une logistique moderne et professionnelle fournie par des prestataires spécialisés et la prédominance d’une logistique traditionnelle souvent réalisée pour un compte propre avec des moyens limités et inappropriés dans la majorité des cas.
Il s’agit aussi de la nécessité de réduire le poids du secteur informel qui freine, selon Rabbah, le développement de prestations logistiques tant au niveau efficacité qu’au niveau qualité de service dans la mesure où le niveau très bas des tarifs pratiqués par ce secteur dans une logique de «dumping» n’obéissent à aucune logique économique et pénalise, de ce fait, l’émergence d’opérateurs logistiques structurés et respectueux des standards les plus basiques de ce métier. Des efforts sont consentis pour lutter contre l’informel et promouvoir le secteur logistique en vue de la consécration du Maroc comme destination de choix pour les investissements ainsi que pour l’amélioration de la compétitivité des échanges commerciaux.
Une croissance annuelle de 5,2%
En dépit des contraintes, plusieurs acquis ont été enregistrés au cours des dernières années, d’après le ministre de tutelle. Sur le plan institutionnel, la gouvernance du secteur a été renforcée par la mise en place de l’Agence marocaine de développement de la logistique (AMDL), de l’Observatoire marocain de la compétitivité logistique, de la Commission nationale de normalisation logistique et du Board national de coordination de la formation en logistique. Sur le plan de l’évolution du secteur, malgré les difficultés liées à la conjoncture économique, le marché de la prestation logistique et du transport routier de marchandises structuré a connu une importante croissance entre 2010 et 2014 : le chiffre d’affaires est passé de 17 à près de 21 milliards de dirhams, soit une croissance moyenne annuelle de 5,2%.
À cela s’ajoutent les importants investissements effectués par les opérateurs publics et privés qui ont permis de baisser le prix de location de l’immobilier logistique prêt à l’emploi d’environ 35% sur les cinq dernières années. Le tissu des opérateurs du secteur s’est développé depuis 2010. En effet, de nombreux groupes se sont installés sur le marché national aux côtés d’opérateurs marocains publics et privés qui ont développé leurs activités logistiques. «Plusieurs opérateurs marocains commencent à se positionner à l’international, notamment sur le marché africain, et bénéficient aujourd’hui de la confiance de chargeurs de classe mondiale», précise le ministre de l’Équipement, du transport et de la logistique. Aziz Rabbah fait prévaloir aussi l’effort soutenu visant la modernisation des chaînes logistiques du pays qui a permis la mise à niveau de la logistique urbaine dans les villes marocaines.
L’amélioration des circuits import-export a été largement opérée grâce notamment à la mise en place du guichet unique PortNet, le traitement de la problématique des surestaries, le passage en mode trois shifts (24/24h) des services de contrôle au port de Casablanca. Pour accompagner le développement du secteur, la formation est un élément clé. Ainsi, l’offre de formation publique et privée dans les métiers logistiques a presque triplé passant de 2.500 sièges pédagogiques en 2009 à 7.300 en 2015. Grâce aux efforts déployés au cours des dernières années, la stratégie marocaine est aujourd’hui citée en exemple par différents pays et institutions internationales. Le ministre de tutelle affiche sa fierté : le Maroc a acquis une position de leader régional comme le démontrent les différents classements internationaux et en témoigne l’adhésion unique pour un pays non-européen à l’European Logistics Association.
L’ambition d’une véritable industrie logistique
Pour réussir les enjeux de la stratégie logistique, le Maroc est appelé à développer une véritable industrie sectorielle. Cette ambition ne pourra se concrétiser qu’en actionnant plusieurs leviers, selon le ministre de tutelle. Pour Aziz Rabbah, l’action pourrait être orientée dans le sens à accroître le taux d’externalisation des prestations logistiques actuellement faible au Maroc et ce dans une perspective de développement de la taille du marché des prestations logistiques au Maroc. En outre, le développement et la sophistication d’une demande intérieure en prestations logistiques contribueraient à faire émerger au Maroc des opérateurs logistiques «champions» par le biais desquels une «industrialisation logistique» pourrait être envisageable.
Le responsable gouvernemental pense aussi que la mise en place d’une véritable industrie logistique au Maroc passerait inévitablement par le développement continu d’infrastructures logistiques performantes permettant une gestion massifiée et optimisée des flux de marchandises.
Le Maroc est également appelé à saisir toutes les opportunités qui se présentent au niveau international «en faisant valoir tous ses atouts pour se positionner comme hub logistique régional et intercontinental, positionnement qui offrirait de nouvelles perspectives de développement pour son industrie logistique».
