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PLF 2020. Au cœur de la “machine des finances”

La préparation d’un projet de loi de finances mobilise les 18.000 fonctionnaires du ministère de l’Économie et des finances et de la réformation de l’administration durant toute l’année. Portraits des architectes de la feuille de route économique et financière du royaume.

Nous sommes le 23 octobre 2018, Mohamed Benchaâboun est nommé ministre de l’Économie et des finances (MEF). Ce jour-là, il faisait face à la presse pour la première fois, en tant qu’argentier du royaume. L’ex-banquier présentait son premier projet de loi de finances (PLF). Benchaâboun n’est pas en territoire inconnu. En 1996, ce dernier quittait son poste dans le privé pour rejoindre l’Administration des douanes et impôts indirects (ADII) où il avait mené l’un des premiers chantiers de la digitalisation de l’époque, en tant que directeur de la programmation et des systèmes d’information. C’est un retour «aux sources».

Les technocrates et le «politique»
Pour cet exercice médiatique, Benchaâboun est bien entouré. Huit directeurs du département l’accompagnent pour cette première apparition médiatique. Ces «technocrates» épaulent Benchaâboun dans son rôle «politique». Dans les domaines des impôts, de la douane, du trésor, du budget, des entreprises publiques, Benchaâboun se tournaient vers ses directeurs pour préciser les chiffres et compléter des repères historiques. Dans ce département, les responsables viennent et partent, mais le système de gestion reste. D’autant plus que le MEF est un géant administratif. Avec ses six directions (Budget, Trésor et des Finances extérieures, Direction des entreprises publiques et de la privatisation, Domaines de l’État, Affaires administratives & générales, Direction des Études & des Prévisions financières) et ses quatre structures sous tutelle (Administration des douanes & impôts indirects, Trésorerie générale du royaume, Direction générale des impôts et l’Agence judiciaire du royaume), les directeurs de ce département assument des responsabilités cruciales pour le bon fonctionnement de l’État. À ces directions et structures, on ajoute quatre organismes sous tutelles : l’Office des changes, la Caisse marocaine des retraites et la Caisse centrale de garantie. Aujourd’hui, Benchaâboun est le manager d’une équipe 18.000 personnes, en majorité (47%) de cadres supérieurs.

Un PLF à deux imprévus
À l’instar du PLF 2019 marqué par le départ de Mohamed Boussaid en pleine période de préparation du projet de budget, la phase du PLF 2020 n’a pas été de tout repos, et ce, pour au moins deux imprévus. Alors que le MEF était engagé dans la préparation de la loi-cadre sur la fiscalité, Omar Faraj, emblématique patron de la DGI, claque la porte de cette direction sensible. Un départ certes déjà annoncé où le haut commis de l’État faisait valoir ses droits à la «retraite», mais qui laissait planer des interrogations sur des dépositions fiscales du PLF 2020. La deuxième raison, un remaniement qui devait chambouler l’architecture gouvernementale et la répartition des budgets entre anciens et nouveaux départements. Malgré ce contexte instable, «la machine du MEF» a fonctionné à plein régime. À l’origine de cette continuité, la présence de «process» bien huilés, pilotés par des directeurs et leurs équipes rodées à cet exercice. Les huit architectes des Lois de finances ont pour particularité une longue expérience dans les arcanes du MEF.

Portraits des architectes de LF
Zouhair Chorfi, gardien du temple du MEF. Il occupe le poste de SG depuis novembre 2017. Il est passé par plusieurs directions du ministère, notamment la Douane et la Direction du trésor. Nabyl Lakhdar, patron de la Douane, est un «homme de la maison». Depuis 1998, il a fait des passages entre la Douane et la DGI.

Aujourd’hui, il est pressenti pour remplacer Faraj à la DGI. Noureddine Bensouda, actuel patron de la TGR, a également fait toute sa carrière au sein des Finances. En 1986, il rejoint le MEF en tant que chargé des études. Il gravira les échelons pour devenir directeur général des impôts en 1999.

En 2010, il est nommé par le roi Mohammed VI, trésorier général du royaume. Son nom revient comme un des successeurs d’Abdelatif Jouahri à la tête de Bank Al-Maghrib. Fouzi Lekjaa est le plus médiatique des directeurs du MEF. Son poste de président de la Fédération royale marocaine de football lui vaut une visibilité inédite pour un directeur du budget. Lekjaa a été aussi connu du grand public pour être le plus jeune directeur au sein du MEF. À 40 ans, il gérait le budget du royaume. C’est l’aboutissement d’une carrière de ce cadre, démarrée au sein du département en 1996.

Depuis 2011, il chapeaute la mise en œuvre du chantier de Loi organique des finances (LOF). À l’opposé de Lekjaa, on retrouve le très discret Abderrahmane Semmar, gestionnaire du «Maroc S.A.». Le directeur des Entreprises publiques et de la privatisation gère un portefeuille public de 225 entreprises, 43 S.A. à participation directe et 479 filiales ou à participation indirecte. Nommé par le Conseil de gouvernement à ce poste en juin 2016, c’est la consécration d’une carrière menée au sein du département. Avec le retour des privatisations pour la deuxième année de suite, le discret Semmar se met en évidence. Faouzia Zaâboul est l’unique femme au sein de cette équipe de onze directeurs. La patronne du Trésor gère un portefeuille public de 800 milliards de DH, soit plus de 80% du PIB.

À la tête du Trésor depuis 2010, Zaâboul se prépare à une nouvelle sortie à l’international. Après celles de 2010 et 2013, Zaâboul gère le délicat dossier des négociations d’un nouvel emprunt. Elle devrait statuer sur les taux, les maturités et les devises avec les banques internationales qui prêteront au Maroc. Last but not least, Jouahri. Il est absent de l’organigramme du MEF mais demeure omniprésent dans cette architecture des LF. L’ex-ministre de l’Économie et des finances durant le Programme d’ajustement structurelle (1981-1986) a gardé son empreinte sur ce département et ses orientations. En tant que gouverneur de la Banque centrale, il ne manque pas de rappeler au MEF ses responsabilités, notamment en matière des équilibres budgétaires. En juin de chaque année, il adresse une lettre au ministre de l’Économie et des finances.
Un document qui demeure confidentiel.


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