Liberté et responsabilité des médias : Une conjugaison difficile ?
Dans de nombreux pays en développement, il s’avère difficile de garantir la liberté de presse et de respecter la déontologie pour plusieurs raisons: manque de législations claires, non-application des dispositions juridiques, financement des médias par les pouvoirs publics… Un constat dressé par les participants aux Assises de la presse francophone qui se déroulent actuellement à Madagascar.
Le respect de la déontologie par le corps journalistique est une question aussi importante que la survie économique des médias. Il s’agit d’un point fondamental car il concerne la crédibilité des médias. Cependant, dans plusieurs pays, notamment en développement, l’éthique n’est pas respectée pour diverses raisons. Ce constat a été dressé par les participants aux assises de l’Union de la presse francophone tenues à Madagascar.
Besoin de législations claires
La mise en place d’une bonne législation est le premier pas vers la concrétisation de cet objectif. Selon Clea Kahn Sriber, directrice Afrique de Reporters sans frontières, les lois dans certains pays sont formulées dans des termes vagues permettant, ainsi, des libertés d’interprétation aux dirigeants; c’est ce qui permet de museler facilement la presse. Aussi faut-il des législations claires répondant aux standards internationaux. Cependant, force est de constater que la mise en place de l’arsenal juridique est loin d’être suffisante. Encore faut-il mettre en application les dispositions juridiques.
Dans de nombreux pays, comme en témoignent différents journalistes d’horizons divers, la législation est bafouée par les pouvoirs publics. Pour de nombreux professionnels, seul l’État de droit garantit la liberté de presse et celle du pluralisme. D’aucuns estiment que cette condition sine qua non doit aller de pair avec l’éthique et la déontologie. Le corps des médias est ainsi appelé à mettre en place des chartes éthiques tout en veillant au respect des règles mises en place. Néanmoins, dans certains pays, il s’avère difficile pour les journalistes de se conformer à la déontologie et de respecter les règles de professionnalisme. C’est ce que relèvent certains journalistes travaillant dans les médias publics en Afrique qui ne savent pas à quel saint se vouer car, dans la plupart des cas, il faut se conformer aux consignes des pouvoirs publics. De l’avis des professionnels, il faut lutter pour que les médias publics ne soient plus discrédités auprès des citoyens car, bien qu’ils soient financés par l’État, leur mission n’est pas de faire de la propagande, mais plutôt d’assurer un service public. Cette mission n’est pas facile et le chemin à parcourir reste encore long.
Pour atteindre les objectifs escomptés, on estime nécessaire de développer la synergie entre les professionnels à travers la création des réseaux de journalistes en vue de défendre les causes de la profession, surtout en Afrique où le journalisme est appelé à jouer un rôle essentiel. Outre la mission classique d’information, ils sont nombreux à souligner que la presse dans les pays en développement a une grande responsabilité en matière de sensibilisation, d’éducation et d’accompagnement des citoyens.
Le Maroc à l’honneur à Madagascar
C’était une soirée pleine d’émotion qu’avait organisée mardi l’Union de la presse francophone à Antsirabé (Madagascar) pour commémorer le passage du souverain Mohammed V en terre malgache. Des témoignages inédits de deux personnes ayant côtoyé le père de la Nation ont cerné la dimension d’exil du regretté roi. Docteur Noraly Nazaraly se rappelle avec une grande nostalgie l’époque où le sultan marocain exilé le chargeait de porter des messages oraux à plusieurs personnalités, dont le général de Gaulle et le président égyptien Abdel Nasser. Une grande estime est portée, de manière générale, par les Malgaches au roi Mohammed V et au Maroc. La relation de fraternité entre les deux peuples n’a de cesse de se consolider grâce à la visite du roi Mohammed VI à Madagascar, comme le rappelle le nouvel ambassadeur marocain à Antananarivo, Mohamed Benjilany.
Jamal Eddine Naji
Directeur général de la Haute autorité de la communication audiovisuelle
Les Inspirations ÉCO : Au Maroc, le pluralisme des médias existe au niveau de la presse écrite et des radios mais pas au niveau de la télévision. Qu’en pensez-vous ?
Jamal Eddine Naji : On devait en principe avoir déjà le pluralisme au niveau des télévisions. Le problème réside dans les porteurs de projets. Plus de 1.400 chaînes satellitaires -dont la majorité présentant une proximité culturelle et de langue- sont gratuites. Ainsi, il faut bien réfléchir à son projet. Je pense que les projets de télévision thématiques pourraient bien fonctionner.
Il faut ouvrir la porte aux investisseurs …
Elle est ouverte. En ce qui concerne la législation, deux projets ont été déposés. Une politique publique pourrait être mise en place pour que les régions aient leurs télévisions locales. À une époque, on pensait qu’il était difficile de créer un journal non affilié à un parti politique ou à un État. Il faut des pionniers. Cependant, il s’avère nécessaire de bien penser le modèle économique pour éviter les couacs vécues par certaines radios privées. Aujourd’hui, il y a deux possibilités. Il s’agit en premier lieu du gouvernement, qui peut procéder à l’ouverture d’une partie du spectre des fréquences. Pour sa part, le régulateur peut souligner, du point de vue du contenu et des droits, la nécessité de la diversification et s’adresser à l’autorité qui gère le spectre pour l’ouvrir. C’est une décision de souveraineté nationale. Sur le plan politique, le Maroc n’est pas, en effet, un pays qui refuse la création de télévisions privées. Il faut se questionner à propos des investisseurs qui voudraient se lancer.
Pour le web, quelle est votre marge de manœuvre, en tant que régulateur ?
La nouveauté concerne la VOD. Le pourvoyeur de services est obligé de montrer à la HACA son catalogue. Il est aussi question de jeter un œil à la programmation des web-tv et web-radios qui proposent une diffusion en continu.