Le constat du Comité de coordination et de surveillance
Le Comité de coordination et de surveillance des risques systémiques a tenu le 23 juin, sa cinquième réunion au siège de Bank Al-Maghrib à Rabat. L’analyse de la situation du système financier au regard des tendances économiques et financières, observées et attendues, a permis au Comité de ressortir avec plusieurs conclusions….
Le Comité de coordination et de surveillance des risques systémiques, chargé d’évaluer les risques systémiques pour le secteur financier vient de tenir sa réunion périodique afin d’examiner l’état d’avancement de la feuille de route inter-autorités en matière de stabilité financière au titre de la période 2016-2018. Il en ressort que les risques macroéconomiques au Maroc se sont globalement situés à un niveau modéré. Le comité précise que le risque émanant de la position extérieure demeure limité, avec des réserves internationales assurant une couverture de six mois d’importation de biens et services.
Aujourd’hui, selon Bank Al-Maghrib, les réserves de changes peuvent assurer la couverture de 6 mois et 16 jours d’importation de biens et services. Un niveau qui tend à baisser, puisqu’en 2016, cet indicateur pointait vers les 6 mois et 21 jours. Pour cette fin d’année, le wali de la Banque centrale, Abdellatif Jouahri, avait annoncé, lors du dernier conseil, que «la prévision des réserves de changes a été revue à la baisse, pour assurer la couverture de 6 mois d’importation de biens et services au terme de 2017 et rester proche de ce niveau à fin 2018». Un recul qui a été entraîné par le creusement du déficit commercial. Celui-ci s’est réduit, en glissement annuel de 9,1 MMDH, sur les cinq premiers mois de l’année. Sur le plan intérieur, l’économie nationale a été affectée en 2016 par la contreperformance du secteur agricole et l’atonie persistante des activités non-agricoles. De 4,5% en 2015, la croissance a plongé à 1,6% en 2016. L’année 2016 avait même été qualifiée de l’année la plus sèche sur les trente dernières années. Au niveau des perspectives macroéconomiques, l’évolution reste favorable en lien avec le renforcement attendu de l’activité économie mondiale et l’accélération prévue en 2017 de la croissance nationale. Celle-ci devrait être dopée, principalement, par le rebond du secteur agricole et la reprise progressive des activités non-agricoles. L’ensemble des institutions nationales et internationales tablent sur un niveau de croissance dépassant les 4%. Parallèlement, le déficit du compte courant et le déficit budgétaire devraient s’atténuer d’ici 2018. Sur un autre volet, le comité estime que le crédit bancaire aux entreprises non-financières a renoué avec la croissance après une contraction constatée en 2015.
Les TPE en souffrance
Le taux des créances en souffrance a, toutefois, enregistré une nouvelle hausse liée à certains secteurs en difficulté. Aussi, sur la base d’une étude réalisée par Bank Al-Maghrib, portant sur un échantillon de près de 14.000 entreprises non-financières privées et publiques, il s’avère que les délais de paiement des créances inter-entreprises se sont, de nouveau, allongés, en particulier pour les petites structures et pour certains secteurs d’activité.
En effet, l’allongement des délais de paiement constitue le principal facteur de mortalité des TPE. Selon les données du cabinet Inforisk, une TPE sur 4 devrait faire face à un risque de défaillance dans les 3 prochaines années. L’État (entreprises publiques ou des collectivités territoriales) et les grandes entreprises sont considérés comme les plus mauvais payeurs. En moyenne, le délai de paiement s’étend à 10 mois dans les transactions entre privés et de 12 mois pour les marchés publics. D’où l’urgence de la mise en œuvre de la réforme du cadre législatif et réglementaire relatif aux délais de paiement. La loi n° 49-15, qui a été publiée au second semestre 2016, n’entrera en vigueur qu’à partir de septembre de cette année. Le comité compte cependant, sur cette réforme pour atténuer la situation. Une refonte des procédures internes de paiement dans les établissements publics serait en cours à travers une extension de loi 92-00. L’objectif étant de limiter le délai de paiement à 90 jours maximum et de revoir le système de calcul des pénalités de retard.
Au niveau bancaire, le comité souligne que les bilans du secteur ont été affectés par les effets de la conjoncture économique nationale. Les banques ont ainsi connu une baisse de leurs marges d’intérêt, conjuguée à une nouvelle hausse du risque de crédit sur leurs opérations réalisées au Maroc. Leurs activités bancaires opérées à l’étranger ont, pour leur part, enregistré de bonnes performances. Globalement, les banques continuent de disposer d’un bon niveau de capitalisation. Le cadre prudentiel est, par ailleurs, en cours de renforcement à l’effet de consolider la résilience du secteur. Le secteur des assurances, quant à lui, continue de dégager une marge de solvabilité, en couverture du risque de souscription, largement supérieure au minimum réglementaire. Sachant que le marché se prépare au futur passage vers un régime de solvabilité basée sur les risques, les excédents de marge devraient probablement se réduire de manière significative. Ainsi, les assureurs qui souhaitent investir sur des actifs trop risqués, devront apporter les fonds propres nécessaires. Par ailleurs, les plus-values latentes susceptibles d’être dégagées par les portefeuilles d’actifs de ces institutions ont connu une hausse en relation avec la performance du marché boursier. Même si, pour le régulateur du marché, l’exposition des compagnies sur le marché boursier est jugée excessive. Réduire la voilure sur le marché actions serait donc souhaitable.
Le marché actions reste cher
Pour l’heure, tout se passe pour le mieux pour le marché boursier, avec une liquidité inscrite dans une tendance haussière. Le comité, la juge toutefois, insuffisante en raison essentiellement de la faiblesse du flottant. La volatilité demeure modérée et enregistre une baisse durant les quatre premiers mois de 2017 après deux années de hausses successives. Toutefois, le marché actions reste relativement cher. En dépit d’une correction des cours en début d’année, la valorisation de la Bourse ressort à un niveau élevé, tirée par des investisseurs à la recherche de rentabilité dans un contexte de baisse des taux d’intérêts.
Au niveau du marché de la dette privée, en dépit des difficultés rencontrées par quelques émetteurs, le risque de crédit reste globalement modéré. Le marché a vu l’émission d’obligations subordonnées perpétuelles d’un nouveau type «Contingent convertible bonds» présentant un profil de risque différent des émissions habituelles, mais dont le volume global demeure limité. Au niveau des caisses des retraites, la réforme paramétrique du régime des pensions civiles -qui a fait l’objet du dernier Conseil d’administration de la CMR – va bon train. Sachant que cette réforme n’est qu’un premier pas, elle devrait, tout de même, permettre une amélioration de sa situation financière en équilibrant la tarification de ce régime pour les droits futurs de ses affiliés sans, toutefois, résorber ses engagements importants au titre des droits passés. Le Comité -présidé par Bank Al-Maghrib et qui regroupe l’ensemble des régulateurs financiers dont l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) et l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) ainsi que le ministère de l’Économie et des finances- a par ailleurs, fait le point sur la mise en œuvre de la feuille de route relative à la contribution du secteur financier marocain à la promotion du développement durable. Il s’est aussi penché sur les enjeux de la finance digitale et les risques liés à la cybercriminalité.