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Flexibilité du dirham : Un impact incertain sur l’économie

«L’appréciation du dirham n’est pas exclue»

Nicolas Blancher, Chef de la mission pour le Maroc au FMI

Une équipe du Fonds monétaire international effectue, depuis quelques jours, une visite au Maroc pour une deuxième revue des résultats économiques obtenus dans le cadre de la Ligne de précaution et de liquidité (LPL). Celle-ci a été accordée au Maroc pour la troisième fois consécutive en juillet 2016 pour un montant de 3,47 milliards de dollars. Dans cette interview réalisée en marge du débat organisé par le mensuel Économie & Entreprises, le Chef de la mission du FMI pour le Maroc, Nicolas Blancher, nous livre son point de vue sur les derniers développements du dossier de la flexibilité du dirham.

Les Inspirations ÉCO : Quelle lecture faites-vous du report sine die de la mise en application de la flexibilité du régime de change au Maroc ?
Nicolas Blancher : Face à une réforme aussi bien importante qu’historique pour le Maroc, le fait d’introduire la flexibilité crée tout naturellement des anticipations. C’est le but même d’une décision de ce genre. Il est tout à fait normal que les gens s’interrogent sur la situation et l’évolution du dirham. C’est une réforme que le Maroc entame dans une position de force. Ce n’est pas le peu de volatilité à laquelle on s’attend à court terme ou bien le report de quelques jours de la décision qui vont changer la force et la solidité des fondamentaux de l’économie marocaine.

Concrètement, quel a été l’apport du FMI dans cette réforme ?
Le rôle du FMI se limite au soutien apporté aux autorités dans l’accomplissement de la transition. La décision de changer le régime de change relève des autorités. Elle a été longtemps mûrie et minutieusement préparée. Notre rôle consiste à aider les autorités à la préparer sur tous les plans. Il s’agit surtout de fournir des recommandations de politiques économiques comme nous le faisons d’ailleurs avec tous les autres pays. Nous assurons un appui technique grâce à notre expertise multi-pays. Le FMI a accompagné plusieurs transitions similaires, notamment dans la mise en place des structures nécessaires au plan microéconomique, à la gestion du marché de changes, entre autres. C’est dans ce sens que s’inscrit le soutien étroit que nous avons apporté aux autorités marocaines. Mais je tiens à souligner que la décision a été entièrement prise par les autorités.

Justement, malgré le démenti des autorités, certains économistes et médias persistent à penser que le passage à la flexibilité aurait été imposé par le FMI. Qu’en dites-vous ?
Non, le FMI ne prend pas de décisions souveraines, surtout quand il s’agit de régime de change. Le FMI s’inscrit en soutien aux décisions émanant des États membres. Nous sommes là pour appuyer les autorités dans la mise en œuvre des grandes réformes. Cela n’a pas de sens de dire que le FMI met de la pression là-dessus. Le FMI ne fait que s’ajuster aux objectifs de politique économique en aidant les autorités à mener à bien les réformes, en leur apportant des recommandations utiles à la préparation micro-économique de la politique macro-économique. Le FMI est loin d’exercer un rôle coercitif.

Quelle lecture fait le FMI quant à l’impact de la flexibilité du dirham sur l’économie marocaine, à la lumière des expériences similaires que vous avez eu l’occasion d’accompagner dans d’autres pays ?
À vrai dire, il y a peu d’exemples qui sont utiles pour l’économie marocaine. La plupart des expériences de changement de régime de change menées à ce jour ont pris le sens inverse. Ce sont généralement des pays qui réagissent sous la pression d’une crise de change. Le Maroc est dans une position de force. La décision de migrer vers la flexibilité intervient dans un contexte qui permet de gérer la réforme de façon ordonnée. Grâce à ses fondamentaux économiques et à ses réserves de change, le Maroc est en mesure de mener cette transition selon un processus graduel. Les autorités ont annoncé leur intention d’élargir la bande de façon limitée. Dans un premier temps, le dirham devra fluctuer dans une bande de 5% et l’on ne peut pas s’attendre à une dévaluation comme cela fut le cas récemment dans d’autres pays. Aussi, les fondamentaux nous rassurent que le dirham est prêt de l’équilibre. Il se peut aussi que le dirham s’apprécie dans six mois, étant donné que la balance des paiement continue de s’améliorer. Cela devrait coûter cher à ceux qui parient sur la dépréciation du dirham. Nous ne savons pas où le dirham peut aller dans la faible marge dans laquelle il sera introduit. Mais il devrait évoluer de façon modérée sur la base des fondamentaux et des décisions à venir des autorités.

Les trois lignes de précaution et de liquidité (LPL) accordées au Maroc durant les cinq dernières années n’ont jamais été activées quoique coûteuses. D’aucuns estiment qu’il est temps d’en finir avec la LPL. Qu’en pensez-vous ?
La décision encore une fois revient aux autorités. L’activation de la LPL est venue suite à la requête des autorités. Nous avons mis à disposition cette ligne parce que nous considérons que les politiques menées par le Maroc sont bonnes et que le pays reste exposé à d’énormes risques exogènes externes caractérisant la conjoncture économique mondiale. Ce sont les autorités qui nous demandent de bénéficier de cette assurance. Du côté du FMI, lorsque nous regardons le bon sens des politiques et des réformes menées par le Maroc, comme celle en cours du régime de change, nous apportons notre soutien, non seulement technique, mais aussi financier à travers la LPL.



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