Désastre humanitaire à Alep
Les forces de Bachar Al Assad ont eu raison d’une rébellion qui, depuis un an, montre des signes de faiblesses. 4.000 rebelles ainsi que leurs familles seront évacués de la ville d’Alep. Toutefois, la situation reste des plus instables.
Après avoir défendu mollement un dernier petit bastion dans la deuxième ville du pays, l’opposition syrienne a perdu Alep. Les forces de Bachar Al Assad ont eu raison d’une rébellion qui, depuis un an, montre des signes de faiblesses, surtout après l’offensive russe en septembre 2015. La chute d’Alep est hautement symbolique. Certains observateurs pensent qu’elle sonne le glas de toute velléité d’opposition à l’avenir. La situation est aujourd’hui d’autant plus favorable au régime d’Al Assad que l’opposition n’a plus le nombre de combattants nécessaire ni l’espace géographique pour lancer des offensives d’envergure. Elle est aujourd’hui cantonnée dans la province d’Idleb, dernier bastion rebelle, dominé par le front Fateh Al Cham.
Les rebelles sont également présents dans la province méridionale de Deraa et à Ghouta, banlieue de Damas où ils cèdent toutefois du terrain. Cela s’explique entre autres par les accords signés avec les rebelles en vertu desquels ils s’engagent à quitter leurs positions à Ghouta contre un retour sécurisé à Idleb. Pas de doute: la situation en Syrie a atteint un point d’inflexion majeur, si bien que Bachar Al Assad ferait désormais partie de l’équation pour toute tentative de rétablir l’ordre et la paix dans le pays. En effet, la situation est arrivée à un point critique avec plus de 300.000 morts depuis mars 2011 et la moitié de la population ayant quitté son foyer. Il est fort probable que 2017 soit marquée par une accélération de l’action du régime visant le ralliement du plus grand nombre de rebelles surtout dans la région de Ghouta, grande antichambre de la capitale Damas. La manœuvre sera moins facile à Idleb par exemple, où la proximité avec la Turquie joue le rôle de catalyseur pour les armées de l’opposition. Quant au soutien étranger aux rebelles, il ne faut pas s’attendre à un maintien des aides comme dans le passé.
Rencontre de la dernière chance
La chute d’Alep leur donnera sûrement du fil à retordre et matière à réfléchir avant de s’investir davantage dans une cause qui apparemment commence à s’effilocher. Parmi les rangs mêmes des insurgés, le doute ne tardera pas à s’immiscer insidieusement, poussant certains à rendre les armes et d’autres à quitter carrément le pays tant que cela est encore possible. Déjà à la faveur d’un accord, annoncé en début de journée du jeudi par un haut responsable de l’armée syrienne, 4.000 rebelles ainsi que leurs familles seront évacués de la ville d’Alep. Après des heures de négociations, cet accord fait suite à l’échec d’un précédent, conclu mardi par la Russie et la Turquie, parrains respectifs du régime de Bachar Al Assad et de l’opposition, qui avait finalement capoté mercredi.
Il faut signaler que la chute d’Alep intervient 24 heures après l’annonce d’une rencontre sur la Syrie, le 27 décembre courant à Moscou entre la Turquie, l’Iran et la Russie. À propos de cette rencontre de la dernière chance, ainsi que la qualifient certains, l’objectif selon le chef de la diplomatie turque est d’arriver à une trêve et de lancer les négociations pour un règlement politique. En effet, le président turc Recep Tayyip Erdogan et son homologue russe Vladimir Poutine ont convenu, mercredi lors d’un entretien téléphonique, qu’une cessation complète des hostilités devrait être mise en œuvre dès que possible à Alep. Et voilà que cet ultime rebondissement prend tout le monde de court. Les deux protagonistes ont également convenu de déployer des efforts conjoints pour commencer l’évacuation des civils et de l’opposition de la ville d’Alep dès que possible, selon la présidence turque. La réalité sur le terrain impose pareils compromis afin de mieux se positionner en cas de basculement majeur dans la situation syrienne.
Avant-hier, le président américain Barack Obama a demandé à son équipe de prendre toutes les mesures pour faciliter l’accès à l’aide humanitaire en faveur des populations de la ville d’Alep. Une initiative prise en concertation avec les alliés et les partenaires, a indiqué le Conseil de sécurité nationale (NSC) dans un communiqué. Mardi aussi, le Canada a fait part de sa «consternation» face aux attaques continues en Syrie, notamment dans la ville d’Alep, tout en appelant à la cessation immédiate des violences et au respect du droit humanitaire international. «Le Canada est consterné par les attaques continues qui prennent pour cible des civils, dont bon nombre manquent maintenant à l’appel ou auraient été assassinés ces 24 dernières heures, alors qu’ils tentaient d’échapper au carnage et aux attaques violentes persistantes perpétrées par les forces gouvernementales syriennes», ont conjointement affirmé les ministres canadiens des Affaires étrangères, Stéphane Dion, et du Développement international et de la francophonie, Marie-Claude Bibeau. Maintenant, avec ce basculement inattendu, la situation à Alep devient des plus problématiques.
Les habitants de la ville, tourmentés par des années de violences et de bombardement, sont aujourd’hui confrontés à une situation nouvelle marquée par l’expectative (voir le témoigne du Dr Zouheir Lahna pages 14 & 15). Mercredi, le maire d’Alep-Est s’est invité au Conseil européen pour dire aux chefs d’État et de gouvernement la détresse des habitants des quartiers en passe d’être totalement repris par les forces syriennes. Par la même occasion, le président français, François Hollande, espérait obtenir un appel des Vingt-huit à un cessez-le-feu.
5.000 syriens régularisés au Maroc
«Les Syriens au Maroc ont le droit au statut de réfugié. Cependant, beaucoup de Syriens ont choisi de passer par la procédure de régularisation des migrants», a souligné le secrétaire général du ministère des MRE et des affaires de la migration. Le responsable a rappelé à ce sujet que lors de la première opération de régularisation, quelque 5.000 Syriens ont été régularisés. Leur intégration se passe sans problème. «Nous n’avons pas de programme spécifique. Leur intégration se passe dans des conditions différentes de celles des migrants subsahariens, en raison de la langue commune», a-t-il expliqué.