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Croissance régionale : L’industrie, parent pauvre

Plusieurs régions du royaume sont à des stades d’industrialisation analogues à ceux des pays les moins avancés (10 %). Elles souffrent d’une structure productive faible sur le plan industriel (inférieur à la moyenne nationale qui est de 16 %). La DEPF recommande de promouvoir l’émergence du secteur industriel dans ces dernières moyennant des investissements et un soutien conséquent.

Dur, dur de combattre les disparités régionales ! C’est ce que démontre une récente analyse de la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) au sein du ministère de l’Économie et des Finances. Cette recherche s’est attelée à estimer et à analyser, pour la première fois, la croissance du PIB régional en volume. Un indicateur fondamental qui faisait jusqu’ici défaut dans le cadre du suivi des Objectifs de Développement Durable (ODD). L’étude permet notamment de mettre en exergue les secteurs qui contribuent positivement ou encore négativement à la croissance. On apprend notamment que la croissance économique nationale (4,4 % durant 2001-2014) est tirée à hauteur de 62% par quatre régions (Casablanca-Settat avec 24,7%, Rabat-Salé-Kénitra à 14,6%, Marrakech-Safi pour 12,7% et Tanger-Tétouan-Al Hoceima à hauteur de 9%). Un  fait qui met en relief les marges de croissance globale à gagner en redressant la contribution de certaines régions à la croissance économique nationale. Dans ce sens, l’industrialisation, telle que relevée par l’Agenda 2030 des Objectifs de Développement Durable (ODD), est mise en avant par l’étude comme une voie à promouvoir.

L’industrie, mais pas seulement…
En effet, certaines régions sont à des stades d’industrialisation analogues à ceux des pays les moins avancés (10%). Hormis Laâyoune-Saguia al Hamra (Valeur ajoutée industrielle représentant 14% du PIB de la région en moyenne durant 2001-2014), Tanger-Tétouan -Al Hoceima (16%) et Casablanca-Settat (37%), les autres régions ont une structure productive faible sur le plan industriel (inférieure à la moyenne nationale qui est de 16%). «Par conséquent, il faut promouvoir l’émergence du secteur industriel dans ces dernières moyennant des investissements de soutien conséquent», soulignent les analyses de la DEPF. Cela est d’autant plus valable que certaines régions ont des niveaux d’industrialisation aussi faibles que ceux des pays les moins avancés (10%) et pour lesquels l’Agenda 2030 des ODD a fixé comme objectif de doubler la part de la valeur ajoutée industrielle dans le PIB. Ce qu’il faut savoir, c’est que cet objectif semble soutenable pour les régions marocaines compte tenu de l’essor connu par Laâyoune-Saguia al Hamra suite aux investissements consentis pour la valorisation des phosphates. Il s’agit, notamment, de Drâa-Tafilalet (Valeur ajoutée industrielle représentant 1% du PIB de la région en moyenne durant 2001-2014), de Béni Mellal-Khénifra (2%) et de Guelmim-Oued Noun (5%). D’autres alternatives peuvent, certes, être envisagées selon la direction du ministère de l’Économie et des Finances. En effet, des pays développés ont fait le choix de l’ancrage de leurs économies aux services (financiers, transport, transbordement…) ou à la production énergétique. «D’ailleurs, la région de Drâa-Tafilalet peut compter sur les investissements établis ou en cours pour promouvoir l’industrie créative et la production de l’énergie renouvelable», précise l’étude.

Disparités exacerbées
Les disparités de croissance économique déterminent la réorganisation des bassins de vie et des bassins d’emplois. À ce titre, les taux régionaux de croissance démographique et d’emploi ont connu une hétérogénéité spatiale analogue à celle de la croissance économique (voir infographies). Ainsi, l’activité économique se développe davantage dans les régions à forte croissance démographique afin de répondre aux besoins de base d’une population en accroissement, suscitant par voie de conséquence plus d’opportunités d’emploi. En plus des ressources propres à la région et d’un aménagement du territoire approprié, cette activité contribuerait à l’attractivité des régions dynamiques en faveur d’un solde migratoire positif. D’ailleurs, la décomposition de la croissance économique régionale révèle un lien plus avéré avec les ressources régionales propres plutôt que leurs spécialisations sectorielles (voir encadré). Par conséquent, les plans d’aménagement établis, les infrastructures socioéconomiques développées et le potentiel démographique et naturel différencient nettement la croissance des régions. Le lancement des plans de développement régionaux (PDR) serait, dans ce sens, de nature à améliorer la compétitivité et l’attractivité des régions afin d’amenuiser les disparités entre elles et que l’effet propre joue un rôle positif dans leurs croissances économiques. «Cette dynamique de croissance différenciée est de nature à accentuer les disparités», prévient la DEPF.

Rattrapages
En effet, l’écart entre les extrêmes en termes de PIB réel par habitant s’est alourdi malgré une amélioration notable pour toutes les régions. Ces disparités sont moins intenses en termes de productivité apparente du travail avec un comportement de croissance du PIB réel par emploi analogue à celui des pays en développement. D’ailleurs, la décomposition des écarts régionaux du PIB réel par habitant par rapport au niveau national révèle que ces écarts dépendent en grande partie de ceux de la productivité apparente du travail sans pour autant dénier l’effet des autres facteurs tels que la performance du marché du travail, le taux d’activité et l’effet démographique. Pour la DEPF, l’amélioration de la compétitivité des régions apparaît comme une première étape déterminante dans la consolidation de leurs croissances. La direction recommande de développer les pôles de compétitivité autour des secteurs de prédilection de chaque région en prenant appui sur le capital humain de son bassin d’emploi. La formation continue de ce capital humain est dans ce sens incontournable pour tresser une trame de fond à toutes les initiatives d’innovation et de R&D à même de consolider la compétitivité et l’attractivité des régions. L’amélioration des capacités propres à la région, notamment, en termes de cadre de vie, de climat des affaires et d’environnement de travail est de nature, également, à renforcer son attractivité des facteurs de production. Faut-il rappeler que beaucoup de professions vitales, notamment celles du secteur libéral boycottent toujours les régions en raison de l’absence de commodités favorisant leur installation et celle de leur famille.


Le sud, nouvelle locomotive

Durant la période 2007-2014, trois régions ont pu maintenir leurs croissances au-dessus de la moyenne nationale, à savoir Dakhla-Oued Eddahab, Laâyoune-Saguia al Hamra et Souss-Massa. Ainsi, la région de Dakhla a enregistré une croissance régionale supérieure à celle nationale de 4,9 points en 2011-2014 et 5,6 points en 2007-2010. Ce dynamisme est plutôt lié à l’effet régional propre (+3 en 2011-2014 et +4,2 en 2007-2010) que celui de la structure sectorielle (+1,4 en 2011-2014 et +2 en 2007-2010). Ceci s’explique par les investissements publics consentis dans les régions du sud pour en faire des régions compétitives sur le plan national. «Cet effet régional propre ne pourrait que se consolider suite à la réalisation des projets lancés dans le cadre du modèle de développement dans les provinces du sud d’une enveloppe budgétaire de 77 milliards de dirhams», affirme la DEPF. Ce projet permettrait selon l’analyse de cette direction de renforcer l’effet sectoriel qui bénéficie, actuellement, d’une configuration sectorielle favorable liée à la spécialisation aux produits de la mer (36 % du PIB régional contre 1 % au niveau national) qui a gardé un rythme de croissance élevée (+7,1 % entre 2007 et 2014 contre +4,2 % pour tous les secteurs). Des ouvertures sectorielles sont, également, pressenties suite à la mise en œuvre du modèle de développement des provinces du sud au niveau de la région, notamment, en agriculture et tourisme ce qui ne pourrait que d’améliorer l’effet structurel sectoriel dans l’avenir. 


En attendant la mise en oeuvre des PDR…

 Les Plans de développement régionaux (PDR) devraient jouer un rôle fondamental dans le développement des régions et redistribuer les cartes de développement de celles-ci. Ainsi, les plans d’investissement et de promotion lancés récemment pour certaines régions pourraient améliorer les tendances, notamment, ceux liés au renforcement et à la valorisation de l’aval agricole et à l’amélioration de l’attractivité touristique. Pour le cas de la Région Marrakech-Safi, la mise en œuvre du PDR mobilisant un investissement de 16 milliards de dirhams (dont 6 milliards par la région), à l’horizon 2022, devrait permettre l’exécution de 60 projets. Ces derniers seront établis autour de trois axes concernant l’attractivité du territoire, l’éducation, la santé et inclusion, et la valorisation des patrimoines culturels. Le PDR de Casablanca-Settat, qui mobiliserait un investissement de 115 milliards de dirhams à l’horizon 2021, s’est attelé à relever les défis propres qui entravent l’épanouissement de la région. Il s’agit notamment de la mobilité (40% des investissements escomptés) et l’attrait social, culturel et la qualité de vie (25%) et à renforcer les domaines à même de consolider les choix sectoriels de la région, notamment, les entreprises, l’innovation et l’emploi (16% dont 78% pour la création des zones industrielles de nouvelles générations) et le milieu rural (8%). Beni Mellal-Khénifra n’est pas en reste. Le lancement du PDR de la région, d’un investissement mobilisé de 36,6 milliards de dirhams à l’horizon 2021 (dont 4,9 milliards par la région) à l’horizon 2021, devrait contribuer au redressement de la situation de la région. Pour la Région Souss-Massa, le PDR, en cours de finalisation, devrait, également, contribuer à son essor, notamment, à travers les projets de diversification de ses produits relativement aux secteurs de prédiction et d’ouverture sur de nouvelles spécialisations (offshoring, gestion hydrique, innovation pour l’Afrique…).



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