Charité criminelle
Il n’y a pas plus humiliant que de tendre la main pour mendier. Un acte tuant toute fibre de dignité, encore plus quand c’est fait sciemment pour en faire une rente… de la honte. Et le plus inquiétant, c’est que ce phénomène prend de l’ampleur au Maroc au point qu’il menace un secteur névralgique qu’est le tourisme. Il n’y a pas moins de 150.000 mendiants selon les statistiques officielles et sûrement autant ou plus, non encore répertoriés, contre à peine 11.000 en Algérie. Les raisons de ce fl éau de société sont multiples et les responsabilités partagées entre ces commerçants des sentiments, les citoyens et le gouvernement.
Bassima Hakkaoui, ministre de la Solidarité nationale, a affirmé au Parlement que l’État fait tout pour réduire ce phénomène : hébergement dans les centres d’accueil sociaux des personnes sans revenus et dans l’incapacité de travailler, aides directes aux veuves et à leurs orphelins, programmes de l’INDH pour la création d’activités génératrices de revenus pour les personnes sujettes à vulnérabilité, etc. Mais cela s’avère insuffisant pour dissuader les réseaux de traite humaine qui font de la mendicité une rente destructrice de la dignité des citoyens et des valeurs de la société. Malheureusement, la loi existe mais comme dans plusieurs cas elle n’est pas appliquée car la mendicité est passible de prison ferme de un à six mois et d’un an en cas d’exploitation d’enfants. Or, en dépit de cette disposition juridique, nos rues accueillent de plus en plus de mendiants que les Subsahariens renforcent davantage.
Aujourd’hui, s’arrêter devant un feu rouge devient un exercice délicat tant le phénomène prend les dimensions de mouvements de masses qui menacent la sécurité des individus et donnent une image d’un pays sous-développé. Hakkaoui a proposé au Parlement d’adopter une loi qui incrimine le citoyen qui aide à la prolifération de ce fl éau en mettant quelques dirhams dans les mains tendues. Elle a complètement raison. Il est temps de structurer la charité et de l’orienter vers des projets de société.