« Gilets jaunes »: la mobilisation reprend malgré les dissensions
Des centaines de « gilets jaunes » ont entamé une nouvelle journée de manifestations à Paris et en province, malgré de récentes divisions dans leurs rangs, et avec une ténacité affichée face à un exécutif qui regagne en popularité, dix jours après l’ouverture du grand débat national.
Rester visibles et audibles dans la rue, c’est le défi des « gilets jaunes ». Alors que plusieurs récents sondages créditent Emmanuel Macron d’une hausse de popularité, leurs rangs sont gagnés par de nouvelles querelles internes, après la rupture entre deux figures du mouvement, Éric Drouet et Priscillia Ludosky.
Ainsi, l’annonce mercredi de la création par les « gilets jaunes » Ingrid Levavasseur et Hayk Shahinyan d’une liste « Rassemblement d’initiative citoyenne » aux européennes de mai, a semé la division.
Pour entretenir la flamme, cet acte 11 des « gilets jaunes » mise sur de nouvelles stratégies.
À Paris, les manifestants seront dispersés entre quatre défilés déclarés en préfecture. Le collectif « La France en colère » de Priscillia Ludosky, organise également une « marche solidaire aux gilets jaunes des Territoires éloignés » samedi après-midi, entre le ministère des Outre-mer et le siège parisien de Facebook.
Samedi midi, plusieurs centaines de « gilets jaunes », d’abord rassemblés sur les Champs-Élysées, où la circulation a été coupée, ont descendu l’avenue, en direction de la place de la Bastille, en passant notamment devant l’Assemblée nationale.
Mathieu Styrna, menuisier de 36 ans, est venu de Fourmies dans le Nord (59): « le grand débat, c’est surtout une grande mascarade. On a l’impression qu »il y a une sélection des gens qui y participent », estime-t-il. Pour lui, le mouvement n’en est qu’à ses débuts: « les gens sont mobilisés en plein hiver, le printemps arrive… »
Pour Gilbert Claro, 42 ans, venu d’Athis Mons (92), « il y a un noyau dur qui est prêt à se battre encore » mais le mouvement « n’a pas vocation à être politique ».
Environ 500 « gilets jaunes » se sont aussi rassemblés cours de Vincennes, dans l’est de la capitale, avant de se diriger vers la Bastille. Sur place, Éric Drouet, a déclaré aux journalistes: « on sait qu’ils (le gouvernement, ndlr) veulent pas nous écouter et qu’ils font le grand débat pour gagner du temps ». Il explique aussi avoir demandé, avec d’autres, à Ingrid Levavasseur de retirer « gilets jaunes » du nom de son mouvement.
À Strasbourg, entre 200 et 300 « gilets jaunes » se sont rassemblés devant le Parlement européen avant de prendre la direction du centre-ville. Valentin Wimmer, un mécanicien retraité de Molsheim (Bas-Rhin), affirme qu' »il faut faire barrage à Macron ». Mais il estime avec regret que « le mouvement commence à s’effriter » et se dit « pas tout à fait d’accord » avec la constitution d’une liste pour les élections européennes.
À Montpellier, une centaine de manifestants se sont rassemblés dès 10H, sur la place de la Comédie et environ 50, autour d’un feu, sur le rond-point des Près-d’Arènes, occupé depuis le 17 novembre.
En Normandie, à Évreux (Eure), des « gilets jaunes » se sont aussi rassemblés dès 10H, avec quelques « moments de tensions », selon la préfecture.
À Paris, les manifestants sont appelés à participer de 17H00 à 22H00 à une « nuit jaune », sur la place de la République, là où s’étaient déroulés les rassemblements citoyens de Nuit debout en 2016, une idée relayée par Éric Drouet. Plusieurs marches nocturnes sont aussi prévues en province.
Au lendemain de l’acte 11, les « foulards rouges » défileront dimanche à Paris lors d’une « marche républicaine des libertés » pour faire entendre « la majorité silencieuse » et défendre « la démocratie et les institutions ».
Pour la première fois samedi, les forces de l’ordre dotées du controversé lanceur de balles de défense (LBD), seront équipées de caméras-piétons, a décidé le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, promettant plus de « transparence » dans l’usage de cette arme non-létale accusée d’avoir éborgné plusieurs manifestants.
Avec 84.000 manifestants recensés par les autorités lors des deux derniers samedis, la contestation avait semblé trouver un second souffle après la trêve de Noël et du Nouvel an, sans toutefois retrouver un niveau de mobilisation de début décembre.